Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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DANELIUC (Mircea)

cinéaste roumain (1943).

Il étudie à l'Institut d'Art Théâtral et Cinématographique Ion L. Caragiale de Bucarest et en sort en 1972 diplômé tout en étant également lauréat de la Faculté de langue et littérature française. Son premier long métrage ‘la Course’ (Cursa, 1975) est suivi par quelques films marquants, témoins d'une position courageuse au sein de la contrainte idéologique des « années Ceausescu » : ‘Édition spéciale’ (Ediţie speciala, 1978), ‘Éssai micro’ (Proba de microfon, 1980), ‘la Chasse aux renards’ (Vînatorarea de vulpi (id.), la Croisière (Croaziera, 1981), Glissando (id., 1984), Jacob (id., 1988), ‘le Onzième Commandement’ (A unsprezecea porunča, 1991), ‘la Guerre édentée’ (Tusea şi junghiul, 1992), ‘le Lit conjugal’ (Patul conjugal, 1993), les Escargots du sénateur (Senatorul melcilor, 1995). Daneliuc a paru dans plusieurs films comme acteur et metteur en scène de théâtre.

DANEMARK.

En 1896, les habitants de Copenhague peuvent découvrir les films Lumière grâce au peintre Vilhelm Pacht et, d'autre part, ceux que Max Skladanowski réalise avec son Bioscope. Mais c'est un photographe (il sera bientôt le photographe attitré de la Cour), Peter Elfelt, qui au cours de l'hiver 1896-97 tourne le premier film danois, un reportage de 17 mètres : Des chiens groenlandais tirent un traîneau (Kørsel med grønlandske hunde). Entre 1897 et 1914, Elfelt aura mis à son actif près de 200 documentaires pris en extérieur (dont la longueur n'excédera jamais 100 mètres). Mais il est aussi le premier à expérimenter le film de fiction avec l'Exécution capitale (Henrettelsen), montrant une mère meurtrière de ses dix enfants conduite à la guillotine. Ces débuts relativement modestes ne laissaient guère présager que, moins de neuf ans plus tard, les productions danoises conquerraient le marché européen, menaçant même sérieusement l'empire des frères Pathé. Cette soudaine et imprévisible extension est due essentiellement à l'activité débordante de la Nordisk Films Kompagni, société fondée en 1906 par Ole Olsen – le véritable « père » du cinéma danois – et de Arnold Richard Nielsen, lequel produira dès 1907 de très nombreux documentaires romancés et des drames sociaux, dont le caractère à la fois osé et pathétique attirera très rapidement les foules européennes. En 1910, les Danois dominent non seulement les marchés scandinave, allemand et russe mais réussissent également à concurrencer en France, en Grande-Bretagne et en Italie les productions nationales. À la Nordisk s'ajoutent d'autres sociétés comme la Fotorama, la Biorama, la Kinografen, la Kosmorama. Parmi les noms des pionniers du cinéma danois, il faut citer Viggo Larsen* (la Chasse au lion, 1907 ; la Dame aux camélias, id.), Holger Rasmussen, Eduard Schnedler-Srensen, Alfred Lind et Robert Dinesen (également acteur célèbre). Mais les quatre cinéastes qui demeurent les plus représentatifs de l'époque sont incontestablement August Blom*, Urban Gad*, Holger-Madsen* et Benjamin Christensen*.

August Blom s'orienta vers le mélodrame, mêlant les plaidoyers les plus vibrants en faveur des suffragettes ou des filles mères à l'exploitation du pittoresque des bas-fonds. Ce romantisme de la prostitution s'accompagne tout naturellement d'un moralisme convaincu. Blom tourne pour la Nordisk d'Ole Olsen la Traite des blanches (1910) – thème à la mode puisque la même année Alfred Lind avait tourné un autre film au titre identique –, Aux portes de la prison (1911), la Fin du monde (Verdens Undergang, 1916). Urban Gad lance la vogue du drame mondain, de l'adultère tragique, des catastrophes engendrées par les débordements de la passion et dont l'issue est inévitablement la mort ou la déchéance. C'est à lui que l'on doit la découverte d'Asta Nielsen*, la Duse du Nord, la Sarah Bernhardt danoise qu'il lance, si l'on ose dire, dans l'Abîme (1910), et la propagation du mythe de la vamp que recueilleront peu de temps après les Français (avec Musidora), les Italiens (avec Lyda Borelli) et les Américains (avec Theda Bara). Chez Holger-Madsen, on retrouve, à travers un mysticisme luthérien quelque peu morbide, la hantise du péché et des préoccupations spiritualistes et occultes : Rêve d'opium (1914), l'Évangéliste (id.), les Spirites (1915). Quant à Benjamin Christensen, il réalise l'X mystérieux (1913) et la Nuit de la vengeance (1915) avant de tourner, en Suède, le célèbre la Sorcellerie à travers les âges (1921). Avec une production d'environ 150 longs métrages par an (où la Nordisk se taillait la part du lion), le Danemark est, de 1910 à 1916, l'un des plus importants producteurs mondiaux.

Malgré l'outrance des scénarios et le jeu théâtral des acteurs (Asta Nielsen* Valdemar Psilander* Clara Wieth-Pontoppidan, Olaf Fønss, Lily Bech* Betty Nansen, Carlo Wieth), le cinéma danois, grâce à quelques réalisateurs inspirés, à des opérateurs de talent – le meilleur fut sans doute Johan Ankerstjerne* – et à des décorateurs minutieux et inventifs, a été l'un des premiers dans le monde à utiliser à bon escient la puissance d'émotion et de mystère contenue dans l'image cinématographique.

Les années de retrait.

L'évolution de la production danoise est freinée en 1917 par la constitution de la puissante UFA allemande puis, deux ans plus tard, par la formation de la Svensk Filmindustri en Suède. La chute est régulière et impressionnante : 152 films en 1916, 103 en 1917, 83 en 1918, 66 en 1919, 41 en 1920, 21 en 1921, 12 en 1924, 6 en 1926 et 2 en 1930. Cette période de décadence est néanmoins compensée par l'apparition de nouveaux talents dont le plus célèbre est incontestablement Carl Dreyer*, qui débute en 1918 avec le Président, suivi par Feuillets arrachés au livre de Satan. Après avoir tourné en Suède et en Allemagne, Dreyer revient au Danemark et réalise notamment le Maître du logis (1925) avant de s'expatrier à nouveau en France (pour la Passion de Jeanne d'Arc, 1928, et Vampyr, 1932). Mais, en dehors de Dreyer, d'autres cinéastes s'imposent : Anders Wilhelm Sandberg* avec le Clown (1917) et une série de films inspirés par Dickens (les Grandes Espérances, 1921 ; David Copperfield, 1922 ; la Petite Dorrit, 1924) ; Lau Lauritzen Sr, qui, avec les acteurs Harald Madsen et Carl Schenstrm (Double-Patte et Patachon), réalise plusieurs œuvres comiques dont la popularité sera même internationale.