Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
S

SODERBERGH (Steven)

cinéaste américain (Atlanta, Ga., 1963).

Palme d'or à Cannes en 1990, Sexe, mensonges et vidéo (Sex, Lies and Videotapes, 1989) provoqua, bien malgré lui, une polémique. Impertinent, inhabituel, cérébral à la manière d'un certain cinéma européen, ce film aux qualités discrètes (finesse psychologique, souplesse de la direction d'acteurs, fluidité d'une mise en scène qui privilégie l'allusion) ne constitue en rien un début fracassant. La personnalité de Soderbergh, élégante et raffinée, ne s'est démentie qu'aux yeux des paresseux qui confondent poudre aux yeux et affirmation d'un talent. Thriller ambitieux et expressionniste dont le personnage principal donne son titre au film, Kafka (id., 1991) explore, comme le précédent film, un monde intérieur : Soderbergh s'y remet en question par un déploiement visuel (alternance noir et blanc/couleur) et décoratif auquel Sexe, mensonges et vidéo ne nous avait pas préparés. Malgré un moindre impact médiatique, Kafka confirme le talent et l'intégrité artistique de Soderbergh. Son film suivant, King of the Hill (id., 1993), aussi sobre visuellement que Kafka est complexe, aussi enraciné dans l'Amérique que Kafka est fasciné par l'Europe, renoue avec la justesse psychologique et l'émotion rentrée de Sexe, mensonges et vidéo. Ce dépouillement provoque de nombreuses réactions atterrées ou compatissantes sur Soderbergh, qualifié de faux espoir déçu d'une Palme d'or hâtive. En fait, King of the Hill vient simplement rappeler que Soderbergh n'a pas choisi la facilité et qu'il poursuit avec obstination un parcours qui refuse toute concession. Patiemment, il va se faire un place non négligeable à Hollywood, décidé, ce qui n'est pas facile, à marier le film de genre et un univers personnel. Ce sont À fleur de peau (The Underneath, 1995), magnifique film noir esthétisant, Hors d'atteinte (Out of Sight, 1998), sur un ton plus léger mais qui affirme une maîtrise stylistique grandissante, l'Anglais (The Limey, 1999), nouveau film policier dans une tonalité nostalgique, et enfin Erin Brockovich (id., 2000), habilement taillé aux mesures de Julia Roberts, et Traffic (id., id.), film-dossier sur la drogue, aux changements de styles remarquablement négociés, deux œuvres qui font un véritable triomphe à son auteur.

SOFFICI (Mario)

cinéaste argentin d'origine italienne (Florence, Italie, 1900 - Buenos Aires 1977).

Fixé à Mendoza dès son enfance, il est acteur en 1931 (Muñequitas porteñas, José A. Ferreyra) et metteur en scène, en 1933, avec Noche federal. Auteur prolifique, il mène une carrière inégale. Remarqué par El alma del bandoneón (1935), mais surtout avec Vent du nord (Viento norte, 1937) et Kilómetro 111 (1938), il fait preuve d'une grande maîtrise technique dans Cadetes de San Martín (id.), et produit son œuvre maîtresse en 1939, Prisioneros de la tierra. Il passe facilement du film à caractère social au film politique (Héroes sin fama, 1940), avant de se tourner vers un cinéma nettement plus commercial, dont le savoir-faire ne sauve pas l'extrême pauvreté des sujets : Vacaciones en el otro mundo (1942), l'Enfer de la jalousie (Celos, 1947) par exemple. Soffici retrouve une partie de son inspiration, en 1954, avec Quartier gris (Barrio gris), et signe à nouveau, en 1958, un film talentueux et plein d'humour, Rosaura a las diez. Plus tard, il ne tournera plus que sporadiquement des films médiocres.

SOFICA (Société de financement du cinéma et de l'audiovisuel).

Dans plusieurs pays, divers systèmes fiscaux ont été appliqués, parfois temporairement, dans le but de favoriser le développement de l'industrie cinématographique – parfois avec des résultats dignes d'intérêt (Australie, par exemple). Il s'agit principalement de l'abri fiscal (tax shelter), qui offre la possibilité à des ménages d'échapper partiellement à l'impôt en investissant dans la production de film – le film de Mel Brooks les Producteurs évoque, sur le mode burlesque, une opération de ce type dans le monde du spectacle.

C'est ainsi que des sociétés spécialisées créées aux États-Unis dans ce but ont apporté au cours de la période 1976-1996 des capitaux importants aux majors hollywoodiennes. D'où l'évocation des films produits ‘ avec l'argent du dentiste de Tucson ’.

En France, le gouvernement a décidé en 1985 de développer les investissements dans la production en favorisant la création d'intermédiaires spécialisés, les Soficas, destinées à rassembler des capitaux individuels échappant à l'impôt dans certaines limites. Après avoir connu un certain succès auprès des souscripteurs (et des producteurs) et représenté environ 10 % du financement des films français, les Soficas se sont stabilisées à 5 % et leur nombre s'est réduit. Elles sont critiquées notamment à cause de l'absence de risque qui caractérise leurs choix et du nombre très limité de souscripteurs qui se sont engagés dans ces procédures (qui s'appliquent aussi à la production télévisuelle).

SOFT FOCUS (locution anglaise signifiant « foyer doux »).

Ensemble des techniques qui permettent, par une légère diffusion des rayons lumineux (tulle devant l'objectif, par ex.), d'adoucir l'image fournie par un objectif. ( ÉCLAIRAGE.)

SOFT LIGHT (locution anglaise signifiant « lumière douce »).

Lumière qui éclaire à peu près sans ombre la scène à filmer, de façon similaire à la lumière du jour pénétrant par une fenêtre orientée au nord. ( ÉCLAIRAGE.)

SOKOLOFF (Vladimir)

acteur d'origine russe (Moscou, Russie, 1889 - Los Angeles, Ca., 1962).

Petit, maigre, ridé, pittoresque, les yeux bridés, en un mot : « exotique », Sokoloff a-t-il jamais été jeune ? Il a promené sa silhouette et son talent en Russie, en Allemagne, en France et aux États-Unis, marquant chaque fois son rôle, si épisodique fût-il (avec une prédilection pour les fourbes, les traîtres, les rusés), de son étrange poésie. On fera un sort particulier aux Bas-Fonds (J. Renoir, 1936), où il avait une manière inimitable de traiter Suzy Prim de « chienne », à Pour qui sonne le glas ? (S. Wood, 1943), où il était un partisan espagnol, au Paradis des mauvais garçons (J. von Sternberg, 1952), où on le retrouvait en mendiant chinois aveugle, et aux Sept Mercenaires (J. Sturges, 1960), où il jouait un péon mexicain. Qui fut plus éclectique ?