Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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STEINER (Maximilian Raoul Steiner, dit Max)

musicien d'origine autrichienne (Vienne 1888 - Hollywood, Ca., US, 1971).

Élève de Gustav Mahler, auteur d'opérettes viennoises, puis orchestrateur à Broadway, Max Steiner est surtout l'auteur de quelques célèbres musiques de film. Venu à Hollywood au début du parlant, il remplaça la simple musique d'ambiance par une véritable partition qui « collait » au film presque de bout en bout, par exemple pour Symphony of Six Millions (G. La Cava, 1932). Il travaille d'abord à la RKO, où son talent culmine avec King Kong (E. B. Schoedsack et M. C. Cooper, 1933), puis à la Warner Bros, où il accumule les réussites et où il reste jusqu'en 1965. Sa technique particulière suivait pas à pas l'action, absorbant dans son développement jusqu'au bruitage (bruit de verres, tic-tac de montre, etc.) : de ce point de vue, sa partition des premières minutes du Grand Sommeil (H. Hawks, 1946), qui souligne jusqu'à la chute de Martha Vickers dans les bras d'Humphrey Bogart, est exemplaire. Il avait à son service de nombreuses mélodies que son génie d'orchestrateur transformait à loisir : ainsi le leitmotiv languide de l'Insoumise (W. Wyler, 1938) devint celui, pesant, du Trésor de la Sierra Madre (J. Huston, 1948). Il se jouait aussi avec grâce des dangers du pot-pourri, témoin l'amalgame de marches militaires dont il fait sa musique de la Charge fantastique (R. Walsh, 1942), ou son utilisation de la Marseillaise et de la chanson romantique As Time Goes by qu'il fond dans sa partition de Casablanca (M. Curtiz, 1942). Mais sa plus belle réussite reste sa composition pour la Prisonnière du désert (J. Ford, 1956), où son romantisme s'accordait parfaitement avec celui du cinéaste. Sa filmographie est immense (il est notamment le compositeur d'Autant en emporte le vent de Victor Fleming en 1939). Le plus important des compositeurs hollywoodiens ? Peut-être.

STEINER (Ralph)

photographe et cinéaste américain (Cleveland, Ohio, 1899 - Hanover, N. H., 1986).

En 1929, ce photographe filme, à la manière du « cinéma pur » européen, des plans d'eau (H₂O). Dans le même esprit, il réalise en 1930 Ressac et Algues (Surf and Seaweeds) et, comme Léger, Dulac ou Vertov, un « ballet de machines » (Mechanical Principles). Après un film pacifiste, Café Universal (1933), il est l'opérateur de Pie in the Sky (1934), œuvre collective d'Elia Kazan, Elman Koolish et d'acteurs improvisant dans un terrain vague. Il est le scénariste de The Plow That Broke the Plains (1936) de Pare Lorenz, réalise The City (1939) avec Willard Van Dyke et Serlin et Hands (1940) pour la Sécurité sociale américaine. De l'avant-garde au documentaire engagé, c'est un cinéaste de la famille de Richter ou Ivens.

STEINHOFF (Hans)

cinéaste allemand (Pfaffenhofen 1882 - dans un accident d'avion près de Luckenwalde 1945).

Acteur et metteur en scène de théâtre, il commence dès 1922 à réaliser des films sans relief particulier. L'ascension de Hitler lui permet de sortir de l'anonymat : en 1933, il réalise le Jeune Hitlérien Quex (Hitlerjunge Quex), qui racontait l'histoire d'un adolescent — fils d'un ouvrier communiste — gagné par les ivresses de la nouvelle idéologie officielle et proposé aux spectateurs comme le nouveau héros des temps modernes (il allait jusqu'à sacrifier sa propre vie à ses convictions). Le film est également une réponse à celui de Piel Jutzi, Sur le pavé de Berlin, tourné deux ans auparavant et porteur d'un message politique opposé. Steinhoff devient l'un des metteurs en scène les plus sollicités du IIIe Reich. Curieusement, sur le plan artistique, son talent s'affine et l'on comprend que le Dr Goebbels ait pu le tenir pour un cinéaste capable de rivaliser avec ses homologues étrangers. Il signe successivement les Deux Rois (Der alte und der junge König, 1935), sur l'éducation du futur Fréderic II de Prusse, Un ennemi du peuple (Ein Volksfeind, 1937), la Lutte héroïque (Robert Koch, der Bekämpfer des Todes, 1939), biographie du célèbre savant et médecin — le rôle était interprété par Emil Jannings —, qui apparaît comme une réplique au Pasteur tourné aux États-Unis par Dieterle. Le Président Krüger (Ohm Krüger, 1941), film violemment antibritannique qui évoque la guerre des Boers, permet à Jannings une nouvelle composition haute en couleur et dénonce non sans cynisme (si l'on se réfère à la date de tournage du film) les camps de concentration où les Anglais parquaient les vaincus du Transvaal., Rembrandt (id., 1942), dont le tournage se déroule en Hollande, parvient à reproduire avec habileté l'époque du grand peintre. Parmi ses autres œuvres, il convient de citer encore la Danse sur le volcan (Tanz auf dem Vulkan, 1938), variation sur le mythe du mime Debureau, et la Fille au vautour (Die Geierwally, 1940), remake du film d'Ewald André Dupont réalisé en 1921, Heidemarie Hatheyer succédant à Henny Porten dans le rôle principal. Hans Steinhoff, qui venait de tourner son ultime film Shiva und die Galgenblume (1945), meurt quelque peu mystérieusement dans un accident d'avion alors qu'il était rapatrié de Prague vers Berlin avec une escorte de SS (on a laissé entendre qu'il aurait pu être liquidé par ses propres gardes du corps).

STEKLÝ (Karel)

cinéaste tchèque (Prague 1903 - id. 1986).

Il débute comme scénariste en 1933, adaptant notamment des auteurs du XIXe et du XXe siècle. Il signe son premier film de réalisateur, ‘ la Brèche ’ (Průlom), en 1946, mais s'impose à l'attention internationale l'année suivante : son deuxième essai, Sirena, évoque une grève ouvrière dans les mines de Kladno au début du XXe siècle et remporte le Lion d'or du festival de Venise. Il ne devait pas renouveler ce succès malgré l'intérêt que suscitèrent dans son pays ‘ les Ténèbres ’ (Temno, 1950, d'après A. Jirásek), ‘ Anna la prolétaire ’ (Anna proletářka, 1952, d'après Ivan Ollbracht), ‘ le Joueur de cornemuse de Strakonice ’(Strakonickÿ dudák, 1955, d'après J. K. Tyl), ‘ le Brave Soldat Švejk ’ (Dobrÿ voják Švejk, 1957) et ‘ À vos ordres mon lieutenant ’ (Poslušně hlásím, id., id.), deux films adaptés de l'œuvre de Hašek, ‘ le Vengeur ’ (Mstitel, 1959, d'après K. M. Čapek-Chod). On lui doit aussi des comédies et des drames historiques et quelques films à sujets contemporains (Une carrière [Kariéra], 1948).