Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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SCHIFRIN (Boris, dit Lalo)

musicien américain (Buenos Aires, Argentine, 1932).

Jazzman consacré en Argentine au cours des années 50, il part pour New York en 1958 et pour Hollywood en 1962, où il devient arrangeur et pianiste de Dizzy Gillespie, Stan Getz et Sarah Vaughan. Il s'affirme vite comme un compositeur prolifique à la TV, qui l'appelle pour composer des leitmotive agréablement faciles à retenir (Mission impossible, Mannix, le Virginien). Le Kid de Cincinnati (N. Jewison, 1965) le fit remarquer au cinéma. Ses compositions sont simples mais soulignent très efficacement une atmosphère. On préférera ses airs vifs pour Luke la Main froide (S. Rosenberg, 1967), Bullitt (P. Yates, 1968), THX 1138 (G. Lukas, 1971), l'Inspecteur Harry (D. Siegel, id.), à la musique plus ampoulée qu'il réserva à la Peau (L. Cavani, 1981). Ces dernières années, une de ses spécialités semble être les films à suspense angoissant (Airport 80 Concorde [Airport 80-The Concorde], David Lowell Rich, 1979), les films d'horreur (Amityville/la Maison du diable, Rosenberg, id. ; Amityville 2/le Possédé, D. Damiani, 1982) et d'espionnage (le Quatrième Protocole [The 4th Protocol], John Mackenzie, 1987).

SCHILDKRAUT (Joseph)

acteur américain d'origine autrichienne (Vienne 1895 - New York, N. Y., 1964).

Fils de l'acteur Rudolph (ou Rudolf) Schildkraut, lui aussi actif aux États-Unis, il débute en 1915, en Allemagne, et en 1922, à Hollywood, dans les Deux Orphelines (D. W. Griffith), où sa création de roué presque sadien est mémorable. Grand acteur de théâtre et de cinéma, il ne rencontre pas, cependant, à l'écran les consécrations que la scène lui vaut. Il est un sobre Dreyfus dans la Vie d'Émile Zola (W. Dieterle, 1937), composition récompensée par l'Oscar du meilleur second rôle masculin. Il se tire avec brio de rôles d'aristocrate décadent, proches de ceux tenus au temps de sa collaboration avec Griffith : le duc d'Orléans dans Marie-Antoinette (W. S. Van Dyke, 1938) ou Fouquet dans The Man in the Iron Mask (James Whale, 1939). Pour mémoire, il se fait remarquer dans un rôle de composition exotique — celui d'un Algérien — face à Marlene Dietrich, dans le Jardin d'Allah (Richard Boleslawski, 1936). Il se retire en 1948, puis reparaît dans le rôle du père du Journal d'Anne Frank (G. Stevens, 1959). Auteur d'une autobiographie : My Father and I (1959).

SCHILLING (Niklaus)

cinéaste suisse (Bâle 1944).

Graphiste et décorateur, il réalise des essais expérimentaux et devient chef opérateur pour quelques-uns des premiers films de Rudolf Thome, Klaus Lemke, Jean-Marie Straub. Il dirige son premier long métrage, en 16 mm, l'Ombre de la nuit (Nachtschatten, 1971). En 1976, il réalise l'Expulsion du paradis (Die Vertreibung aus dem Paradies), qui est à la fois une fiction très originale et une parabole sur la misère du cinéma commercial allemand. En 1980, il présente le Reportage de Willi Busch (Der Willi Busch Report), tourné à la frontière entre les deux Allemagnes. Il est également l'auteur de Rheingold (1977), Zeichen und Wunder (1981), Lumière fatale (Der Westen leuchtet, 1982) , la Femme sans corps et le projectionniste (Die Frau ohne Körper und der Projektionist, 1983), le Revenant (Der Atem, 1989). Il a donné une suite à son film de 1980, le retour de Willi Busch s'effectuant dans la liesse de la réunification : Nuit blanche (Deutschfieber, 1992).

SCHLESINGER (John)

cinéaste britannique (Londres 1926).

Fils d'un pédiatre, Schlesinger envisage d'abord une carrière d'architecte. Il entre dans le monde du spectacle pendant la Seconde Guerre mondiale, dans des shows pour les armées. Ensuite, à l'université d'Oxford, il participe comme acteur à des pièces de théâtre montées par les étudiants et commence à tourner de petits films. On le retrouve à la BBC-TV, en 1957, metteur en scène pour des séries documentaires et quelques épisodes de The Valiant Years, consacrés à Churchill. En tant qu'acteur, il continue d'apparaître dans des films comme la Bataille du Rio de la Plata (M. Powell et E. Pressburger, 1956) et Brothers in Law (R. Boulting, 1957). C'est en 1961 qu'on le remarque en tant que metteur en scène de cinéma, avec un moyen métrage, Terminus, documentaire sur l'atmosphère de grisaille quotidienne de la Waterloo Station à Londres (il obtient un Lion d'or à Venise). Son association avec le producteur Joseph Janni le conduit à réaliser Un amour pas comme les autres (A Kind of Loving, 1962), mélodrame sombre dénonçant le conformisme suburbain et la vie sordide dans une communauté du nord de l'Angleterre, qui s'inscrit dans la tradition du Free Cinema. Avec Billy le Menteur (Billy Liar, 1963), adaptation de la pièce de W. Hall et K. Waterhouse, rendue plus authentique par un tournage en lieux réels dans les rues de Bradford (Yorkshire), il fait découvrir au grand public Julie Christie, aux côtés de Tom Courtenay. Conscients de son talent et de sa photogénie, Schlesinger et Janni construisent leurs films suivants autour de la jeune actrice : Darling (id., 1965), d'après un scénario à l'amertume acerbe, de Frederic Raphael. Julie Christie (Oscar pour ce rôle), Loin de la foule déchaînée (Far From the Madding Crowd, 1967), adaptation réussie du roman de Thomas Hardy évoquant l'ennui de la vie rurale anglaise.

Schlesinger part alors pour Hollywood. Macadam cow-boy (Midnight Cow Boy, 1969) est un point culminant dans sa carrière (Oscar du meilleur film) : à travers les tribulations tragi-comiques de deux amis à la dérive, qui tentent de survivre dans la jungle de New York, c'est l'une des premières transpositions commerciales de l'univers et des sujets (prostitution masculine, par exemple) du cinéma underground, et plus particulièrement des réalisations d'Andy Warhol. Mais ses films suivants sont décevants. Le Jour du fléau (The Day of the Locust, 1975), adaptation assez plate du roman incisif de Nathanael West sur le Hollywood des années 30, Honky Tonk Freeway (1981) furent des échecs. Seul Marathon Man (id., 1976), thriller très tendu à propos d'anciens nazis vivant tranquillement à New York, fut un succès.

Le contexte britannique semble mieux lui convenir. En témoignent les deux films qu'il a réalisés en Grande-Bretagne pendant la même période. Un dimanche comme les autres (Sunday Bloody Sunday, 1971) reste une des représentations les plus sensibles et les plus nuancées de l'homosexualité dans le cinéma de l'époque ; Yanks (1979) fait le portrait chaleureux d'un petit village anglais pendant la Seconde Guerre mondiale, où des liens s'établissent de manière impalpable entre la population locale et les soldats américains stationnés dans la région.