Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
S

SCHRECK (Max)

acteur allemand (Berlin 1879 - Munich 1936).

Très actif sur les scènes de théâtre, en particulier à Munich et à Berlin, il est apparu dans près de cinquante films, dont le Nosferatu de Murnau (1922). Sa prestation dans le rôle du vampire restera éternellement attachée à son nom, surtout à l'étranger, où on a longtemps cru qu'il s'agissait d'un pseudonyme (Schreck signifie en effet « effroi »). En Allemagne, bien qu'ayant rarement tenu les premiers rôles, il est connu pour sa participation, notamment, à l'Alcade de Zalamea (L. Berger, 1920), à la Rue (K. Grune, 1923), au Marchand de Venise (Der Kaufmann von Venedig, Peter Paul Felner, 1923), aux Finances du grand-duc (F.W. Murnau, 1924), à la Fiancée vendue (M. Ophüls, 1932), au Tunnel (K. Bernhardt, 1933).

SCHROEDER (Barbet)

cinéaste et producteur français (Téhéran, Iran, 1941).

Licencié en philosophie, critique aux Cahiers du cinéma, imprésario de concerts de jazz, il fonde en 1964 les Films du Losange. Producteur d'Éric Rohmer (la Collectionneuse, 1967 ; Ma nuit chez Maud, 1969 ; le Genou de Claire, 1970), de Jacques Rivette pour Céline et Julie vont en bateau (1974) et du film à sketches Paris vu par... (1965), il collabore aux Carabiniers de Jean-Luc Godard, à la fois comme assistant et comme acteur. Il passe à la mise en scène en 1969 avec More, film-témoignage qui aborde l'actualité de la drogue et les leurres dramatiques qu'elle suscite. Après ce film à succès, il réalise en Nouvelle-Guinée orientale un moyen métrage (Sing-Sing, 1971), puis un long métrage de fiction : la Vallée (1972). Après un étonnant portrait du dictateur africain le Général Idi Amin Dada (1974), il signe Maîtresse (1976), évocation des déviances sado-masochistes, propose avec Koko le gorille qui parle (1977) un reportage sur une expérience de communication avec un grand singe par l'intermédiaire du langage des sourds-muets et réalise Tricheurs (1984) avec Jacques Dutronc. Il entreprend en 1987 le tournage de son premier film américain, Barfly — sur un scénario de Charles Bukowski —, avec Mickey Rourke et Faye Dunaway puis réalise successivement, toujours aux États-Unis, le Mystère von Bülow (Reversal of Fortune, 1990) avec Jeremy Irons, J.F. partagerait appartement (Single White Female, 1992), Kiss of Death (id., 1995), Before and After (id., 1996) et l'Enjeu (Desperate Measures, 1997), tous films attachants où Schroeder affine un style élégant et souple et acquiert une virtuosité grandissante dans le contrôle de la fiction traditionnelle. C'est en Bolivie et en vidéo H.D. qu'il tourne, contre toute attente et pour un petit budget, la Vierge des tueurs (la Virgen de los sicarios, 2000), peinture sans concession d'une société où la violence est quotidienne. Il a été également acteur dans un certain nombre de films, dont Roberte (P. Zucca, 1979).

SCHROETER (Werner)

cinéaste allemand (Georgenthal 1945).

Il étudie la psychologie à l'université de Mannheim et devient, à partir de 1972, metteur en scène de théâtre et d'opéra : il monte Salomé, d'Oscar Wilde (1973), Lucrèce Borgia, de Victor Hugo (1974), Mademoiselle Julie, d'August Strindberg (1977), Lohengrin, de Richard Wagner (1979). Il réalise, dès 1967, de petites bandes en 8 mm. Très jeune encore, la musique d'opéra l'attire : ses films ultérieurs en portent la trace. Werner Schroeter éprouve une grande admiration pour Maria Callas, à qui il consacre la plupart de ses premiers essais : Callas Walking Lucia (1968), Maria Callas Porträt (id.). Il découvre, lors du 4e festival du film expérimental de Knokke-le-Zoute (1967), les productions de l'avant-garde américaine et les travaux baroques de Gregory Markopoulos. Une des premières œuvres en 16 mm de l'auteur, Argila (MM, 1968), conçue pour être projetée sur deux écrans, porte la marque des influences subies alors. Mais la recherche pure n'intéresse pas directement Schroeter ; il désire mettre en scène, ritualiser sa culture. Son premier long métrage « professionnel », Eika Katappa (1969), se présente comme un collage d'images et de sons les plus divers, comme une mise en abyme de sources culturelles disparates — Siegfried, Carmen, Hamlet sont reliés entre eux par des musiques de Giuseppe Verdi, de Ludwig van Beethoven, de Georges Bizet, de Krzysztof Penderecki, mais aussi par des chansons d'Elvis Presley et de Catarina Valente — servant à révéler la personnalité profonde du cinéaste. Toutes ses thématiques : la théâtralité, la fascination pour la mort, le dialogue germano-latin, sont déjà présentes. En 1971, il réalise une version assez fidèle de Salomé, l'œuvre d'Oscar Wilde, ce qui lui donne l'envie de mettre directement en scène des pièces. La même année, il tourne la Mort de Maria Malibran (Der Tod der Maria Malibran, id.), un manifeste de son art poétique. Prenant, pour motifs de ses variations plastiques, des éléments de la biographie d'une cantatrice du siècle dernier morte à 28 ans « d'avoir trop chanté », il élabore une série de correspondances entre son moi et la culture dont il est le dépositaire. Correspondances qui font de l'art la valeur suprême à laquelle l'homme occidental, déçu et désabusé, peut encore croire. Cette œuvre, comme toutes celles qu'il produit jusqu'au Règne de Naples (Neapolitanische Geschwister/Regno di Napoli, 1978) : Willow Springs (1973), l'Ange noir (Der schwarze Engel, 1974), Flocons d'or (Goldflocken, 1976), se présente comme un rituel à la fois stylisé, expressionniste et baroque. Ces films relèvent plus du collage que de la fiction proprement dite. Ils doivent une grande partie de leur pouvoir d'envoûtement aux prestations de l'actrice Magdalena Montezuma, qui demeure, jusqu'à la fin, fidèle à son metteur en scène. Elle jouera en effet son dernier rôle dans Der Rosenkönig (RFA-POR, 1984-1986).

Situé jusque-là en marge de l'histoire, dans un monde clos purement artistique, Werner Schroeter, avec le Règne de Naples, socialise sa démarche, se laisse séduire par l'Italie et travaille son récit. Si cette vision personnelle de la célèbre ville, appréhendée à travers trente ans du destin de quelques figures pittoresques, semble ouvrir de nouvelles perspectives dans l'œuvre de l'auteur, ce dernier échoue, par la suite, dans sa tentative de dominer les codes envahissants de l'artifice théâtral. Palermo (Palermo oder Wolfsburg, 1980), Concile d'amour (Liebeskonzil, d'après la pièce d'Oscar Panizza, 1981) sont des produits qui n'évitent pas toujours une certaine lourdeur intentionnelle. Le Jour des idiots (Der Tag der Idioten, id.) réintroduit une certaine fluidité narrative dans l'expression. À partir de l'espace fermé d'un asile d'aliénés, Schroeter s'interroge à nouveau sur la mort, la représentation, le reflet, le double, en un style relativement classique. Le cinéaste œuvre maintenant dans des directions très diverses tout en essayant de préserver une partie de son écriture spécifique, comme c'est le cas dans l'Étoile qui rit (Der lachende Stern, 1983), documentaire socio-poétique tourné aux Philippines. Il s'éloigne du baroquisme pour retrouver une ambiance émotive plus réaliste dans De l'Argentine (FR, 1983-1986) et réalise en 1990 Malina avec Isabelle Huppert. Depuis la fin des années 70, il consacre une part importante de ses activités à la mise en scène de théâtre et d'opéra. C'est sur ce milieu qu'il a réalisé en 1997 Poussières d'amour (Abfallprodukte der Liebe).