Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
I

ITAMI (Juzô)

acteur et cinéaste japonais (Kyoto 1933 - Tokyo 1997).

Fils du réalisateur Mansaku Itami, il commença sa carrière comme acteur dès 1960, dans de nombreux films japonais : Traité des chansons paillardes japonaises (N. Oshima, 1967), Je suis un chat (K. Ichikawa, 1975) ou étrangers : les 55 jours de Pékin (N. Ray, 1963), Lord Jim (R. Brooks, 1964). Mais sa réputation tient surtout à son talent de satiriste de la société nippone contemporaine, dans les quelques films qu'il a lui-même mis en scène : Funérailles (O-Sôshiki, 1985), Tampopo (1986), l'Inspectrice des impôts (Marusa no onna, en deux parties, 1987-88), qu'interprète sa propre épouse, Nobuko Miyamoto, A-Ge-Man (1990), l'Avocate (Mimbo no onna, 1992), le Grand Malade/la Dernière Danse (Dai byônin, 1993). Une existence tranquille (Shizukana no seikatsu,1995), la Femme du Super-marché (Supaa no onna, 1996), la Femme du Service de Protection (Marutai no onna, 1997), tous avec Nobuko Miyamoto, dénotent un manque d'inspiration et une certaine répétitivité. Juzô Itami se suicide brutalement en décembre 1997, laissant également plusieurs livres et essais.

ITAMI (Mansaku)

cinéaste japonais (Matsuyama 1900 - Kyoto 1946).

Camarade d'école et collègue de Daisuke Ito, Itami exerce divers métiers jusqu'à 26 ans, puis écrit des scénarios, devient acteur et participe à la production fondée par l'acteur Chiezo Kataoka à la fin du muet. Il passe à la réalisation avec ‘ les Vicissitudes de la vengeance ’ (Adauchi ruten, 1928), suivi de très nombreux films historiques dont le plus fameux demeure (‘ Kakita Akanishi ’) [Akanishi Kakita], 1936, avec C. Kataoka, une parodie des films de samouraïs de l'époque qui obtient un grand succès. Il collabore ensuite avec le Dr Arnold Fanck pour la réalisation de la coproduction germano-nippone ‘ la Nouvelle Terre ’ (Atarashiki tsuchi, 1937), connue aussi sous le titre la Fille du Samouraï. Souffrant de tuberculose, il continue cependant d'écrire les scénarios de ses films, et pour des confrères : notamment pour Inagaki (’ le Pousse-pousse ‘, 1943, et ’ Les enfants se tiennent par la main ‘ [Te o tsunagu kora], 1948, ce dernier film réalisé après sa mort en 1946). Son fils, Juzo Itami, est un acteur et essayiste réputé qui a débuté au cinéma en 1960.

ITO (Daisuke)

cinéaste japonais (préf. de Ehime 1898 - Kyoto 1981).

Il exerce d'abord diverses professions, dont celle d'écrivain pour enfants. Soutenu par le dramaturge Kaoru Osanai, il entre à l'Institut du cinéma de la Shochiku en 1920, et écrit des scénarios, dont celui de ’ la Nouvelle Naissance ‘ (Shinsei, 1920), réalisé par Henry Kotani. De 1921 à 1923, il écrit plus de cinquante scénarios divers et réalise son premier film en 1924 : ’ Journal d'un alcoolique ‘ (Shuchu nikki). Après l'échec d'une compagnie indépendante, il entre à la Nikkatsu en 1926 et y devient spécialiste des « jidai-geki » à tendance anarchisante et nihiliste ; avec la vedette Denjiro Okochi, il tourne certains des plus célèbres muets, comme ’ Journal de voyage de Chuji ‘ (Chuji tabi nikki, 1927), ’ le Sabre pourfendeur d'hommes et de chevaux ‘ (Zanjin zambaken, 1929), ou la fameuse série de Tange Sazen, sous des titres divers, et le plus souvent en épisodes. Il impose un style nouveau et dynamique où la caméra ultramobile traque les personnages dans les scènes violentes de « chambara ». Il tourne entre autres ’ le Serviteur ‘ (Gero, 1927), critique sociale typique du film à tendance, dit « keiko-eiga », puis, au début du parlant, une des innombrables versions des ’ 47 ronin ‘ (Chushingura, 1934). Après une période moins brillante, il retrouve son souffle après la guerre avec ’ le Joueur d'échecs ‘ (Osho, 1948), dont il fait deux remakes (1955 et 1962), une adaptation des ’ Misérables ‘ de Victor Hugo (1950) avec Sessue Hayakawa et divers films d'époque jusqu'en 1970, où il cesse ses activités. Ito a tourné près d'une centaine de films.

IVANOV BARKOV (Evgueni) [Evgenij Aleksandrovič Ivanov-Barkov]

cinéaste soviétique (Kostroma 1892 - Moscou 1965).

Il tourne dès 1925 ’ Moroka ‘ (CO Y. Taritch) et en 1926 ’ l'Inondation ‘ (Mabul), d'après le récit de Sholom Aleichem. En 1929, il réalise un film violemment antireligieux, ‘ Judas ’ (Iuda), et aide le cinéma turkmène à s'épanouir à partir des années 30. C'est dans les studios de Turkménistan qu'il met en scène ’ Doursoun ‘ (1940), ’ le Procureur ‘ (Prokuror, 1941 ; CO Boris Kazatchkov), ’ la Fiancée lointaine ‘ (Dalekaja nevesta, 1948), ’ Une mission particulière ‘ (Osoboe poručenie, 1957 ; CO Alty Karliev).

IVANOV-VANO (Ivan) [Ivan Petrović Ivanov-Vano]

cinéaste d'animation soviétique (Moscou 1900 - id. 1987).

Pionnier du dessin animé en URSS (sa première œuvre, ’ Senka l'Africain ‘ [Seńka Afrikanec, CO D. Čerkes et Y. Merkulov], date de 1928), il impose pendant plus d'un demi-siècle son style académique et quelque peu moralisateur mais emprunt d'une grâce naïve qui n'est pas sans charme. Il adapte de nombreux contes folkloriques russes et étrangers pour le public enfantin et a formé plusieurs générations d'animateurs. Parmi ses œuvres les plus connues : ’ le Conte du tsar Durandaï ‘ (Skazka o care Durandae, 1934) ; ’ la Cigale et la Fourmi ‘ (Strekoza i Muravej, 1935) ; ’ les Trois Mousquetaires ‘ (Tri Mušketera, 1938) ; ’ le Petit Cheval bossu ‘ (Konek-gorbunok, 1947) ; ’ Blanche-Neige ‘ (Sneguročka, 1952) ; ’ les Aventures de Pinocchio ‘ (Priključenija Buratino, 1959).

IVENS (Joris)

cinéaste néerlandais (Nimègue 1898 - Paris, France, 1989).

Formé à la fin des années 20 dans le creuset qui a vu naître un Vertov ou un Ruttmann, Ivens est « né au cinéma » en partageant l'enthousiasme d'une avant-garde fébrile. Son père s'occupe d'une importante société de vente d'appareils et produits photographiques (la CAPI). Joris Ivens complète sa formation technique en Allemagne, devient en 1926 directeur technique de la CAPI (et ouvre une section consacrée au cinéma). Il filme ses premiers essais (Étude sur le Zeedijk [ Zeedijk-Filmstudie], CM, 1927 ; Études de mouvements, CM, 1928 ; et surtout le Pont [De Brug, CM, id.], ciné-essai sur le rythme et le mouvement, et la Pluie [Regen, CM, 1929], ciné-poème). Invité en 1930 en URSS, il délaisse l'expérimentation pour le réalisme et s'oriente sur la voie de l'engagement idéologique et politique. À l'orée des années 30, il tourne plusieurs petits documentaires dans son pays, notamment Zuyderzee (MM, 1930), Symphonie industrielle (Philips-Radio, CM, 1931) et Créosote (Creosoot, id.) ; il revient en URSS réaliser un film sur un chantier de hauts fourneaux à Magnitogorsk (Komsomol / le Chant des héros [ Pesn'o gerojah], MM, 1932). Il signe en 1933 un film avec Henri Storck, Borinage (CM), document accusateur sur la condition des mineurs du sud-ouest de la Belgique. Enfin, il reprend les images de Zuyderzee en modifiant le montage du film et en le sonorisant : Nouvelle Terre (Nieuwe Gronden, CM , 1934). Joris Ivens comprend désormais que sa vocation est celle d'un « homme à la caméra », d'un témoin attentif et enthousiaste des transformations sociales, politiques et économiques de son siècle. Il se métamorphose en globe-trotter impénitent et sera désormais celui qui épouse tous les soubresauts de son époque afin de les transmettre à ses contemporains par la voie de l'image. Partout où l'homme brise ses liens d'esclavage, partout où l'homme cherche à construire son avenir, Ivens accourt, plante sa caméra et dialogue avec tous ceux qu'emporte le vent nouveau de l'espérance. Plutôt que de filmer l'homme dans son individualisme et sa solitude, il préfère filmer l'homme communautaire, le peuple, la « base » de la pyramide. Il est présent en Espagne (Terre d'Espagne [Spanish Earth], 1938), en Chine (les 400 Millions [The 400 Millions], 1938), aux États-Unis (l'Électrification et la Terre [Power and the Land], CM, 1940), en Indonésie (L'Indonésie appelle [Indonesia Calling], CM, 1946), dans les pays d'Europe centrale, où il célèbre l'espoir des « lendemains qui vont chanter » (les Premières Années [Pierwsze Lata], 1947 ; La paix vaincra [Pokoj zwyciezy swiat], CO J. Bossak, 1951 ; L'amitié vaincra [Naprozod mlodziezy], 1951-52 ; le Chant des fleuves [Das Lied der Ströme], 1954). Il supervise ou, plutôt, codirige avec Gérard Philipe une production financée par l'Allemagne de l'Est et la France : les Aventures de Till l'Espiègle (1954) et s'établit en France à partir de 1957, lieu d'ancrage d'un voyageur-né qui devait très vite reprendre ses valises et sa caméra pour assouvir sa soif d'humanisme fraternel. Après une pause poétique à Paris (La Seine a rencontré Paris, CM, 1957), on le retrouve en Chine (Lettres de Chine [Before Spring], CM, 1958), en Italie (L'Italie n'est pas un pays pauvre [L'Italia non è un paese povero], 1959), au Mali (Demain à Nanguila, MM, 1960), à Cuba (Carnet de voyage [Carnet de viaje], CM, 1961 ; Peuple armé [Pueblo en armas], CM, id.), au Chili (... À Valparaíso, CM, 1962), en France à nouveau (le Mistral, CM, 1965), au Viêt-nam (le Ciel, la Terre ; le 17e Parallèle, 1967, CO Marceline Loridan ; le Peuple et ses fusils [film collectif sur le Laos], 1969), en Chine encore (Comment Yu Kong déplaça les montagnes, 1976 ( [1971-1975], en 6 parties ; CO M. Loridan).