Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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DELON (Francine Canovas, dite Nathalie)

actrice et cinéaste française (Oujda, Maroc, 1938).

C'est avec le Samouraï (J.-P. Melville, 1967) qu'elle fait ses débuts de comédienne. Elle ne cesse ensuite de tourner en France et à l'étranger : les Sœurs (Maleno Malenotti, 1969) ; Une Anglaise romantique (J. Losey, 1975). Elle signe sa première mise en scène avec Ils appellent ça un accident (1982).

DELORME (Danièle Girard, dite Danièle)

actrice française (Levallois-Perret 1926).

Fille du peintre André Girard, elle rêve d'une carrière de concertiste et entreprend des études de piano que la guerre et l'occupation allemande interrompent. Réfugiée à Cannes, elle suit sous la direction de Jean Wall des cours d'art dramatique et débute sur les planches dans la compagnie Claude Dauphin et au cinéma dans quelques films du « sourcier » Marc Allégret : Félicie Nanteuil (1945 ; 1942), la Belle Aventure (id. ; id.), les Petites du quai aux Fleurs (1944), Lunegarde (1946 ; 1944). Après la Libération, elle perfectionne son talent de comédienne avec René Simon et Tania Balachova, apparaît à l'écran dans Les jeux sont faits (J. Delannoy, 1947) et Impasse des Deux Anges (M. Tourneur, 1948) et sur scène dans des pièces de J. B. Priestley et Jacques Deval. L'interprétation qu'elle donne de la Gigi de Colette (J. Audry, 1949) lui apporte une soudaine renommée. Elle tourne alors de très nombreux films : la Cage aux filles (M. Cloche, 1949), Sans laisser d'adresse (J.-P. Le Chanois, 1951), la Jeune Folle (Y. Allégret, 1952), le Guérisseur (Y. Ciampi, 1954), Huis clos (J. Audry, id.), le Dossier noir (A. Cayatte, 1955). Cette grâce limpide, cette sorte de pudeur inquiète, cette passion contenue et frémissante qui la caractérisent conduisent les cinéastes à lui tailler des rôles sur mesure. Qu'elle se nomme Miquette (Miquette et sa mère, H.-G. Clouzot, 1950), Agnès (Agnès de rien, P. Billon, id.), Minne (Minne l'ingénue libertine, J. Audry, id.), Mitsou (dans le film homonyme de J. Audry, 1956) ou Fantine (les Misérables, J.-P. Le Chanois, 1958), elle n'échappe pas au stéréotype de l'héroïne fragile marquée par le destin. Afin d'éviter d'être trop soumise aux personnages que lui propose le cinéma (où sa sensibilité risque de se transformer en sensiblerie), elle se tourne vers le théâtre, où on lui offre des rôles plus diversifiés dans des pièces d'Huxley, Anouilh, Ibsen, Salacrou, Shaw, Claudel ou Pirandello. Sans doute Duvivier lui permet-il un contre-emploi dans Voici le temps des assassins (1956), où elle sait se montrer machiavélique, mais on sent bien, après Prison de femmes (M. Cloche, 1958), que la comédienne Danièle Delorme a décidé de prendre ses distances avec le cinéma. Mariée en 1945 avec Daniel Gélin — elle a tourné en 1952 sous sa direction les Dents longues —, elle divorce et se remarie avec Yves Robert en 1956. Avec ce dernier, elle fonde en 1961 une maison de production (La Guéville) qui obtient d'emblée un large succès populaire avec la Guerre des boutons (Y. Robert, 1962) et s'attache ensuite à donner vie à des films originaux et à financer quelques entreprises risquées et courageuses (la Drôlesse de Jacques Doillon en 1979). Partagée alors entre le théâtre, la télévision et son métier absorbant de productrice, elle ne réapparaît qu'épisodiquement à l'écran dans Marie-Soleil (Antoine Bourseiller, 1964), film qu'elle a produit, le Voyou (Cl. Lelouch, 1970), Absences répétées (G. Gilles, 1972), Belle (A. Delvaux, 1973), Un éléphant ça trompe énormément (Y. Robert, 1976), Nous irons tous au paradis (id., 1977), la Naissance du jour (J. Demy, 1980, TV), où elle personnifie la romancière Colette, la Cote d'amour (Charlotte Dubreuilh, 1982). En 1982, elle fonde la collection Témoins (vidéocassettes sur les personnalités artistiques contemporaines). Elle préside la commission d'avance sur recettes de 1980 à 1981.

DEL POGGIO (Maria Luisa Attanasio, dite Carla)

actrice italienne (Naples 1925).

Pendant ses études au Centro sperimentale di Roma, Vittorio De Sica la découvre et lui donne le rôle de la jeune protagoniste de Maddalena zero in condotta (1940). Son visage délicat et son caractère d'ingénue apparaissent dans quelques comédies roses, mais elle n'est mise en valeur que par Alberto Lattuada dans son violent Bandit (1946). Après leur mariage, ils travaillent ensemble sur trois films (Sans pitié, 1948 ; le Moulin du Pô, 1949 ; les Feux du music-hall, 1950), où elle crée des personnages toujours plus affirmés. Elle travaille encore pour Giuseppe De Santis (Onze heures sonnaient, 1952) ; Georg Wilhelm Pabst (Cose da pazzi, 1953) ; Henri Calef (le Secret d'Hélène Marimon, 1954) ; Hugo Fregonese (I girovaghi, 1956). Depuis 1957, elle n'a travaillé quelques années que pour le théâtre de variétés et pour la télévision.

DELPY (Julie)

actrice française (Paris 1969).

Fille d'un couple d'acteurs — Albert Delpy et Marie Pillet —, elle débute au cinéma à l'âge de sept ans dans un épisode de Guerres civiles en France (Joël Farges, 1978). Après des expériences avec Jean-Luc Godard (Détective, 1985) et Leos Carax (Mauvais Sang, 1986), c'est auprès de Bertrand Tavernier qu'elle obtient son premier grand rôle dans la Passion Béatrice (1987). Elle est dirigée ensuite par Jean-Pierre Limosin dans l'Autre Nuit (1988), et par des cinéastes de renom comme Carlos Saura (la Nuit obscure, 1989), Agnieszka Holland (Europa, Europa, 1991), Volker Schlöndorff (The Voyager, id.), Krzysztof Kieslowski (Trois Couleurs : Blanc, 1993). Elle s'engage alors dans des films américano-européens : Younger and Younger (P. Adlon, 1993), Killing Zoe (Roger Avary, 1994), Before Sunrise (Richard Linklater, 1995), Tykho Moon (Enki Bilal, 1997).

DEL RUTH (Roy)

cinéaste américain (Philadelphie, Penn., 1893 - Sherman Oaks, Ca., 1961).

D'abord dessinateur et scénariste pour Mack Sennett dès 1915, Roy Del Ruth est venu à la mise en scène en 1917, en dirigeant des courts métrages burlesques (Billy Bevan, Ben Turpin, Harry Langdon). Après trois décennies bien actives, il s'est orienté, dans les années 50, vers la télévision. Un cinéaste mineur, sûrement. Mais quel rythme, quel charme, quelle insouciance dans ses films réussis ! On serait en reste si on désirait y trouver un regard personnel, mais on serait bien injuste de ne pas y admirer l'adresse de l'exécution. On connaît mal sa carrière au muet. Dès 1930, cependant, il est facile de cerner ce qu'il fait le mieux. Ses grands films sont des musicals, des comédies ou des drames, qu'il fait basculer dans la comédie : dialogues crépitants et montage ultrarapide. C'est sans doute pour cela que son adaptation du Faucon maltais (The Maltese Falcon, 1931) de Dashiell Hammett, qui utilise abondamment le dialogue original, est un digne précurseur de la version John Huston. Le cynisme, l'ironie et la sécheresse convenaient bien à cet homme pressé. C'est pourquoi sa grande période fut à la Warner Bros, avec laquelle ses qualités étaient en accord. Les véhicules qu'il imagina pour James Cagney (Blonde Crazy, 1931 ; Taxi !, 1932 ; le Tombeur [Lady Killer], 1933), pour Edward G. Robinson (The Little Giant, 1933) ou pour Bebe Daniels (My Past, 1931) dégagent une ivresse encore intacte. Son meilleur film est une comédie mordante où brillait le méconnu Lee Tracy en chroniqueur radio à la dent acerbe : Blessed Event (1932). Dans le domaine musical, sa plus grande réussite est Folies-Bergère (1935), dans ses versions américaine et française, très enlevé par un Maurice Chevalier débordant d'énergie. Le style plus amidonné de la MGM le brima : l'essoufflement est sensible dans Broadway Melody of 1936 (1935) et dans L'amiral mène la danse (Born to Dance, 1936). De la fin de sa carrière, on retiendra trois musicals : La Du Barry était une dame (Du Barry Was a Lady, 1943), les Cadets de West Point (The West Point Story, 1950) et le Bal du printemps (On Moonlight Bay, 1951).