Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
A

ANIMATION (techniques de l'). (suite)

Les premiers dessins animés sont tracés sur papier et tournés sur table transparente éclairée par-dessous. Le décor et les personnages ne doivent pas s'enchevêtrer ; il faut donc animer les personnages dans les espaces que le décor laisse libre. Ainsi s'explique la mise en page aérée du dessin animé noir et blanc des années 20. Parfois un élément de décor doit être retracé sur chaque phase d'animation (ligne d'horizon, plancher ou porte qui s'ouvre)...

Très vite, l'immensité de la tâche requise par la création d'un cinéma dessiné conduit les réalisateurs à trouver des moyens de réduire la quantité de travail. Barré met au point le « Slash System », qui divise la représentation d'un personnage entre une partie fixe (parfois pendant plusieurs secondes) inscrite sur un calque stationnaire et une partie mobile (bras, jambe, tête) tracée sur un calque et bientôt un cellulo convenablement repéré mécaniquement et changé pour chaque image. Cherchant toujours à mieux dissocier les éléments constitutifs de l'image (personnages, décors, effets), Barré, dans la série des Grouch Chaser, utilise des matériaux transparents. D'abord, des plaques de verre pour tracer des effets spéciaux, image par image, sous la caméra : fumée de cigare ou jets de liquide, éléments du premier plan permettant au personnage de passer derrière un arbre sans que sa disparition doive être dessinée image par image. C'est aux studios Barré que Bill Nolan utilisera dès 1915 des décors en bande qui défilent sous la présentation image par image d'un cycle de phases de personnages marchant (horizontalement ou verticalement) ; brevetée par Bray et Earl Hurd en 1915, la technique du cellulo, en se généralisant, va permettre une organisation industrielle du dessin animé américain (Studio Bray, Paul Terry). Elle va faciliter la répartition, sur un plus grand nombre de collaborateurs, du poids de la création de toutes les phases successives de mouvement. Une telle organisation, rigoureuse, du travail va encourager la création des grands ateliers des années 30, la mise au point de personnages centraux, véritables vedettes internationales d'un très grand nombre de courts métrages, soutenir la mise au point d'un style plastique et caricatural qui dominera le dessin animé et le cinéma d'animation pendant un demi-siècle.

Pendant quelque temps, cependant, Barré, Pat Sullivan et Otto Mesmer (pour Felix the Cat) resteront fidèles à l'animation sur papier, sauvegardant ainsi les qualités de contraste et de simplification graphique qu'imposait ce dispositif, et qu'accentuait encore un tournage sur pellicule positive. Ainsi s'est établi un style particulier de dessin animé noir et blanc propre à l'école de New York des années 20, qui, de Barré à Mesmer et aux frères Fleischer de Out of the Inkwell, exploreront un style de cinéma dessiné propre à un univers graphique et typographique dans lequel l'encrier, la plume, l'encre noire et la main du dessinateur se disputent les premiers rôles.

La composition et la réalisation de films d'animation destinés à être distribués entre un grand nombre de collaborateurs artistiques exigent des méthodes de préconception et de planification précises (surtout si l'on s'attaque à un long métrage de dessin animé ou à des séries de programmes destinés à la télévision).

D'abord, une planification spatiale, qui définit les caractéristiques des personnages et des décors, décrit l'action scénique graphique et plastique à travers des croquis successifs de plus en plus soignés et détaillés (« scénarimage », ou story board), puis précise les échelles de plan, les champs d'action, les entrées et les sorties des personnages sur les décors.

Ensuite, une planification temporelle qui transforme le synopsis en scénario minuté puis en partition géométrique indiquant sur des bandes horizontales superposées et découpées en secondes le détail des actions, des pantomimes, des dialogues, des effets sonores et musicaux en mettant en évidence les nuances de mouvement en fonction du temps.

De ces tables de minutage seront tirées, lors de la réalisation de l'animation, les feuilles d'exposition qui porteront sur des feuillets verticaux les détails de superposition des cellulos, de mise en place sur le plateau de la table de prise de vues, de passage dans la caméra ou de mouvement de tournage, en accordant une ligne pour chaque image du film.

Vient alors le moment de produire l'animation proprement dite sur des documents : fonds, calques d'animation, cellulos portant tous les mêmes perforations de repérage afin de conserver une position définitive aux éléments à toutes les phases de la préparation, de la réalisation graphique, et du tournage.

Aux premiers croquis libres du réalisateur et des chefs animateurs qui donnent des silhouettes intenses et expressives du personnage succèdent des tracés plus précis, qui constitueront des extrêmes d'animation. Des assistants d'animation fourniront les phases intermédiaires nécessaires à une recomposition graphique du mouvement (les « intervalles ») à raison de 16 images par seconde pour le cinéma muet et de 24 ou 25 images par seconde pour le cinéma sonore et la télévision.

Ensuite, chacun des dessins est tracé sur cellulo avec des encres ou des gouaches de couleur (traçage) puis les différentes plages cernées par le dessin sont remplies de couleurs sur la face inverse du cellulo (gouachage) afin de s'imposer dynamiquement sur les décors (fonds) grâce à leur opacité.

Avec l'apparition du cinéma sonore (Western Electric, 1920-1922), les studios Walt Disney décident de produire des courts métrages accompagnés par une bande son, avec Steamboat Willie (1928) et la série Silly Symphony à partir de 1929. Cette série va d'ailleurs accroître la complexité de la planification temporelle en imposant des structures lyriques et métriques à une animation visuelle désormais renforcée par des bruitages, des effets sonores, un accompagnement musical et des séquences de danse ou d'exécution instrumentale.

Nouvelles méthodes électroniques et informatiques.