Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
M

MARX BROTHERS (les). (suite)

Les films ultérieurs, notamment Une nuit à l'Opéra, comportent encore d'excellents morceaux, mais quelque chose commence à se déliter, la « soudure » se fissure entre les trois personnages. Et, si l'invention verbale de Groucho n'a pas tari, la fantaisie de Harpo a tendance à devenir plus anodine, sauf dans Go West, où il reprend et transforme en rage pure le gag du chemin de fer qu'on brûle pour le faire avancer (gag inventé par Keaton pour le Mécano de la General) ; certaines trouvailles superbes (une cabine de navire progressivement emplie à ras d'êtres humains dans Une nuit à l'Opéra (A Night at the Opera, S. Wood, 1935) sont un peu perdues dans des intrigues auxquelles manque la frénésie de naguère. Le déclin devient alors sensible de film en film : Un jour aux courses (A Day at the Races, id., 1937) ; Panique à l'hôtel (Room Service, W. A. Seiter, 1938) ; Un jour au cirque (At the Circus, E. Buzzell, 1939) ; Chercheurs d'or (Go West, id., 1940) ; les Marx Brothers au grand magasin (The Big Store, Charles Riesner, 1941), film à la décoration duquel Salvador Dalí passe pour avoir collaboré, et The Doughgirls (James V. Kern, 1944). En 1946, Groucho Marx a l'idée de « parodier » Casablanca de Michael Curtiz, et cette seule idée marque l'appauvrissement de l'invention, par rapport à la perpétuelle « fête du collège » qui servait de repère aux improvisations du génial trio. Le film (Une nuit à Casablanca [A Night in Casablanca], A. Mayo) ne manque pas d'intérêt — une inquiétude diffuse y tourne au cauchemar — mais, après un célèbre gag d'ouverture, il languit fâcheusement. Quant à la Pêche au trésor (Love Happy, D. Miller, 1950), c'est un mélange des Marx Brothers (mais où chacun tient sa partie pour soi) et de comédie musicale (avec la séduisante Vera-Ellen) : Groucho y « regarde » passer Marilyn Monroe, il y a quelques gags (peu originaux) et l'on sent qu'une époque se termine.

L'association des frères était rompue dans les faits. Scénariste en 1937 du film de Mervyn LeRoy, The King and the Chorus Girls, Groucho joua des « extras » dans divers films musicaux (Copacabana, A. E. Green, 1947 ; Mister Music, Richard Haydn, 1950 ; Double Dynamite, id., I. Cummings, 1951) et apparut furtivement dans A Girl in Every Port (Chester Erskine, 1952). Le trio reparut (mais dans des épisodes séparés) en 1957, dans la bouffonne Story of Mankind d'Irwin Allen (Harpo y tenait le rôle d'Isaac Newton, et Groucho celui de l'homme qui acheta Manhattan aux Indiens). Chico prit le premier sa retraite, tandis que Harpo rédigeait ses Mémoires : Harpo Speaks ! (1961). Devenu une grande vedette de la TV (You Bet Your Life), Groucho joue au cinéma son propre rôle dans la Blonde explosive (F. Tashlin, 1957) et celui de « Dieu », en réalité un chef de gangsters, dans la grinçante comédie de Preminger, Skidoo ! (1968). Ses apparitions au petit écran, bien que plus rares, durèrent jusqu'au début des années 70. En 1972, il revient au Carnegie Hall pour un one-man-show et reçoit au festival de Cannes une récompense spéciale. Ses toutes dernières années furent marquées par la lutte contre une douloureuse maladie. Il écrit encore : Groucho and Me (Groucho et moi, 1962) ; Memoirs of a Mangy Lover, 1964 ( Mémoires d'un amant lamentable, 1980) ; Letters of Groucho Marx (1967). Leur drôlerie est parfois facile, mais souvent on y retrouve la férocité, la faconde, l'humour ravageur et triomphant de l'homme « à la moustache et au cigare », inséparable, dans notre souvenir, de ses deux impayables acolytes.

MARZI (Franca)

actrice italienne (Rome 1926 - Cinisello, Balsano, 1989).

Héroïne toute désignée de mélodrame et de films de cape et d'épée, elle eut la chance d'être dirigée par les deux virtuoses du genre, Riccardo Freda et Vittorio Cottafavi. Avec le premier, elle fut la comtesse du Fils de d'Artagnan (1950) et la Katia de la Vengeance de l'Aigle noir (La vendetta di Aquila nera, 1952) ; avec le second, l'une des victimes du Prince au masque rouge (id.). Elle fit aussi partie des Nuits de Cabiria felliniennes en 1957 et des Femmes d'un été de Gianni Franciolini en 1958. Dernier film connu : Scusi, lei è favorevole o contrario ? (A. Sordi, 1966).

MARZUQ (Sa'id)

cinéaste égyptien (Le Caire 1941).

Réalisateur de télévision venu au cinéma, il écrit et tourne son premier long métrage en 1970 : Ma femme et le chien (Zawgati wa al-kalb), dont l'onirisme expressionniste tranche sur la production égyptienne. La recherche d'une prise de vues originale n'est pas toujours un gage de réussite, témoin le film qui suit, la Peur (al-Khawf, 1972), également interprété par Su‘ ad Ḥusni. Je veux une solution (Uridu Ḥallan, 1974), avec Fatin Ḥamama, traite du divorce demandé par la femme, sujet sensible pour toute société musulmane, et les Coupables (al-Mudhnibun, 1975), avec Magda al-Khatib et Nur al-Sharif, met en procès la nomenklatura égyptienne. Ces deux films ont atteint par l'actualité des thèmes et leur traitement une réelle audience. Ses deux dernières réalisations  ’Sauver ce qui peut l'être‘  (1985) et  ’Jours de colère‘  (1988) démontrent une volonté d'enracinement dans les préoccupations spirituelles qui secouent les sociétés arabes mais quelquefois avec facilité.

MASELLI (Francesco)

cinéaste italien (Rome 1930).

Diplômé du Centro sperimentale de Rome en 1949, assistant de Chiarini et d'Antonioni, il débute très jeune par des courts métrages qui attirent l'attention : Bambini (1951), Ombrellai (1952). Son documentaire Zona pericolosa (1951) est un pamphlet contre le décervelage par les fumetti, les bandes dessinées. Son talent précoce est confirmé par son épisode (La storia di Caterina, sur un scénario de Zavattini) du film collectif L'amore in citta (1953), inspiré par un fait divers : une fille-mère conduite par la misère à abandonner son bébé. Resté pratiquement inconnu hors d'Italie, son premier long métrage, Gli sbandati (1955), est une pénétrante analyse de la psychologie des adolescents de la grande bourgeoisie durant les dramatiques événements de 1943. La Femme du jour (La donna del giorno, 1957), I delfini (1960) et Désirs pervers / les Deux Rivales (Gli indifferenti, d'après le roman de Moravia, 1964) sont des études de mœurs conduites avec perspicacité. Tout en réalisant divers films commerciaux sans grand intérêt (Tue-moi vite... j'ai froid [Fai in fretta ad uccidermi... ho freddo !], 1967 ; Un couple pas ordinaire [Ruba al prossimo tuo], 1968), il revient à la politique avec Lettera aperta a un giornale della sera (1970), amère satire des désarrois des intellectuels pendant la guerre du Viêt-nam, et le Soupçon (Il sospetto, 1975), étude du destin d'un militant communiste clandestin en mission dans l'Italie fasciste. Après une éclipse d'une dizaine d'années consacrée à des productions de télévision, il retrouve à partir de 1981 un important regain d'activité, tournant successivement Una storia d'amore (1986), Quaderni di città (1987), Codice privato (1988), le Secret (Il secreto, 1990) et L'alba (1991). Il a également réalisé en 1961 un des épisodes des Femmes accusent (Le Italiane e l'amore).