Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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OSCARSSON (Per)

acteur et cinéaste suédois (Stockholm 1927).

Il s'impose très vite sur la scène du Théâtre royal dramatique de Stockholm comme l'un des grands acteurs de sa génération. Au cinéma, on le voit notamment dans des films de Gösta Werner (la Rue, 1949 ; Rencontre avec la vie, 1952), Alf Sjöberg (Barabbas, 1953 ; Karin Månsdotter, 1954 ; les Oiseaux sauvages, 1955) et Arne Mattsson (le Mannequin de cire, 1962), mais ce n'est que vers le milieu des années 60 qu'il rencontre une renommée internationale en interprétant successivement le Mythe (Jan Halldoff, 1965), Ma sœur mon amour (V. Sjöman, 1966), les Feux de la vie (J. Troell, id.) et surtout la Faim (H. Carlsen, id.), où il compose un extraordinaire portrait d'écrivain (d'après le récit autobiographique de Knut Hamsun), hanté par le doute et l'angoisse, secoué par des éclats d'orgueil et de désespoir, acculé à la misère la plus noire, allant jusqu'à disputer aux chiens les os trouvés au cours de ses déambulations dans les rues et les jardins de Christiania, l'ancienne Oslo. Il remporte avec ce film le prix d'interprétation au festival de Cannes. Protagoniste principal de Docteur Glas (M. Zetterling, 1967) et de Ole Dole Dorff (Troell, 1968), il travaille ensuite en Grande-Bretagne et en Allemagne, tourne avec Géraldine Chaplin la Madriguera (1969), sous la direction de Carlos Saura, et s'essaye à la mise en scène (Ebon Lundin, 1973 ; la Bataille de Suède [Sverige åt svenskarna], 1980, une comédie bouffonne où il joue lui-même les quatre rôles principaux).

OSHII (Mamoru)

cinéaste japonais (Tokyo 1952).

Entré en 1977 dans une compagnie de télévision privée, il étudie les techniques d'animation sur plusieurs séries, avant de devenir chef de production au « Pierrot Studio » en 1979. Dès 1983, il tourne deux longs métrages de la série Urusei yatsura, et devient indépendant en 1985, réalisant un film de fiction « live » en 1987 : les Lunettes rouges (Akai megane), qui sera suivi de deux autres (Kerupelos, 1991, et Talking Heads, 1992). Mais c'est dans le film d'animation qu'il bâtira sa réputation, au même titre que son collègue K.Otomo, avec Patlabor (Kido keistatsu/Patlabor,) à la télévision en 1990 et au cinéma en 1993, tout en tournant plusieurs films en OAV (Original Animation for Video). Sa réputation internationale lui viendra grâce à Ghost in the shell (Kokaku kidotai, 1995), où il crée un univers fantastique dérivé du manga. Avalon (id. 2000), est une science-fiction « live » tournée en Pologne.

OSHIMA (Nagisa)

cinéaste japonais (Kyoto 1932).

Orphelin de père à l'âge de six ans, il passe sa jeunesse à Kyoto, aux côtés de sa mère et de sa sœur cadette. Il fait des études de droit et de politique à l'université de Kyoto, d'où il sort diplômé en 1954, année même où il entre aux studios d'Ofuna de la Shochiku. Il y devient assistant réalisateur, notamment avec Yoshitaro Nomura et Masaki Kobayashi, et Hideo Oba, jusqu'en 1959. Il écrit alors onze scénarios originaux, publiés dans la revue des assistants de la Shochiku, ainsi que des critiques cinématographiques, axées entre autres sur les films des « nouvelles vagues » française et polonaise. En 1959, la compagnie lui permet de tourner son premier film le Quartier de l'amour et de l'espoir / le Garçon vendeur de colombes, suivi immédiatement de Contes cruels de la jeunesse, et de l'Enterrement du soleil (1960), films au sujet et au style neufs et énergiques qui le désignent comme l'un des chefs de file de la « nouvelle vague » de la Shochiku, avec Yoshida et Shinoda. Mais son film suivant, Nuit et brouillard du Japon (1960), intitulé ainsi en hommage au film d'Alain Resnais, tourné pratiquement à l'insu de la Shochiku, et traitant d'un sujet politique brûlant, puisque lié aux événements violents de 1960 concernant le renouvellement du traité nippo-américain et ses retombées politiques, cause un scandale. Prétextant l'assassinat du dirigeant socialiste Inejiro Asamura lors de la sortie du film, la compagnie le retire de l'affiche au bout de quatre jours. Oshima quitte la Shochiku avec fracas et, tout en poursuivant diverses activités littéraires, aborde la production indépendante avec le Piège / Une bête à nourrir, 1961, d'après Kenzaburo Oe. Mais l'échec commercial d'un film produit par la Toei en 1962, Amakusa Shiro Tokisada, consacré à la révolte des chrétiens au XVIIe siècle, le réduit au silence pendant trois ans, ce qui lui permet de faire de la télévision (notamment avec Une armée oubliée, 1963) et d'écrire de très nombreux articles. C'est vers 1965 qu'il refait vraiment surface au cinéma, ayant créé sa propre compagnie indépendante, la Sozo-Sha, avec l'aide de sa femme, l'actrice Akiko Koyama, qu'il a entre-temps épousée. Il tourne alors plusieurs films, plus ou moins « scandaleux », qui s'attaquent à divers « tabous » du Japon moderne, en particulier le sexe et le crime, deux de ses thèmes récurrents, tout en renouvelant radicalement le langage cinématographique des films progressistes des années 50 : l'Obsédé en plein jour (1966), Traité des chansons paillardes japonaises (1967), Été japonais : double suicide contraint (id.), et surtout la Pendaison (1968), film traitant d'une façon très personnelle du problème coréen au Japon, en recourant à « l'imaginaire sartrien » (selon son auteur même), et qui révèle son nom en Europe. Poursuivant dans cette voie, Oshima tourne encore Journal d'un voleur de Shinjuku (1968, en hommage à Jean Genet), le Petit Garçon (1969), Il est mort après la guerre (1970), et surtout la Cérémonie (1971), sorte de film-somme retraçant 25 ans d'histoire du Japon à travers le destin éclaté d'une famille patricienne.

Pourtant, le déclin des productions indépendantes à la fin des années 60 se précise, et, après Une petite sœur pour l'été, Oshima dissout sa compagnie et pense alors abandonner le cinéma. C'est paradoxalement grâce à la collaboration d'un producteur français, Anatole Dauman, qu'Oshima peut tourner ce qui deviendra son plus grand succès international, l'Empire des sens (1976), basé sur un fait divers « scandaleux » de 1936, et où il s'attaque délibérément au tabou du sexe et aux censeurs, en filmant pour la première fois au Japon des actes sexuels réels. La sortie du film au Japon, en version émasculée (si l'on ose dire), provoque un long procès, gagné en partie par le cinéaste. Il tourne encore l'Empire de la passion (1978, prix de la mise en scène à Cannes), sorte de complément du précédent, Furyo (1983, avec David Bowie) et Max mon amour (1986), mais se consacre également à la télévision, avec Kyoto, My Mother's Place (1991) et Cent Ans de cinéma (1995). Il revient au cinéma en 2000 après treize ans d'absence, en réalisant un film de samouraï, une adaptation d'un roman de Ryotaro Shiba, Tabou (Gohatto). Nagisa Oshima constitue sans aucun doute la figure de proue de ladite « nouvelle vague » au Japon, et le partisan d'une notion exacerbée du cinéma d'auteur.