Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
L

LESAFFRE (Roland)

acteur français (Clermont-Ferrand 1927).

Une jeunesse aventureuse le promettait à un destin de baroudeur, dont le tira Marcel Carné pour en faire sa mascotte à partir de la Marie du port (1950). Il est donc successivement, sous sa direction, légionnaire, mataf, boxeur (l'Air de Paris, 1954), mécano, taulier, pour finir en sacristain dans la Merveilleuse Visite (1974). On préférera ses brèves prestations dans Casque d'or de Jacques Becker en 1952 (le garçon de café indicateur), l'Amour d'une femme (J. Grémillon, 1953), Thérèse Raquin (Carné, id.) et la Main au collet (A. Hitchcock, 1955), et, surtout, le comparse voyeur des Menteurs (1961) et de l'Accident (1963), de Gréville.

LE SOMPTIER (René)

cinéaste français (Caen 1884 - Paris 1950).

Journaliste et poète, il appartient de 1910 à 1918 à la maison Gaumont (Un drame de l'air, 1913 ; la Poudre X, id. ; le Raid aérien, 1914), de 1918 à 1920 à la maison Pathé (la Sultane de l'amour, 1919, CO : Charles Burguet ; la Croisade, 1920) puis à la maison Aubert avec son film le plus ambitieux, la Montée vers l'Acropole (1920), et un drame attachant (la Bête traquée, 1921). Il bifurque ensuite vers le mélo, signe une adroite adaptation de Dumas (la Dame de Montsoreau, 1923), puis serials et films à épisodes avant d'abandonner le cinéma pour lequel il donne encore sa vision de l'Expo 37 : le Dernier Conte de Schéhérazade.

LESSER (Sol)

producteur américain (Spokane, Wash., 1890 - Los Angeles, Ca., 1980).

Il débute comme exploitant et fonde le circuit des Fox West Coast Theatres avant d'entrer dans la production avec des comédies de Jackie Coogan, puis des documentaires scientifiques. Passé au long métrage, il lance, en 1932, son propre Tarzan et tente de rivaliser avec la MGM en consacrant à ce personnage quinze films à petit budget, interprétés successivement par Glenn Morris, Johnny Weissmuller, Lex Barker et Gordon Scott, et principalement réalisés par William Thiele, Kurt Neumann, Robert Florey, Byron Haskin, Cy Endfield et Bruce Humberstone. On lui doit aussi Tonnerre sur le Mexique (1933, réalisé à partir du matériau filmé par Eisenstein pour ¡ Que viva Mexico !), de nombreux westerns et serials, dont Dick Tracy (Ray Taylor, Alan James, 1937), et, dans le domaine de la série A : Our Town (S. Wood, 1940), Illusions perdues (E. Lubitsch, 1941) et la Maison rouge (D. Daves, 1947).

LESTER (Richard)

cinéaste britannique d'origine américaine (Philadelphie, Pa., 1932).

Licencié en psychologie, musicien, grand voyageur, Richard Lester échoue en Angleterre et débute à la TV. Puis la publicité et le cinéma s'emparent de son talent. Contemporain des « jeunes gens en colère », son humour et son sens du loufoque prolongent trop une vieille tradition britannique du non-sens pour que son originalité apparaisse (la Souris dans la Lune [The Mouse on the Moon], 1963). Mais un court métrage, The Running, Jumping and Standing Still Film (1960) avec Peter Sellers, et It's a Trad Dad ! (1962) avaient déjà montré que Lester se rattachait aussi à la tradition nonsensique américaine. Ces deux tendances plus divergentes qu'il n'y paraît (la première désamorce, la seconde agresse), unies par un style « discontinu » que Lester avait mis au point dans la publicité, créèrent un mélange qui explosera en 1964 dans Quatre Garçons dans le vent (A Hard Day's Night) grâce au détonateur apporté par les Beatles. On a depuis beaucoup imité l'esthétique « à plat », le montage « déconstruit » et le loufoque irrespectueux de Lester. Mais, si Au secours ! (Help !, 1965) s'essoufflait un peu, Quatre Garçons dans le vent et le Knack et comment l'avoir (The Knack and How to Get It (1965) restent inimitables. Comme personne, Lester imposait la fraîcheur, la jeunesse, l'hilarité au secours d'un cinéma britannique empêtré dans les conventions.

Ses deux expériences suivantes tiennent de l'opération-kamikaze. Le Forum en folie (A Funny Thing Happened on the Way to the Forum, US, 1966) et Comment j'ai gagné la guerre (How I Won the War, 1967) poussaient la juvénilité des films précédents jusqu'à un certain anarchisme formel qui resta totalement incompris. Couronné de succès, puis traîné dans la boue, Lester devait reconquérir son équilibre. Ce fut un long travail qui commença avec Petulia (1968). Là, Lester élargissait son style et lui donnait un véritable poids esthétique en le confrontant à un sujet tragique : on a, encore une fois, mal compris la portée d'un film où Lester fixait à jamais le « boom » californien de la fin des années 60 tout en prophétisant sa mort. Ce film de mort et de maladie aux couleurs du soleil reste un des plus beaux que le cinéaste nous a donnés, le premier où l'on pouvait pleinement mesurer l'ampleur de son talent.

Après que l'Ultime Garçonnière (The Bed Sitting Room, 1969) l'eut ramené à l'humour inconfortable de ses films précédents, il fallut attendre 1974 et les Trois Mousquetaires (The Three Musketeers) pour que Lester entre définitivement dans sa période de plénitude et de maturité. En possession de ses moyens (trouvailles visuelles en cascade, un sens peu commun de l'espace, un tempo sans faille), il y affirmait une énergie nouvelle et décapante dont le film romanesque avait un besoin vital. On découvrait un cinéaste qui organisait la vie intérieure d'un plan, le dynamisme d'un décor, et un artiste dont la profonde mélancolie éclatait quand on s'y attendait le moins (les derniers instants de On l'appelait Milady [The Four Musketeers], 1975). Depuis, Lester bâtit une œuvre solide aux mille facettes qui renouvelle complètement le cinéma d'aventures. L'entrain va de pair avec l'intériorisation des personnages et de leurs motivations. L'ironie se joint à la tristesse. L'image s'anime et prend du relief. Lester est, lui, inépuisable, mais il épuise systématiquement tous les aspects du genre. La manière dont il s'attaque au film-catastrophe pour en faire un film sur l'attente d'une catastrophe qui ne viendra pas (Terreur sur le « Britannic » [Juggernaut], 1974) définit exactement sa force : il comble le public en lui donnant autre chose que ce pour quoi il est venu. L'ironie mordante du Froussard héroïque (Royal Flash, 1975) est aussi déconcertante que le classicisme crispé et funèbre de l'admirable la Rose et la Flèche (Robin and Marian, 1976). Depuis, poursuivant une carrière en feu d'artifice, Lester n'arrête pas d'éblouir et de combler l'amateur d'aventures en lui offrant un point de vue qui n'est jamais celui attendu. Après une expérience un peu « folle » (The Ritz, US, id.), les inventions visuelles innombrables des Joyeux Débuts de Butch Cassidy et le Kid (Butch and Sundance : the Early Years, 1979) contrebalancent une amère mise à nu de la jeunesse et de ses déboires. Superman II (1981) joue avec délices la carte de la BD, en tiraillant son héros entre une intrigue politique surprenante et une histoire d'amour complètement mythique. Quant au foisonnant et complexe Cuba (1980), il embrasse avec lucidité les nombreux aspects sociopolitiques de la révolution cubaine, en toile de fond à une histoire d'amour frémissante digne de la Rose et la Flèche. Dans Superman III (1983), il retrouve le ton mi-moqueur mi-sérieux de l'épisode précédent puis tourne un petit divertissement : Cash-cash (Finders Keepers, 1984), donne une suite essoufflée aux aventures des héros d'Alexandre Dumas : le Retour des mousquetaires (Return of the Musketeers, 1989) et tente de faire revivre le mythe des Beatles dans Get Back (1991, avec P. McCartney). ▲