Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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CARRÉ (Ben)

décorateur américain d'origine française (Paris 1883 - Santa Monica, Ca., 1978).

Il débute aux studios Gaumont en 1906 et gagne en 1912 les États-Unis, où l'appellent les studios français Éclair. Il y décore des dizaines de films pour Albert Capellani, Émile Chautard et surtout Maurice Tourneur, dont il est le collaborateur fidèle de 1914 à 1919 pour plus de trente films. Il travaille ensuite à des longs métrages comme le Fantôme de l'Opéra (R. Julian, 1925), Mare Nostrum (R. Ingram, 1926), Don Juan (A. Crosland, id.), le Chanteur de Jazz (id., 1927) ou le Masque de fer (A. Dwan, 1928). De 1937 à 1965, il renonce à la conception des décors, mais demeure actif comme peintre de découvertes.

CARRÉ (Jean-Michel)

cinéaste français (Paris 1948).

Après des études de médecine puis à l'IDHEC, où il obtient un diplôme de réalisation et de prise de vues, il commence sa carrière de metteur en scène au lendemain des événements de Mai 68, dans l'esprit du cinéma d'intervention sociale qui se développe à cette époque. La quarantaine de documentaires qu'il signe ensuite s'inscrit dans ce mouvement, dénonçant la façon dont la société génère et entretient l'exclusion. Refusant la notion de « reportage », il revendique au contraire sa propre implication idéologique en tant que cinéaste dans le traitement de ses sujets. Parmi les différents thèmes qu'il aborde, la prostitution et sa contrepartie, la toxicomanie, constituent le cœur de plusieurs de ses travaux, dont les Trottoirs de Paris (1994), l'Enfer d'une mère (1994), Le Client et la prostituée (1996), Bénédicte, la vie retrouvée (1996), Prostituées et cœurs de mères (1996)... Il se penche aussi sur l'univers des prisons pour femmes, avec Femmes de Fleury (1991), les Matonnes (1994) et Galères de femmes (1993). L'enfance retient aussi son attention avec, en particulier, un long-métrage remarqué sur les problèmes de l'éducation, Alertez les bébés ! (1979), mais aussi Votre enfant m'intéresse (1981), les Poussins de la Goutte-d'Or (1993), Histoire d'enfance (1998) ou encore Travail, famille, etc. Récits de la jeunesse (1997), un film en deux volets sur le travail et la famille. En 1995, il réalise Visiblement, je vous aime, à propos d'un centre hébergeant de jeunes autistes, psychotiques ou délinquants. Il aborde également des problèmes d'envergure internationale, réalisant Écrire contre l'oubli (1991) pour le 30e anniversaire d'Amnesty International, puis Hong Kong-Hanoi : retour de camps (1997) sur la détention de Vietnamiens à Honk Kong, et les Enfants de la paix (1998) sur la vie d'enfants au Viêt Nam. Sa forte implication politique à gauche se confirme en 1998 avec la réalisation de Charbons ardents, l'histoire d'une houillère fermée par le gouvernement anglais et rachetée par les mineurs.

CARRÉ (Michel)

scénariste et cinéaste français (Paris 1865 - id. 1945).

Fils du célèbre librettiste Michel Carré. Pionnier de la société le Film d'Art, il adapte à l'écran, après avoir écrit des scénarios, une pantomime qu'il avait composée pour la scène, l'Enfant prodigue, dont le succès en 1907 est tel qu'il autorise une autre version en 1916, l'une et l'autre avec le mime réputé Georges Wague. Il adapte et tourne Athalie (1910), puis, en Autriche, le Miracle (1913), qui s'inspire de la mise en scène de Max Reinhardt établie pour le drame de Gehrart Hauptmann. L'année précédente, il avait remporté un succès populaire avec Fleur de pavé, interprété par Mistinguett et le comique Prince, plus connu sous le surnom de Rigadin. Il cesse toute activité cinématographique au moment de la guerre.

CARREL (Suzanne Chazelles du Chaxel, dite Dany)

actrice française (Tourane, Annam, 1935).

Elle débute, après des études d'art dramatique, sur les écrans dans Maternité clandestine de Jean Gourguet (1953). Dany Carrel représente l'actrice type des années 50 et du début des années 60 : à la fois ingénue et garce, mais toujours « le cœur sur la main ». Son personnage de fille un peu perdue sert d'alibi à l'introduction d'un timide érotisme : la Cage aux souris (Jean Gourguet, 1954), la Môme Pigalle (Alfred Rode, 1955), Ce corps tant désiré (L. Saslawski, 1959), dans une production assez austère. Dany Carrel n'est jamais devenue une star malgré quelques apparitions dans des œuvres de prestige : les Grandes Manœuvres (R. Clair, 1955), Porte des Lilas (id., 1957), Pot-Bouille (J. Duvivier, id.), la Prisonnière (H. -G. Clouzot, 1968). Elle se consacre, depuis le milieu des années 70, au théâtre plus qu'au cinéma.

CARREY (James Eugene Carrey, dit Jim)

acteur américain d'origine canadienne (Toronto 1962).

Après dix ans de carrière obscure, Jim Carrey devient du jour au lendemain une star de première grandeur, adulée du public, en 1994. Trois films l'imposent cette année-là : Ace Ventura, détective pour chien et chat (Ace Ventura, Pet Detective, Tom Shadyac, dont il est coscénariste), Dumb & Dumber (id., Peter et Bobby Farelly) et The Mask (id., Charles D. Russell). Depuis Jerry Lewis on avait perdu l'habitude d'un jeu comique si frénétiquement grimaçant : la mobilité de son visage est telle que l'on ne s'étonnera guère qu'Ace Ventura et le Masque soient devenus très vite des séries télévisées animées pour enfants. Par ailleurs, Carrey se caractérise également par un comique volontiers provocant, scatologique, souvent franchement vulgaire, bien qu'efficace. Les frères Farelly le pousseront très loin et avec succès dans cette voie, d'abord avec Menteur, menteur (Liar, Liar, 1997), puis avec Fous d'Irène (Me, myself and Irene, 2000). Mais Carrey est aussi un acteur intelligent qui veut prouver l'ampleur de son registre et y réussit : The Truman Show (P. Weir, 1998) et Man on the Moon (M. Forman, 2000) révèlent mieux qu'un acteur dramatique, un acteur énigmatique, qui sait préserver le mystère et l'opacité d'un personnage.

CARRIÈRE (Jean-Claude)

scénariste, cinéaste et acteur français (Colombières-sur-Orbes 1931).

Il rencontre en 1957 Pierre Étaix et s'associe à lui pour réaliser deux courts métrages comiques : Rupture (1961) et Heureux Anniversaire (1962). Il collabore ensuite à de nombreux films dont le dénominateur commun semble être un humour particulièrement corrosif, associé à un goût pour les situations étranges et à une grande fermeté dans la construction d'intrigues complexes. Son apport est essentiel aux derniers films de Luis Buñuel, du Journal d'une femme de chambre (1964) à Cet obscur objet du désir (1977) ; mais il travaille aussi avec Pierre Étaix (Yoyo, 1965 ; le Grand Amour, 1969), Louis Malle (Viva Maria, 1965 ; le Voleur, 1967 ; Milou en mai, 1990), Jacques Deray (la Piscine, 1969 ; Un papillon sur l'épaule, 1978), Miloš Forman (Taking Off, 1971), Alain Corneau (France S. A., 1974), Peter Fleischmann (Dorothea, 1973 ; la Faille, 1975), Marco Ferreri (Liza, 1972), Juan Buñuel (la Femme aux bottes rouges, 1974 ; Leonor, 1975), Jean-Luc Godard (Sauve qui peut [la vie], 1980), Andrzej Wajda (Danton, 1982), Volker Schlöndorff (Un amour de Swann, 1983), L. Tovoli (le Général de l'armée morte, id.), N. Oshima (Max mon amour, 1986), Miloš Forman (Valmont, 1989), Peter Brook (le Mahabharata, id.), Jean-Paul Rappeneau (Cyrano de Bergerac, 1990), Hector Babenco (At Play in the Fields of the Lord, 1990). Il travaille également beaucoup pour la télévision. Outre de petits rôles épisodiques, il interprète le rôle principal dans l'Alliance (C. de Chalonge, 1971, qui adapte un de ses romans). Il a aussi réalisé un court métrage, la Pince à ongles (1968), et connu de remarquables succès à la scène avec l'Aide-Mémoire (1968) ou l'adaptation française de Harold et Maude. Il a été président de la FEMIS de la création en 1986 jusqu'en 1996.