Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
N

NEWELL (Mike)

cinéaste britannique (Saint Albans 1942).

Carrière étrange et chaotique que celle de Mike Newell. Ancien homme de théâtre puis de télévision, il réalise son premier film au début des années 80, aux États-Unis, puis il fait un court séjour en Nouvelle-Zélande avant de se retrouver en Angleterre, où il signe Dance With a Stranger (id., 1985), excellent scénario de Shelagh Delaney sur la dernière femme qui ait été exécutée en Grande-Bretagne. Sobre, Newell sait créer une atmosphère et diriger deux acteurs exceptionnels : Rupert Everett et, surtout, Miranda Richardson. Newell connaît un autre succès critique, peut-être exagéré, pour le charmant Avril enchanté (Enchanted April, 1992) et un énorme succès commercial avec une comédie séduisante qui a plu autant au public qu'à la critique, Quatre Mariages et un enterrement (Four Weddings and a Burial, 1994). Cela lui vaut de tourner à Hollywood Donnie Brasco (id., 1996) où son talent discret pour la nuance s'évapore.

NEWMAN (Alfred)

musicien américain (New Haven, Conn., 1901 - Los Angeles, Ca., 1970).

Arrivé à Hollywood en 1930, d'abord directeur musical et arrangeur, Alfred Newman signe ses premières partitions en 1931 pour les Artistes associés, et se fait remarquer par l'une de ses compositions les plus populaires (Street Scene, K. Vidor). Il continue à travailler pour cette compagnie jusqu'en 1939, année où il la quitte sur les coups d'éclat de Gunga Din (G. Stevens), Beau Geste (W. Wellman) et les Hauts de Hurlevent (W. Wyler). Engagé à la 20th Century Fox, il se spécialise dans les films noirs (la Proie, R. Siodmak, 1947) et les épopées grandioses (Capitaine de Castille, H. King, 1947). Il sait avec brio s'adapter à des sujets plus nuancés (Eve, L. Mankiewicz, 1950 ; la Cible humaine, King, id.). Il conclut une filmographie prolixe avec Airport (G. Seaton, 1970), laissant le souvenir d'un musicien raffiné aux grandes qualités d'adaptation. Il remportera neuf fois l'Oscar : la Folle Parade (Alexander's Ragtime Band, King, 1938), Tin Pan Alley (W. Lang, 1940), le Chant de Bernadette (id., 1943), Maman était new-look (id., 1947), With a Song in My Heart (id., 1952), Appelez-moi Madame (id., 1953), la Colline de l'adieu (Love Is a Many Splendored Thing, King, 1955), le Roi et moi (W. Lang, 1956), Camelot (J. Logan, 1967).

NEWMAN (Joseph M.)

cinéaste américain (Logan, Utah, 1909).

Garçon de courses à la MGM devenu assistant réalisateur, puis directeur de courts métrages, il passe à la mise en scène de fiction au début des années 40. On lui confie des films de routine qu'il traite parfois avec une pointe d'originalité. Son savoir-faire est sensible dans le western : Duel dans la forêt (Red Skies of Montana / Smoke Jumpers, 1952), la Dernière Flèche (Pony Soldier, id.), Fort Massacre (id., 1958), le Shérif aux mains rouges (The Gunfight at Doodge City, 1959), Tonnerre Apache (A Thunder of Drums, 1961). On lui doit également une biographie de George Raft : Dompteur de femmes (The George Raft Story, id.). Mais les amateurs de science-fiction se souviennent essentiellement de lui comme le réalisateur d'une agréable variation sur le thème des mutants : les Survivants de l'infini (This Island Earth, 1955).

NEWMAN (Paul)

acteur et cinéaste américain (Shaker Heights, Ohio, 1925).

Un pur produit du creuset de l'émigration européenne : son père est d'origine allemande israélite, sa mère hongroise et catholique. Il est beau, sympathique, réfléchi et dynamique. Il ressemble à ces marbres, à ces bronzes antiques étranges et harmonieux, bouclé court, les yeux clairs, le nez droit et fin, les lèvres (relève un journaliste du Time en 1982) « cruellement ourlées ». Les yeux bleus de Newman – lac de montagne, changeants – sont célèbres. La première image qu'on a de lui, c'est celle-là, hélas affadie par le peu de talent de Victor Saville. Le Calice d'argent est le plat début d'une carrière qui fait monter au pinacle, au rang de « superstar », l'étudiant en sciences que la guerre envoie dans l'aéronavale, que la paix conduit, en 1951, à la Yale Drama School, en 1952, à l'Actors Studio. En 1953, il affronte la scène à Broadway, dans Picnic, de William Inge. Le jeune Newman appartient donc à une génération issue de l'enseignement de Lee Strasberg, tels Marlon Brando ou James Dean dont, en 1956, il hérite le rôle dans Marqué par la haine. Curieusement, la mort dramatique de Dean en finit avec la génération perdue des années d'après-guerre. À cet égard, l'apparition de Paul Newman, qui prépare celle d'un Robert Redford dix ans plus tard, rend à Hollywood une de ces figures positives dont il avait besoin, même, ou surtout, au niveau de la mythologie des solitudes (le Plus Sauvage d'entre tous, l'Outrage, l'Affrontement). L'interprétation de Billy the Kid par Newman en 1958 est une date dans l'histoire du western, et un jalon dans la reconquête de la psychologie de l'histoire (dût-elle aboutir à la ludique dérision de Dustin Hoffman dans Little Big Man, qui sera, comme le Gaucher, signé Arthur Penn, ou à l'humour nostalgique de Huston avec Juge et Hors-la-loi, où Newman alors fait face, en quelque sorte, à la légende, et l'épouse). Sa personnalité, son pouvoir de séduction, son intelligence des ambiguïtés, il les cultive, en bon adepte de Stanislawski, mais les intériorise. Il est à l'opposé d'un chien fou charmeur et noceur comme Errol Flynn, d'un compliqué comme Brando. On ne le surprend pas à cabotiner. Il peut, mieux même qu'un Cooper, porter naturellement le blue-collar de l'ouvrier manuel, du bûcheron, ou endosser la tenue de « travail » de l'arnaqueur, qu'il gagne ou qu'il perde. Son cynisme est sain, et, s'il manque souvent de baraka, il est plus rêveur ou bagarreur que névrosé.

Il ne se reconnaît pas acteur par intuition, mais par métier. Un métier difficile : comme draguer une rivière, dira-t-il. Il étudie ses rôles avec soin, il reconnaît les lieux de tournage, apprend ce qu'il faut apprendre pour posséder une compréhension du film, apprécier les raisons de ceux qui sont de l'autre côté de la caméra. Son apprentissage de cinéaste, on peut penser qu'il l'a mené de front avec son travail de comédien. Très vite, Newman devient l'acteur de prédilection de Martin Ritt, dont l'intimisme sociologique ne peut que retenir la sympathie d'un futur délégué démocrate du Connecticut (où, loin de Hollywood, il s'installera dans une grande ferme avec sa femme, l'actrice Joanne Woodward, épousée en 1958, et leurs enfants). Wise, Brooks, Huston, Rosenberg, Roy Hill, Altman le plient, le forgent selon vingt types différents dans une suite de films qui comptent, et ne l'enferment jamais dans un statut, chaque grand film étant une aventure. Et, à chacun, Newman fait don de cette touche irréductible, une marque venue d'ailleurs, qui dévie ou annule les stéréotypes, quelque chose, toujours, d'insoumis...