Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
A

ANIMATION. (suite)

Hongrie.

En Hongrie aussi, l'histoire du cinéma d'animation est ancienne. Elle commence avec István Kato (1914). Avant-guerre, plusieurs talents importants quittent le pays et s'installent à l'étranger : George Pal, John Halas, Jean Image, Étienne Raïk. Gyula Macskássy, qui suivit comme Halas l'enseignement du peintre Sandor Bortnyik, adepte du Bauhaus, est le principal représentant du pays dans l'après-guerre avec le Diamant et le Petit Coq (1951), le Crayon et la Gomme (1959).

Bulgarie.

Alexander Denkov, peintre et illustrateur d'origine pragoise, est le principal artisan du renouveau du cinéma d'animation bulgare après-guerre avec deux courts métrages de caricature (Un malade, le Petit Voleur, 1946). Après des débuts difficiles au sein de la nouvelle industrie cinématographique d'État, l'animation bulgare trouve une expression originale, faite de tradition nationale et populaire, avec deux réalisateurs : Todor Dinov (Marko le héros, 1955) et Donio Donev (Duo, 1961).

Roumanie.

Le seul nom de Ion Popescu-Gopo s'impose. Auteur du premier film d'État, l'Abeille et le Pigeon (1951), ses films oscillent entre la fonction moralisatrice qu'ils devaient implicitement jouer et une maestria épigrammatique et humoristique (Courte histoire, 1956 ; Homo sapiens, 1960 ; Hallo, Hallo, 1962).

Chine.

La révolution de 1949 bouleverse le cinéma d'animation naissant. Sous la direction du caricaturiste et peintre Te Wei et du jeune intellectuel Jin Xi, un groupe de 22 personnes forme un premier studio à Changchun avant d'intégrer, l'année suivante, Shanghai. Le plus jeune des frères Wan, Wan Chaochen rejoint cette équipe. Le nouveau régime décide d'apporter une attention spéciale au cinéma d'animation, qu'il imagine utiliser à l'intention de la jeunesse. Dès 1953, le studio de Shanghai est en mesure de réaliser, sous la direction de Jin Xi, son premier film en couleurs (les Petits Héros). Graphisme, chromatisme et fluidité du mouvement sont de grande qualité et impressionnent les critiques du Festival de Cannes lors de la projection de Pourquoi le corbeau est noir, de Qian Jianjun et Li Keruo (1955). Entre 1954 et 1956, Wan Laiming puis Wan Guchan rejoignent leur cadet. Le studio compte dès cette époque plus de 200 employés. Wan Guchan, avec Zhu Bajie mange la pastèque (1958), introduit une technique de figures découpées, inspirées de la culture traditionnelle. Plusieurs réalisations du début des années 60, politiquement marquées, n'en sont pas moins d'une grande qualité esthétique. C'est le cas du Pont de l'Armée rouge (1964), de Qian Yunda. D'autres genres font également leur apparition, plus tournés vers la seule préoccupation esthétique, tel les Têtards à la recherche de leur maman (1960), de Te Wei et Kian Jajun, qui met en scène le lavis chinois. Quant au Dragon sculpté (1958), de Wan Chaochen, il est réalisé en marionnettes. Le deuxième long-métrage de dessin animé en couleurs, le Roi des singes bouleverse le palais céleste (1961-1964), de Wan Laiming, confirme les grandes qualités de l'animation chinoise. Mais la Révolution culturelle entraîne une longue fermeture du studio de Shanghai.

Ce développement des cinémas nationaux et d'une production internationale est légitimé par la création, en 1960, du premier Festival international de cinéma d'animation à Annecy.

La fin du XXe siècle

est paradoxale. Tandis que le tiers et le quart monde accèdent artisanalement au cinéma d'animation et en rejoue ses temps héroïques, un précipité d'esthétiques exprime le bouleversement planétaire, une crise du modèle graphique unique s'esquisse et les technologies déplacent les modes de captation et de réalisation, remettant en cause les supports de visionnement. Dans un contexte de concurrence accrue, trois grands blocs économiques émergent : l'Amérique du Nord, le Japon et l'Europe, où se multiplie l'apparition de festivals spécialisés. En Amérique du Nord, l'émergence de compagnies concurrentes à la Disney (Dreamworks) annonce à la fois la fin d'un monopole économique et souligne le véritable déplacement de nature opéré vers 1984 : The Walt Disney Company est désormais une industrie du loisir international qui pilote « une cité des automates » (Umberto Eco). Dans ce contexte général, l'acte créateur pur apparaît de plus en plus fragile et menacé.

Si plusieurs pays d'Amérique latine possèdent des histoires qui, individuellement, ont pu s'exprimer dès les années 20 ou 30 (Argentine, Brésil, Cuba, Mexique), la majorité d'entre eux accèdent timidement au cinéma d'animation dans les années 70-80 (Colombie, Nicaragua, Venezuela, Uruguay, Pérou, Chili, etc.). Influencé esthétiquement et techniquement soit par le cartoon américain, soit par les films cubains, il est majoritairement caractérisé par un travail de caricature aux résonances parfois politiques.%En Orient, la situation est plus contrastée, certains pays accédant de manière autonome au cinéma d'animation, d'autres dépendant de la division internationale du travail. Par exemple, le cinéma iranien (auquel sont liés les noms de son fondateur Jefa Tejaratchi, et d'un de ses successeurs, Nooredin Zarrinkelk), le cinéma israélien (dont Ytzhak Yoresh a été le principal représentant), ceux de Turquie, d'Inde, de Thaïlande (très peu développés), ou d'Hong Kong ont pris leur essor à partir des années 70 sur la base de traditions culturelles nationales. D'autres pays, tels le Vietnam ou la Corée du Nord, construisent un cinéma d'animation dans les années 50-60, sous l'influence de l'URSS. Un troisième bloc de pays — parmi lesquels Taiwan, les Philippines, la Corée du Sud — apparaît comme un espace de sous-traitance exploité par les grands studios américains et européens depuis les années 70. Quant à l'Afrique, qu'elle soit du Nord ou continentale, le cinéma d'animation y apparaît disséminé, à la recherche d'une image, peut-être depuis les années 80, et ne laissant entrevoir ici ou là que les promesses d'une expression identitaire future, notamment en Égypte (Ihab Shaker), en Tunisie, au Maroc, en Algérie, au Niger (Moustapha Alassane), au Liberia, en Zambie et en Afrique du Sud (où le travail de William Kentridge se révèle seul à bénéficier d'une aura internationale méritée).