Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
C

CASCADES. (suite)

Il faut ensuite apporter un soin particulier à la préparation, et multiplier les répétitions, pour éviter autant que possible toute mauvaise surprise au moment du tournage. (Par exemple, pour la cascade consistant à courir sur les toits des wagons d'un train en marche, il faut délimiter une portion de voie dépourvue de tunnels, de ponts trop bas, de courbes brutales.)

Quelques cascades classiques sont plus facilement exécutées grâce à un certain nombre de trucs.

Escalades

(mur, façade, rocher) : on dissimule dans le décor des points d'appui qui aident l'évolution du cascadeur. On dispose, hors champ, des filets de protection.

Escrime :

les pointes des armes sont discrètement mouchetées, les tranchants meulés. On utilise aussi des armes en plastique, pratiquement inoffensives.

Bagarres :

les coups sont en fait ajustés à la limite du contact, et c'est le bruitage, réalisé ultérieurement en auditorium, qui crée l'illusion de leur violence. (Les gros plans sont tournés à l'envers.) Les différents accessoires qui frappent ou qui sont heurtés sont des copies réalisées en bois de balsa, plastique ou caoutchouc. ( ARTIFICES.)

Chutes :

un sportif entraîné peut effectuer sans dommage des sauts de quelques mètres. Pour des sauts plus longs, un découpage en plusieurs plans est nécessaire : bond, trajectoire, réception. Lorsque l'on filme le bond et la trajectoire, la réception se fait, hors champ, sur un amoncellement de tapis de mousse, ou bien (ce qui est plus efficace) sur un assemblage de cartons d'emballage, formant un immense cube qui s'effondre sous le poids du corps, offrant la molle résistance de l'air contenu dans les cartons.

Chutes de cheval :

c'est une cascade toujours dangereuse car elle se déroule à vitesse réelle : on ne peut en effet modifier sensiblement l'allure d'un cheval sans sombrer dans le ridicule. Le cascadeur est protégé par des rembourrages et le terrain doit être débarrassé de tout ce qui pourrait le blesser : pierres, racines, etc. Si le cavalier est désarçonné, ou bien il se laisse tomber, ou bien il est retenu (le cheval poursuivant sa course) par une corde aussi peu visible que possible fixée à son corps et arrimée dans le décor. Si le cheval doit tomber avec lui, le cascadeur tire, le moment venu, sur un lien fixé à la patte du cheval et lui fait rater le pas. Dans les deux cas, le cascadeur sait à quel instant précis il va tomber ; ainsi prend-il moins de risque que lors d'une chute inopinée.

Si le cavalier, après sa chute, doit rester accroché par un étrier et être tiré par sa monture, on lui fixe au corps un bouclier muni de petits patins qui facilitent la glissade.

Cascades de véhicules :

là encore, le terrain doit être préparé. Sur route, en campagne, il faut enlever les obstacles (en les remplaçant éventuellement par des obstacles factices), combler les fossés, etc. En ville, on ajoute à ces précautions une surveillance rigoureuse des lieux afin d'empêcher toute irruption imprévue de véhicule ou de piéton. La scène est longuement répétée et chronométrée, et des points de repère sont pris pour que le cascadeur puisse contrôler la précision de son allure.

Le véhicule de cascade doit subir quelques modifications : renforcement du pavillon par des tubes métalliques, soudage du siège au plancher, ceinture de sécurité de compétition, suppression des accessoires dangereux et si possible des vitres, vidange presque complète du carburant.

Plusieurs véhicules identiques peuvent être utilisés successivement pour une même scène. L'un sert au plan général, les autres à des plans plus rapprochés, au cours desquels la voiture est tractée dans les positions propres à l'accident, ou projetée artificiellement à l'aide d'un tremplin ou d'une grue. Les progrès de l'électronique permettent aussi maintenant de téléguider les véhicules ; toutefois, il s'agit encore de systèmes artisanaux et onéreux, aux possibilités de guidage limitées.

On modifie souvent la cadence de la prise de vues, soit pour accélérer l'action, soit pour faire durer un effet trop rapide pour être perceptible.

Cascades aériennes :

il ne s'agit en fait que d'acrobatie et de voltige. Les collisions ou les écrasements ne peuvent, bien entendu, qu'être suggérés. Après une chute vertigineuse, le pilote fait disparaître son appareil derrière un obstacle (maison, bosquet, colline...) où l'on déclenche une explosion. Éventuellement, un deuxième plan montre l'appareil, projeté par une catapulte, qui s'écrase au sol ; il s'agit alors d'une carcasse préparée et enflammée. On peut aussi se servir de maquettes téléguidées.

Quelques rares cascadeurs-pilotes sont capables d'effectuer des atterrissages forcés, train rentré ou à moitié sorti. On s'entoure alors des précautions en usage sur les aérodromes en pareille circonstance. Le coût et le risque de cette cascade la rendent peu fréquente.

Torches vivantes :

le cascadeur est habillé d'une combinaison d'amiante, dissimulée sous ses vêtements imbibés de gazole. L'utilisation d'une longue focale, écrasant les perspectives, donne l'impression qu'il traverse les flammes, alors qu'il circule en fait entre deux rideaux de flammes. Malgré toutes ces précautions, le temps de tournage de ces séquences doit être réduit au minimum. On utilise donc souvent une caméra à grande vitesse, de façon à allonger la durée apparente de la scène.

L'exécution de certaines cascades demeure toutefois trop périlleuse pour pouvoir être réalisée en direct. On utilise alors les différents procédés d'effets spéciaux, qui permettent de tourner en toute sécurité, en studio, les scènes qui mettraient en jeu la vie des acteurs.

CASCADEUR.

Personne spécialisée dans l'exécution des cascades.

CASERINI (Mario)

cinéaste italien (Rome 1874 - id. 1920).

Peintre et décorateur, Caserini entre à l'Alberini et Santoni (la future Cines) en 1904 ou 1905 ; il y exerce différentes activités, notamment celle d'acteur. En 1907, après le départ des techniciens français qui travaillaient dans les studios, il est promu au rang de directeur artistique. Ses premiers films appartiennent au genre historique ; il tourne successivement Otello, Garibaldi (1907), Marco Visconti, Pia dé Tolomei, Romeo e Giulietta (1908), Beatrice Cenci, La dama di Monserau (sic), Giovanna d'Arco, Macbeth, Guelfi e Ghibellini (1909). Caserini devient avec Guazzoni le spécialiste des grands films en costumes ; la Cines lui confie la direction des œuvres de prestige que sont Catilina et Messalina (1910). La même année, il réalise La battaglia di Legnano, Giovanna la Pazza, Lucrezia Borgia, Cola di Rienzo. En 1911, Caserini quitte la Cines pour l'Ambrosio de Turin, où il continue à mettre en scène des films historiques ; il tourne aussi une comédie qui obtient un grand succès, Mam'zelle Nitouche (Santarellina, 1911), avec Mario Bonnard et Gigetta Morano. En 1913, toujours pour l'Ambrosio, il réalise la troisième version des Derniers Jours de Pompéi (Gli ultimi giorni di Pompei), après celle, en 1908, de Maggi et celle, contemporaine, de Vidali pour La Pasquali Films avec Fernanda Negri, Pouget et Mario Bonnard. Pour la Gloria Film de Turin, il tourne en 1913 le film qui marque un tournant dans sa carrière, Ma l'amor mio non muore, avec Lyda Borelli et Mario Bonnard. Après le mauvais accueil réservé à Nerone e Agrippina (1913), Caserini se tourne résolument vers le drame contemporain. Il est un peu le créateur du genre et en définit les lois avec Ma l'amor mio non muore, drame passionnel qui révèle l'aptitude du cinéaste à conduire une histoire aux nombreux rebondissements mélodramatiques et à se servir des ressources nouvelles de la syntaxe cinématographique (un des plans dure plus de 4 minutes). Après être revenu chez Ambrosio puis avoir tenté le chemin de l'indépendance avec la Caserini Film (nombreux titres avec Leda Gys en 1915 et 1916, notamment L'amor tuo li redime et Fiore d'autunno), le cinéaste revient à la Cines à partir de 1916 et y demeure jusqu'à sa mort. Dans les dernières années, il se consacre essentiellement à des films d'ambiance contemporains comme La vita e la morte (1916), Sfinge (1918), Anima tormentata (1919), La voce del cuore (1920), La buona figliola (id.), La modella (id.), Fior d'amore (id.). Également à l'aise dans des genres divers, Caserini est un des meilleurs cinéastes du muet italien.