Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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LECLERC (Geneviève Menut, dite Ginette)

actrice française (Paris 1912 - id. 1992).

Son physique provocant, ses formes pulpeuses, sa voix canaille la destinaient tout naturellement aux rôles de vamp, dans la lignée de Colette Darfeuil et de Viviane Romance, avec en prime une pointe de perversité que l'on ne se priva pas d'exploiter. Elle est apparue dans une centaine de films, jouant avec une morne constance « les méchantes, les agressives, les sans-vertu, les putains fort peu respectueuses », ainsi qu'elle en convient elle-même avec un peu de regret ; et elle ajoute : « Mais j'ai toujours tenu cet emploi-là avec le plus de rigueur possible, spontanément, sans me prendre au sérieux. » Parmi ses films d'avant-guerre, on retiendra principalement une apparition dans Ciboulette (C. Autant-Lara, 1933), puis l'Homme de nulle part (P. Chenal, 1937), Prison sans barreaux (L. Moguy, 1938), Louise (A. Gance, 1939), Menaces (E. T. Gréville, 1940) et un essai de film en relief, l'Ami de Monsieur (Pierre de Cuvier, 1936). Mais c'est surtout à Marcel Pagnol qu'elle doit son premier vrai rôle, celui de la volage Femme du boulanger (1938) qui rentre au bercail le repentir au cœur. Elle forme, avec Raimu, un couple insolite et émouvant. Sous l'Occupation, après avoir remporté un franc succès en fille des Flandres, dans l'Empreinte du Dieu (L. Moguy, 1941), c'est un autre personnage superbe, celui de la boiteuse du Corbeau (H. -G. Clouzot, 1943), d'une poignante sensualité. Puis à nouveau la routine, avec Une belle garce (Jacques Daroy, 1948), Un homme marche dans la ville (M. Pagliero, 1950), la Maison dans la dune (G. Lampin, 1952), etc., jusqu'à la merveilleuse « Flora, dite Balançoire » du Plaisir de Max Ophuls (id.), une composition brève mais de grand style. Derniers feux : Goto, l'île d'amour (1969) de Walerian Borowczyk (son premier « nu intégral » !), Tropique du Cancer (Joseph Strick, 1970), les Volets clos (J.-C. Brialy, 1973), la Barricade du point du jour (René Richon, 1978). Au théâtre, on l'a vue, rappelons-le — sous des dehors plus nuancés — dans Huis clos, Noces de sang, la Chatte sur un toit brûlant et, bien entendu, la Putain respectueuse, où son interprétation, dit-on, satisfit pleinement Jean-Paul Sartre.

LECONTE (Patrice)

scénariste et cinéaste français (Paris 1947).

Ancien élève de l'IDHEC et auteur de nombreux courts métrages, c'est par la bande dessinée qu'il se fait connaître tout d'abord, et c'est avec le scénario d'un de ses complices de la B.D., Marcel Gotlib, qu'il débute dans le long métrage : les Vécés étaient fermés de l'intérieur (1975). Il est des introducteurs du comique de café-théâtre dans le cinéma français avec les Bronzés (1978) et le terriblement efficace les Bronzés font du ski (1979), qui font connaître au grand public les Jugnot, Balasko, Blanc, Lhermitte et Clavier. Coscénariste de tous ses films, il tâtera de différents genres, s'essayant à l'aventure grand public et au grand spectacle avec les Spécialistes (1985), plus tard à la comédie quelque peu cabotine, les Grands Ducs, dont les héros sont précisément des cabotins (1996). Tandem (1987) est un film d'auteur à la fois drolatique et désabusé dont l'esprit se prolonge dans d'autres œuvres originales et personnelles : le Mari de la coiffeuse (1990) avec Jean Rochefort, déjà magnifiquement présent dans Tandem, Tango (1993) et le Parfum d'Yvonne (1994). Monsieur Hire (1989), nouvelle et fascinante adaptation d'un roman de Simenon (après le Panique de Julien Duvivier), confirme son goût pour l'insolite, mais dans une perspective plus noire. En 1996 il remporte un étonnant succès avec un film qu'on dit « à costumes », Ridicule, qui est à la fois critique sociale, et exercice de style sur les vertus et vertiges du langage. Il prolonge ce parcours parfois déconcertant en réunissant Delon et Belmondo dans Une chance sur deux (1998), auquel succède un étrange film en noir et blanc, la Fille sur le pont (2000). Avec Félix et Lola (2001), il renoue avec certaines racines du cinéma français, qu'il situe du côté de Duvivier et Carné.

LECTEUR.

Partie d'un appareil de projection où s'effectue la lecture de la piste sonore.

LEDERER (Charles)

scénariste et réalisateur américain (New York, N. Y., 1910 - Los Angeles, Ca., 1976).

Neveu de Marion Davies, il devient d'abord journaliste pour W. R. Hearst. Mais il prouve vite ses possibilités en travaillant comme scénariste avec Ben Hecht (Front Page, L. Milestone, 1931). Homme d'esprit et dialoguiste acéré, il fut un précieux collaborateur pour Hawks (la Dame du vendredi, 1940, aux reparties vertigineuses ; Allez coucher ailleurs, 1949 ; Les hommes préfèrent les blondes, 1953). Son travail sur le Carrefour de la mort (H. Hathaway, 1947) ou Et tournent les chevaux de bois (R. Montgomery, id.), avec Ben Hecht, brillait par sa concision et sa sécheresse. Il est en 1953 le producteur et le coauteur (avec Luther Davis) du musical à succès Kismet, qu'il adapte pour l'écran en 1955 et que réalise Minnelli. Ses tentatives de réalisateur furent cependant moins probantes (Never Steal Anything Small, 1959).

LEDOUX (Fernand)

acteur français d'origine belge (Tirlemont 1897 - Paris 1993).

Il a mené la plus grande partie de son activité théâtrale à la Comédie-Française, mais il avait débuté au cinéma en 1919 dans un film de son compatriote Jacques Feyder, la Faute d'orthographe. Puis Ledoux se contente de silhouettes fugitives avant de s'imposer dans la Bête humaine (J. Renoir, 1938). Il compose minutieusement des personnages massifs, taciturnes, parfois sournois, souvent violents et d'un réalisme exact (Volpone, M. Tourneur, 1941 ; Remorques, J. Grémillon, id.,  : 1939 ; Premier rendez-vous, H. Decoin, id. ; le Lit à colonnes, Roland Tual, 1942 ; les Visiteurs du soir, M. Carné, id.). D'une grande saveur, sa composition du braconnier de Goupi Mains rouges (J. Becker, 1943) le fait accéder aux premiers rôles de l'Homme de Londres (Decoin, id.), Sortilèges (Christian-Jaque, 1945), la Fille aux yeux gris (Jean Faurez, id.) ou Pattes blanches (Grémillon, 1949). Son activité diminue peu à peu à partir des années 50 malgré des interventions intéressantes dans Celui qui doit mourir (J. Dassin, 1956), les Misérables (J.-P. Le Chanois, 1958), le Procès (O. Welles, 1962).