Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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BARSACQ (André)

décorateur, metteur en scène de théâtre et cinéaste français d'origine russe (Feodosiya [anc. Theodosia, ou Kaffa], Russie, 1909 - Paris 1973).

Formé à l'école de Dullin et de Copeau, cofondateur du théâtre des Quatre-Saisons, directeur de l'Atelier à partir de 1940, où il montera notamment Anouilh, Marcel Aymé, Félicien Marceau et de nombreuses pièces du répertoire, il a fait quelques incursions — remarquées — dans le cinéma : assistant de Jean Grémillon, il crée avec Lazare Meerson les décors de l'Argent (M. L'Herbier, 1929), du Martyre de l'obèse (P. Chenal, 1933), de Yoshiwara (Max Ophuls, 1937), de l'Honorable Catherine (L'Herbier, 1943). On lui doit en outre la réalisation, en 1952, d'un unique film : le Rideau rouge.

BARSACQ (Léon)

décorateur français (Feodosiya [anc. Theodosia, ou Kaffa] 1906 - Paris 1969).

Après l'École des arts décoratifs à Paris, il obtient un diplôme d'architecte et devient, de 1931 à 1938, assistant d'André Andrejew, Jean Perrier, Robert Gys et, entre autres, André Barsacq son frère. Il signe en collaboration les beaux décors de la Marseillaise (J. Renoir, 1938) et assiste encore Trauner, réduit à la clandestinité, pour les maquettes de Lumière d'été (J. Grémillon, 1943) et des Enfants du paradis (M. Carné, 1945). Dès les Mystères de Paris (J. de Baroncelli, 1943) s'affirment les traits qui caractériseront son œuvre : la maîtrise dans la fusion des éléments empruntés au réel avec la fantaisie propre du décorateur, la finesse avec laquelle les décors établissent une atmosphère, un goût particulier enfin pour les difficultés de la reconstitution d'époque. Ces traits trouvent leur expression idéale dans une longue collaboration avec René Clair dont il décore tous les films (sauf le sketch de la Française et l'Amour), depuis Le silence est d'or (1947) jusqu'aux Deux Pigeons (1962). Autres films : Boule-de-Suif (Christian-Jaque, 1945), l'Idiot (Georges Lampin, 1946), les Dernières Vacances (R. Leenhardt, 1948), Pattes blanches (J. Grémillon, 1949), le Château de verre (R. Clément, 1950), Violettes impériales (R. Pottier, 1952), Bel Ami (L. Daquin, 1955), les Diaboliques (H.-G. Clouzot, id.), les Aventures de Till l'Espiègle (G. Philipe, 1956), Pot-Bouille (J. Duvivier, 1957), Phèdre (P. Jourdan, 1968). Son livre le Décor de film a été publié en 1970.

BARSKAÏA (Margarita Aleksandrovna Tchardinina-Barskaïa, dite Margarita) [Margarita Barskaja]

cinéaste soviétique (Bakou, Azerbaïdjan, 1901 - Moscou 1937).

Elle débute comme actrice en 1925, tient des rôles de second plan dans des films géorgiens et ukrainiens. Elle est l'héroïne du premier film de Dovjenko : le Petit Fruit de l'amour (1926). Le cinéma devenu parlant, elle se spécialise, comme scénariste et puis cinéaste, dans le film pour enfants. On lui doit un insolite chef-d'œuvre, les Souliers percés (Rvanye bašmaki, 1933), qui recrée remarquablement l'atmosphère des quartiers populaires de Hambourg au moment où le nazisme, pénétrant dans les écoles, divise et fait s'affronter les enfants eux-mêmes. Barskaïa acclimate dans le cinéma sonore le grand style soviétique du montage. Ce film, comme le reste de son œuvre qui semble perdu, est tombé dans un regrettable oubli.

BARTA (Jiři)

cinéaste tchèque (Prague 1948).

Considéré comme l'un des principaux héritiers de la tradition de la marionnette animée introduite par Jiři Trnka, Barta, après un diplôme obtenu aux Arts et Métiers de Prague (1975), a collaboré dès 1978 au studio de courts métrages de Prague (Kratky Film Praha), fondé par le maître. Outre quelques courts métrages qui expérimentent et mêlent éléments découpés, objets, marionnettes et vues réelles, traitant de façon parabolique de la civilisation humaine (Projet, 1981 ; le Monde disparu des gants, 1982 ; la Ballade du bois vert, 1983), on lui doit un premier long métrage, Krysar (le Joueur de flûte, 1985), qui l'a fait remarquer internationalement à partir de 1988. Adapté du Joueur de flûte d'Hamelin, le film déploie une esthétique qui emprunte à la fois à l'imagerie du Moyen Âge, à l'expressionnisme allemand et au cubisme. Quatorze marionnettes de bois, taillées à la serpe, évoluent dans des décors tortueux et inquiétants, proposant une vision du monde plus moraliste que celle de Trnka.

BARTAS (Sharunas)

cinéaste lituanien (Siauliai 1964)

Après avoir étudié au VGIK de Moscou, il tourne deux documentaires (Tofalaria, 1985 ; À la mémoire d'un jour passé [Praejusios dienos atminimui], 1990) et impose une manière de filmer toute nouvelle et particulièrement originale dès son premier long métrage : Trois Jours (Trys dienos, 1991). Partisan d'une écriture minimaliste où l'observation, le silence, la lenteur des actions comme photographiées au maximum de leur tension significative remplacent le plus souvent les variations narratives, Bartas donne « à voir » et n'explique que l'essentiel. Contemplatif, quasi abstrait parfois, il distrille à petites touches un univers très personnel qui est là plus pour tarauder l'esprit que pour satisfaire sa curiosité. Le Corridor (Koridorius, 1995), Few of us (1996), The House (1997) et Freedom (2000) accentuent chaque fois plus cette tendance à cerner l'indicible.

BARTHELMESS (Richard Semler Barthelmess, dit Richard)

acteur américain (New York, N. Y., 1895 - Southampton, N. Y., 1963).

Fils d'une célèbre actrice qui l'oriente vers le théâtre, Richard Barthelmess s'est fait vite remarquer par Alla Nazimova, dont il devient le partenaire cinématographique : War Brides (H. Brenon, 1916). Sa carrière n'a pas tardé à prendre de l'ampleur, dès que D. W. Griffith lui confie le rôle du doux missionnaire chinois du Lys brisé (1919). Toutes les caractéristiques de Barthelmess sont déjà en évidence : douceur et retenue du jeu, intensité du regard, grâce de la gestuelle. Son succès est foudroyant et il devient l'un des acteurs les plus populaires du muet. Après une autre prestation pour Griffith, dans À travers l'orage (1920), où il est subordonné à Lillian Gish, il devient son propre producteur et met sur pied l'adaptation d'un roman de Joseph Hergesheimer, Tol'able David (1921), que dirige Henry King. Son interprétation de l'adolescent David, confronté à la Nature et aux forces du Mal, est un triomphe absolu. Il se spécialisera avec beaucoup de bonheur dans des drames ruraux où son naturel et sa spontanéité s'expriment pleinement. Barthelmess est différent des autres acteurs du muet par son jeu discret et d'une intensité intérieure peu commune (Soul Fire, J.S. Robertson, 1925 ; Ramsom's Folly, S. Olcott, 1926 ; The Patent Leather Kid, A. Santell, 1927 ; The Drop Kick, M. Webb, id. ; The Noose, J.F. Dillon, 1928). Ces qualités lui assureront un victorieux passage au parlant, dont il sera aussi une des vedettes les plus populaires jusqu'en 1933. Il devient l'interprète d'élection des mélodrames sociaux de la Warner Bros : comptable honnête, dans le Sud des spéculations cotonnières (Ombres vers le Sud, M. Curtiz, 1932), médecin à la carrière difficile, qui se sacrifie pour son frère (Alias the Doctor, M. Curtiz et L. Bacon, 1932), héros obscur détruit par la société du premier après-guerre (Héros à vendre, A. Wellman, 1933). Mais son interprétation la plus belle reste celle de l'ancien pilote désenchanté de The Last Flight (W. Dieterle, 1931), admirable peinture sur le vif de la génération perdue. Malheureusement, sa popularité décroît à mesure que son physique se marque, et il ne tourne bientôt plus que des productions de second rayon. Mais Howard Hawks, qui l'avait dirigé dans un de ses plus grands succès, la Patrouille de l'aube (1930), exige sa présence dans le rôle du pilote tourmenté par sa lâcheté passée dans Seuls les anges ont des ailes (1939). C'est un personnage secondaire ; Barthelmess a vieilli. Mais la magie est intacte : il provoque un mélange de mépris et de compassion qui est le signe du très grand acteur qu'il est toujours. D'autres emplois de complément suivront. Pourtant Barthelmess se retire définitivement en 1942.