Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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DELLUC (Louis) (suite)

Films :

le Silence (1920) ; Fumée noire (id.) ; Fièvre (1921) ; le Chemin d'Ernoa (id.) ; le Tonnerre (id.) ; la Femme de nulle part (1922) ; l'Inondation (1924).

DELLUC (PRIX LOUIS-).

Ce prix, qui couronne chaque année en France un film jugé (par un jury de critiques) le meilleur de la production nationale, fut décerné pour la première fois en 1937, à l'initiative de Maurice Bessy et Marcel Idzkowski, par un groupe de journalistes de cinéma, réunis de façon informelle sous le label de « Jeune Critique indépendante ». Il s'agissait d'abord de faire pièce au « Grand Prix du cinéma français », considéré comme trop académique (ce dernier venait d'être attribué successivement à l'Appel du silence et à Légions d'honneur). Il n'y eut, à l'origine et il n'y aura jamais, ni statuts ni président, mais un simple communiqué recommandant au jury de fixer son choix sur un « film parlant français, version originale, présenté durant l'année », avec cette précision : « Sera considéré comme film français tout film fait pour un esprit français » (sic). Le premier jury était composé, par ordre alphabétique, de Mmes Odile Cambier et Suzanne Chantal, et de MM. Marcel Achard, Georges Altman, Claude Aveline, Maurice Bessy, Pierre Bost, Émile Cerquant, Georges Charensol, Louis Chéronnet, Georges Cravenne, Benjamin Fainsilber, Nino Frank, Paul Gilson, Paul Gordeaux, Pierre Humbourg, Marcel Idzkowski, Henri Jeanson, André Le Bret, Roger Lesbats, Pierre Ogouz, Roger Régent et Jean Vidal. Par la suite, sont venus s'adjoindre des hommes tels que Lo Duca, Jean de Baroncelli, Jean-Louis Bory, etc. Roger Régent en parle comme d'un jury — et d'un prix — « de copains ». Le patronage de Louis Delluc fut choisi comme symbole d'indépendance, d'exigence critique et d'amour du cinéma, à l'exclusion de toute motivation mercantile. Le premier film primé fut les Bas-Fonds de Jean Renoir. Sous l'Occupation, le prix fut mis en sommeil, et le jury disloqué. Le jury se réunit à nouveau en 1945, pour distinguer un film tourné en 1939 (mais non distribué alors), Espoir d'André Malraux. Depuis lors, le prix Delluc a été attribué régulièrement, sauf en 1951, aucun film n'ayant été jugé, cette année-là, digne de le recevoir. Il s'est porté tantôt sur des metteurs en scène débutants (Alexandre Astruc, Pierre Étaix, Jean-Paul Rappeneau, Bertrand Tavernier, Diane Kurys), tantôt sur des « vétérans » (Jean Dréville, René Clair, Paul Grimault).

Palmarès page 832.

DELMONT (Édouard)

acteur français (Marseille 1893 - Paris 1955).

Sa voix cassée, sa silhouette sèche, une sobriété du meilleur aloi parmi l'exubérance de ses partenaires donnent la mesure de son grand talent tout au long d'une abondante filmographie, succession de titres remarquables : la trilogie de Marcel Pagnol (Marius, 1931 ; Fanny, 1932 ; César, 1936) ; Angèle (Pagnol, 1934) ; la Femme du boulanger (id., 1938) ; Quai des brumes (M. Carné, 1938) ; la Marseillaise (J. Renoir, id.) ; l'Étrange Monsieur Victor (J. Grémillon, 1938) ; le Déserteur (L. Moguy, 1939) ; Adieu Léonard (P. Prévert, 1943) ; la Fiancée des ténèbres (S. de Poligny, 1945) ; l'École buissonnière (J. P. Le Chanois, 1949). Un grand nombre d'autres films bénéficie de sa présence et de son efficacité.

DEL MONTE (Peter)

cinéaste italien (San Francisco, Ca., 1943).

Comme essai de diplôme au Centro sperimentale di Roma, il réalise son premier long métrage, Fuori campo (1969), qui parle de ses propres expériences par rapport au cinéma. Il travaille ensuite à la TV. Son premier film pour le cinéma, Irène Irène (id., 1975), est le portrait lyrique d'un ancien magistrat, Alain Cuny, abandonné par sa femme et en crise existentielle. Dans le panorama assez pauvre du jeune cinéma italien de cette période, ce film brille d'une lumière particulière et possède un style un peu calligraphique. L'Autre Femme (L'altra donna, 1980) est l'analyse psychologique de deux femmes, une riche bourgeoise et une immigrée éthiopienne, à la recherche de valeurs nouvelles. Après Piso Pisello (1981), il aborde le thème du transfert de personnalité entre un frère et une sœur dans l'Invitation au voyage (1982). Ses films suivants mélangent recherches psychanalytiques et rêves : Piccoli Fuochi (1985) ; Julia et Julia (Giulia e Giulia, 1987, premier long métrage tourné en vidéo à haute définition) ; Étoile (id., 1989) ; Tracce di vita amorosa (1990) ; Compagna di viaggio (1996) ; La ballata dei lavavetri (1998), histoire d'une famille polonaise émigrée à Rome et Controvento (2000), le drame de deux sœurs amoureuses d'un même homme.

DELON (Alain)

acteur, producteur et cinéaste français (Sceaux 1935).

Très jeune, après une scolarité tumulteuse, il fuit un foyer désuni, et s'engage à l'âge de dix-sept ans. Il sert comme parachutiste pendant la guerre d'Indochine et combat à Diên Biên Phu. De retour en France, il exerce divers petits métiers, notamment celui de fort des Halles. C'est par hasard, et parce qu'il est servi par un physique exceptionnel qu'il aborde, en 1957, les milieux du cinéma, sans formation dramatique particulière. Sa carrière, dès lors, sera fulgurante. Il est le jeune premier que le cinéma français attendait, et ses potentialités non encore révélées, une ambiguïté singulière, un charisme incontestable l'amènent à rencontrer le gotha du cinéma international : Clément, Visconti, Antonioni.

Ses premiers films exploitent un physique (les aptitudes dramatiques n'apparaîtront que plus tard, avec le travail, le métier et la maturité) qui rencontre une certaine mode néoromantique, celle, encore vivace, fixée par James Dean, dont la disparition est récente. Mais les emplois restent légers, comédies sentimentales à la française, ou sucreries austro-germaniques. Ces dernières lui vaudront de rencontrer Romy Schneider, déjà au zénith de la première phase de sa propre trajectoire. Quand la femme s'en mêle (1957), Christine (1958), Faibles Femmes (1959) sont les films les plus caractéristiques (et les plus oubliés) de cette période. Il rencontre ensuite René Clément, qui, dans Plein Soleil (1960), met derechef en évidence l'ambiguïté fondamentale de sa nature, la présence du démon sous l'enveloppe de l'ange, dualité, contradictions, qui nourriront par la suite les meilleures de ses créations. La même année Rocco et ses frères confirme cette révélation, grâce à Luchino Visconti, qui restera la rencontre déterminante de Delon pour ce qui concerne, à tout le moins, la part la plus riche et la plus durable de son travail d'acteur. Confirmé par Antonioni, en 1962, dans l'Éclipse, comme « matériau » privilégié des plus grands créateurs cinématographiques, Delon entame alors une carrière ambitieuse et « gourmande », malheureusement toujours menacée par une constante dispersion. Il cherche le prestige artistique et, simultanément, la domination commerciale, même au-delà du domaine où s'exerce son métier (il investit dans l'élevage des chevaux de course, échoue dans la fondation d'une compagnie aérienne, etc.). Il est également fasciné par le monde du pouvoir. Très symboliquement, mais peut-être aussi pour aider à effacer un scandale qui l'a profondément atteint (il est compromis puis blanchi dans une affaire criminelle qui défraye la chronique et suscite de violentes réactions politiques), il rachète, pour l'offrir aux compagnons de la Libération, l'original de l'Appel du 18-Juin du général de Gaulle, vendu à l'étranger dans une vente publique.