Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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CARLSEN (Henning) (suite)

C'est un producteur suédois indépendant, Lorens Marmstedt, qui donne à Carlsen sa première vraie chance en lui confiant, à Stockholm, la direction des Chattes (Kattorna, 1965), où la psychologie féminine se trouve analysée d'une manière fine et sans pitié. La Faim (Sult, 1966) est le film le plus connu de Carlsen. Il a valu à son interprète, Per Oscarsson, le premier prix d'Interprétation au festival de Cannes, dans le rôle d'un écrivain hanté par l'écriture. Ne parvenant pas à publier ses textes, le personnage se trouve dans une situation misérable, en proie à des hallucinations (l'action se passe à la fin du XIXe siècle, à Christiania [aujourd'hui Oslo], la capitale norvégienne). Tiré du célèbre roman autobiographique homonyme de Knut Hamsun, la Faim était une coproduction norvégienne, danoise et suédoise. Rien de ce que Carlsen a réalisé depuis n'a tout à fait atteint le brio de la Faim, bien qu'il ait manifesté un certain talent pour la comédie dans Sophie de 6 à 9 ou Quand des gens se rencontrent, une douce musique leur emplit le cœur (Mennesker m'odes og s'od mus̈ı'̈k opstår i hjertet, 1967), et dans Comment faire partie de l'orchestre (Man sku' vaere noget ved musikken, 1972), chronique douce-amère — et parfois d'une ironie assez désespérée — sur les habitués d'un petit café populaire de Copenhague. La même touche humoristique caractérise Un divorce heureux (1975), coproduction franco-danoise dont le sujet est la rencontre désastreuse entre un homme jeune, son ancienne femme et le nouvel amant de celle-ci dans une maison de campagne en France.

Nous sommes tous des démons (Klabautermanden, 1969), récit à la fois subversif et fantastique, est l'adaptation d'un roman d'Axel Sandemose sur un vieux capitaine de la marine hanté par les appels d'une jeune sirène.

En 1978, Carlsen revient au Danemark de son enfance avec Un rire sous la neige (H'or, var der ikke en, som lo ?), où le personnage principal est un jeune chômeur des années 30. Quatre ans plus tard, le cinéaste signe ‘ la Bourse ou la Vie’ (Pengene eller livet), une œuvre largement autobiographique. Après un documentaire (Journal d'Espagne, 1986), le cinéaste s'intéresse dans Gauguin, le loup dans le soleil/le Loup à la porte (Oviri) à l'une des périodes les plus sombres de la vie du peintre, qui, en 1893, quitte Tahiti pour Paris et la Bretagne, où l'attendent insuccès, trahisons et déconvenues amoureuses et amicales. En 1995, il retrouve le romancier Knut Hamsun dans Deux plumes vertes (Two Green Feathers), adaptation du célèbre roman Pan.

Il y a, dans le meilleur de l'œuvre de Carlsen, une singulière beauté plastique que vient rehausser une sympathie profonde et chaleureuse pour tel ou tel être humain, dont le visage se dégage de la masse anonyme comme celui de ces hallucinés qu'on voit sur les gravures et les toiles d'un autre artiste scandinave, Edvard Munch.▲

CARLSON (Richard)

acteur et cinéaste américain (Albert Lea, Minn., 1912 - Los Angeles, Ca., 1977).

Interprète sans grand relief de comédies et de films d'aventures à partir de 1938, il voit ses rôles s'étoffer peu à peu (l'Étrange Créature du lac noir, J. Arnold, 1954). Producteur prolifique de séries TV, où il joue généralement, il a signé pour le grand écran trois films fort élégants et divertissants (où il n'apparaît pas) : Quatre Tueurs et une fille (Four Guns to the Border, 1954), l'Implacable Poursuite (The Saga of Hemp Brown, 1958), Rafales dans la nuit (Appointment With a Shadow, id.). Puis, en marge de ses activités d'homme d'affaires, un western tourné en Espagne : Kid Rodelo (1966).

CARLSTEN (Rune)

cinéaste suédois (Stockholm 1890 - id. 1970).

Animateur du Théâtre royal dramatique, il débute au cinéma comme acteur dans ‘les Gens de Hemsö’ (Hemsöborna, 1918) de Carl Bareklind d'après Strindberg. Il passe ensuite à la mise en scène et se range au côté d'Hedquist et de Brunius parmi les petits maîtres de l'âge d'or du cinéma suédois au temps du muet. Il signe ‘Quand l'amour commande’ (Ett farligt frieri, 1919) avec Lars Hanson, ‘les Motifs supérieurs’ (Högre ändamål, 1921), ‘Un moderne Robinson’ (Robinson i skärgården, id.) et compte parmi les réalisateurs favoris de l'acteur Gösta Ekman : ‘la Bombe’ (Bomben, 1919) ; ‘les Traditions de la famille’ (Familjens traditionner, 1920) ; ‘Un jeune comte’ (Unge grevan, 1924). Dérouté par le parlant, il paraît, au cours des années 30, avoir perdu son originalité, mais il étonne pourtant, en 1942, avec ‘le Docteur Glas’ (Doktor Glas), curieuse adaptation de l'œuvre de Hjalmar Södeberg. Ses cinq films ultérieurs sont des mélodrames (le dernier ‘le Lien éternel’ [Eviga länkar] sort sur les écrans en 1947).

CARMET (Jean)

acteur français (Bourgueil 1921 - Sèvres 1994).

Comédien cantonné longtemps dans les seconds rôles, en raison de son physique de Français moyen, il doit attendre les années 70 pour se voir confier l'emploi vedette dans des productions à prétention sociologique, voire « politique » : Dupont Lajoie (Y. Boisset, 1975). Il devient alors un des acteurs les plus sollicités dans les productions — toute considération de qualité mise à part — visant à peindre une prétendue « France profonde ». Sa carrière croise alors celle d'autres comédiens affligés du même label (Louis de Funès, Jean-Pierre Marielle, Jean Lefebvre...) et de réalisateurs spécialisés dans les produits du terroir (Jean Girault). Certaines performances isolées, tel le Caporal épinglé (J. Renoir, 1962), mais aussi Violette Nozière (C. Chabrol, 1978), Buffet froid (Bertrand Blier, 1979), son apparition dans la Banquière (F. Girod, 1980), son étonnante composition de vieux travesti dans Miss Mona (Medhi Charef, 1987) montrent néanmoins ce que son art pourrait apporter au cinéma français. Encore faudrait-il que des scénaristes et des réalisateurs de premier plan se penchent sur son cas : il est aussi mal desservi que Michel Galabru, ce qui relève d'une certaine forme de gaspillage. Jean Carmet est apparu dans près de 200 films. Outre ceux déjà cités, on peut signaler : les Enfants du paradis (M. Carné, 1945) ; Copie conforme (J. Dréville, 1947) ; Monsieur Vincent (M. Cloche, id.) ; Till l'Espiègle (G. Philipe, 1956) ; la Belle Américaine (R. Dhéry, 1961) ; Mélodie en sous-sol (H. Verneuil, 1963) ; Noirs et blancs en couleurs/la Victoire en chantant (J.-J. Annaud, 1976) ; le Sucre (J. Rouffio, 1978) ; Il y a longtemps que je t'aime (J.-C. Tacchella, 1979) ; les Misérables (R. Hossein, 1982) ; Canicule (Y. Boisset, 1984) ; l'Été 36 (Y. Robert, TV, 1985) ; les Fugitifs (F. Veber, 1986) ; la Vouivre (G. Wilson, 1988) ; Un jeu d'enfant (Pascal Kané, 1989) ; le Château de ma mère (Y. Robert, 1990) ; Merci la vie (Bertrand Blier, 1991) ; le Bal des casse-pieds (Y. Robert, 1992), la Chambre 108 (Daniel Moosman, 1993), Germinal (C. Berri, id.).