Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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STÉRÉOPHONIE. (suite)

Des tentatives de reproduction, au cinéma, en stéréophonie de phase ont été tentées mais sans succès, en adoptant une piste photographique double à la place de la piste monophonique, les pistes gauche et droite étaient enregistrées sur les deux traces distinctes de la piste optique, et la reproduction se faisait sur deux haut-parleurs placés à gauche et à droite de l'écran. La bande sonore du film la Griffe et la Dent (François Bel et Gérard Vienne, bande sonore Michel Fano 1977) a été exploitée dans quelques salles de cette manière.

La stéréophonie est surtout connue au cinéma par le procédé « Dolby Stéréo » qui est en fait est un procédé de reproduction multicanal résultant de l'association d'un système de combinaison de signaux par matriçage imaginé par la firme américaine RCA et d'un système de réduction de bruit de fond imaginé par Ray Dolby. Le matriçage permet de regrouper quatre canaux sur deux voies par matriçage, puis lors de la reproduction, de restituer les quatre canaux par dématriçage à partir des deux voies. Ce procédé apparu bien avant l'arrivée du numérique au cinéma a permis d'améliorer considérablement la reproduction sonore lors de la projection. Il a entraîné la disparition des procédés magnétiques, beaucoup trop contraignants sur le plan technique et donc économique. Sur la copie, le système Dolby Stéréo consistait à enregistrer à la place de la piste monophonique deux traces distinctes sur l'emplacement de la piste monophonique. Sur les projecteurs, il suffisait de remplacer la cellule unique (mono) par une cellule double et de remplacer la chaîne mono par quatre canaux : trois canaux d'écran et un canal d'ambiance avec un faible bruit de fond. Le matriçage et le dématriçage empêchaient toute stéréophonie de phase, mais le rendu sonore était devenu spatialisé et la reproduction sonore se faisait avec un bruit de fond inaudible pour les spectateurs.

Compte tenu de ces avantages, le Dolby Stéréo, apparu vers 1975, s'est progressivement imposé, à mesure que salles et auditoriums s'équipaient. L'apport du son numérique au cinéma ( SONORE), à partir de 1990, fait apparaître des possibilités importantes d'amélioration dans la reproduction de la bande sonore des films en permettant une séparation totale entre les canaux, une possibilité de stéréophonie de phase avec un bruit de fond totalement inaudible. Mais la stéréophonie de phase reste d'emploi difficile en raison de la disposition des spectateurs dans les salles. Seules les musiques et les ambiances sont parfois en stéréophonie de phase. Les dialogues restent souvent localisés sur la voie centrale.

Tous les nouveaux procédés imaginés en son numérique restent compatibles avec les conditions de diffusion dans les salles, de telle sorte qu'il n'a pas été nécessaire de modifier la disposition des haut-parleurs. Les systèmes exploités permettent tous de reproduire trois voies principales d'écran (gauche, droite, centre), une voie de renfort des fréquences basses et une diffusion stéréophonique de l'ambiance (deux canaux gauche et droit). Certains procédés renforcent les possibilités du 70 mm en y ajoutant deux autres voies d'écran (inter gauche et inter droite).

STÉRÉOSCOPIE.

Méthode de simulation du relief, basée sur la présentation simultanée de deux images enregistrées par deux objectifs d'écartement similaire à l'écartement des yeux. ( RELIEF.)

STERLING (George Ford Stitch, dit Ford)

acteur américain (La Crosse, Wis., 1883 - Los Angeles, Ca., 1939).

Une des grandes figures secondaires du cinéma burlesque. Adolescent, il s'enfuit pour travailler dans un cirque où il tient un rôle de clown. On le retrouve sur des scènes de vaudeville puis au théâtre. En 1911, il rejoint Mack Sennet à la Biograph, et le suit, l'année suivante, à la Keystone, dont il va devenir un des piliers, donnant la réplique à Chaplin, Mabel Normand, surtout dans des rôles de méchant barbichu acariâtre, toujours ridicule, notamment comme chef des Keystone Kops. Il quitte Sennet définitivement en 1921, et assoit sa réputation d'acteur de complément en dessinant de belles silhouettes dans Wild Oranges (K. Vidor, 1924), Celui qui reçoit des gifles (V. Sjoström, id.), The Road to Glory (H. Hawks, 1926) ou For the Love of Mike (F. Capra, 1927). Le parlant lui fut moins clément et il se retire en 1935, après Black Sheep de Allan Dwan. Il perdit une jambe à la suite d'un grave accident, ce qui mit fin à sa carrière.

STERNBERG (Jonas Sternberg, dit Josef von)

cinéaste américain d'origine autrichienne (Vienne 1894 - Los Angeles, Ca., 1969).

Aîné d'une famille juive de cinq enfants, il connaît une jeunesse pauvre et humiliée, partagée entre Vienne (1894-1901 / 1904-1908) et New York. À Vienne, son enfance difficile est compensée par l'éblouissement que lui procurent les féeries du Prater. À New York, obligé d'interrompre ses études au bout d'un an (1909), il devra faire vingt métiers sans toujours échapper à la misère. Il aborde le cinéma en 1912 par le nettoyage et la restauration des copies. À Fort-Lee (New Jersey), à dix-sept ans, il « regarde travailler » les Français Mercanton, Capellani, Maurice Tourneur, tout en méprisant les histoires qu'ils tournent. Il est tour à tour vérificateur, monteur, titreur, scénariste, photographe. Après l'armistice, il voyage aux États-Unis et en Europe, où il devient l'assistant de plusieurs metteurs en scène, notamment Émile Chautard en 1919. Ses compétences multiples lui font connaître Paris, Prague, Berlin, Londres, où il entame une carrière d'acteur. Il s'installe enfin à Hollywood en 1924 et dirige son premier film, les Chasseurs de salut (1925), en indépendant, sous la triple influence de Stroheim, du Kammerspiel et de l'« impressionnisme français ». Échec commercial mais gros succès d'estime (les Artistes associés achètent le film) qui lui vaut une commande de Chaplin — la Mouette (1926) — et un contrat pour huit films avec la MGM. Chaplin interdit toute distribution des deux versions de la Mouette ; le contrat avec la Metro venait d'être rompu (à l'amiable) après deux expériences malheureuses : Escape est refait par Phil Rosen sous le titre de Heaven on Earth ; The Masked Bride, abandonné par l'auteur, est achevé par W. Christy Cabanne. Paradoxalement, Sternberg « sauvera » plus d'un film contesté ou en panne et devra désavouer nombre des siens « sauvés » par d'autres cinéastes ! Ce sont là les bizarreries de la politique des studios. Avec les Nuits de Chicago (1927), il inaugure les films explorant l'univers du gangstérisme. C'est la « manière noire » d'un Sternberg héritier de Stroheim et aussi du réalisme allemand teinté d'expressionnisme et de « fantastique social ». Cette période voit se succéder les réussites ; elle culmine en 1928 avec les Damnés de l'océan, justement associés à la fin de l'âge d'or du cinéma muet ; elle s'achève en 1930 avec l'Ange bleu, l'une des toutes premières affirmations éclatantes du cinéma parlant. Autour de colosses fragiles qu'incarnent un George Bancroft, un Emil Jannings, l'univers sternbergien se met en place, opaque, envoûtant, ébloui d'érotisme, traversé de symboles. Ses thèmes fondamentaux déjà s'épanouissent : la poésie baudelairienne de la mer, les oiseaux, l'inévitable frustration du désir, la foi en la rédemption des êtres déchus, et une étrange fascination pour la déchéance. Mais si Stroheim entrait objectivement dans ses films en témoin et en juge, il arrive à Sternberg d'ironiser subtilement sur le pathétisme des siens. L'Ange bleu, tourné à Berlin, est à cet égard un film charnière. Il parachève la magie noire du premier versant réaliste-romantique de l'œuvre, il ouvre sur la magie blanche de son second versant, fétichiste-romanesque. C'est sur la personne de Marlene Dietrich (et son opposition à Emil Jannings) que repose ce double accomplissement. De cette admirable « Circé des brasseries », Sternberg va progressivement faire une idole quasi abstraite, l'inaccessible « femme de rêve » des surréalistes. Il avait révélé une superbe actrice ; à force d'artifices et de génie baroque, il la transforme en mythe. Il faudra cinq ans, le temps de sept films. Sauf pour ses débuts désargentés, il a toujours tourné en studio ; il y recréait le réel afin de mieux le révéler et l'exalter. Le studio désormais ne lui servira guère qu'à déréaliser le monde dans une sorte de fuite, de dérision et de procès menés sous le couvert de l'art de la lumière. « L'artiste qui œuvre dans le cinéma doit apprendre à choisir et à créer non point avec la caméra mais avec l'œil... Le voyage des rayons représente l'aventure et le drame de la lumière. L'histoire de la lumière, c'est l'histoire de la vie. » Sternberg pose en principe qu'un cinéaste doit être son propre directeur de la photographie. La lumière pure est blanche : « Mes décors et mes costumes sont toujours non colorés », noirs et blancs. Pour la Femme et le Pantin, il fait projeter au pistolet de la peinture aluminium sur tous les lieux sombres afin de les éclairer mieux qu'avec des projecteurs. Sternberg travaille délibérément sur des stéréotypes — littéraires, plastiques, musicaux, touristiques —, mélodrame et kitsch. Poétiquement transfigurés, ces stéréotypes ne dérivent pas vers le rêve ou l'irréalité, ils deviennent des essences ou, si l'on préfère, des définitions. L'Allemagne puritaine de l'Ange bleu, le Maroc colonial de Cœurs brûlés, la Chine révolutionnaire de Shanghai-Express, la Russie byzantine de l'Impératrice rouge, l'Espagne lumineuse et funèbre de la Femme et le Pantin, la jungle tropicale d'Anatahan, plus vrais que les vrais, sont ce que la mémoire, le désir, la culture les font pour l'esprit qui s'en éprend. Leur parfait exotisme (altérité et plénitude) est le gage de leur authenticité artistique.