Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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TIRAGE. (suite)

Tirage et qualité de l'image.

Dans le tirage contact, qui est le processus « normal » de tirage, la reproduction la plus fidèle s'obtient en plaçant l'émulsion du film vierge au contact de celle du film à copier, de façon à éviter la diffusion de la lumière lors de la traversée du support. Le négatif ayant (pour la même raison) son émulsion tournée vers l'objectif de la caméra de prise de vues, l'image portée par les copies positives d'exploitation se trouve de l'autre côté du support par rapport à l'objectif du projecteur : la projection s'effectue à travers le support, contrairement aux films inversibles d'amateur, où c'est le film de prise de vues lui-même que l'on projette.

Tout tirage entraîne une certaine dégradation de la qualité de l'image : diminution de la finesse des détails, accroissement de la granulation apparente, désaturation des couleurs, etc.

On limite donc autant que possible le nombre des tirages intermédiaires préludant au tirage des copies d'exploitation. L'idéal serait de tirer ces copies d'après le négatif issu de la prise de vues. On procède parfois ainsi, mais on préfère généralement, par souci de sécurité, tirer les copies d'après un internégatif, copie du négatif original. Le processus traditionnel passe par le tirage d'un interpositif puis de l'internégatif, soit deux tirages intermédiaires. Un processus plus récent permet d'obtenir directement l'internégatif par copie du négatif original sur film inversible. Il n'y a plus qu'un seul tirage intermédiaire mais, en raison de la suppression d'une étape, le tirage des copies s'effectue alors à travers le support : on perd d'un côté ce qu'on gagne de l'autre.

TIREUSE.

Appareil destiné au tirage des films. Tireuse contact, tireuse où le film vierge et le film à copier défilent en contact devant la source de lumière. Tireuse optique, tireuse où un objectif forme sur le film vierge l'image du film à copier. Tireuse continue, tireuse contact dans laquelle les films défilent de façon continue. Tireuse alternative, tireuse contact dans laquelle les films avancent image par image.

TISSÉ (Édouard [Eduard Kazimirovič Tissé])

chef opérateur et cinéaste soviétique (Liepaja, Lettonie, 1897 - Moscou 1961).

Se destinant à la peinture, il achève ses études (art et photographie) en 1914 et fait ses débuts d'opérateur au front. De 1916 à 1918, il est correspondant cinématographique officiel. De 1918 à 1923, il travaille pour le Comité panrusse du cinéma (VFKO) de Moscou. Il tourne des documents d'actualité, des reportages sur la guerre civile (de concert avec Lev Koulechov notamment) et quelques bandes de vulgarisation scientifique. Il a photographié le premier Premier Mai (1918) à Moscou, les principales interventions publiques de Lénine, le premier film soviétique de fiction : ‘ Signal ’ (id.), et il fut du premier « agittrain », le train Lénine, sur le front oriental (id.). Ses prises de vues alimentent alors le Kino-Nédélia de Dziga Vertov. Dès ses premiers travaux, Tissé s'attache à varier les angles et les distances, prend en compte le montage ultérieur des plans (« montage instantané »), recherche la plus grande expressivité du cadre, veille à la plastique de l'image et cultive l'effet poétisant de la lumière de contre-jour. Lié d'amitié, au moment de la Grève (1924), avec Eisenstein, qu'il suivra fidèlement dans ses voyages en Europe, aux États-Unis, au Mexique, il a photographié tous ses films sans exception (pour Ivan le Terrible, les extérieurs seulement). Le meilleur de sa carrière et de son talent créateur demeure indissociablement attaché à l'œuvre eisensteinienne ; toutefois, sa marque se retrouve fortement dans Aérograd (1935) de Dovjenko. Des cinq films que Tissé a signés comme réalisateur se détache ‘ Misères de femmes, joies de femmes ’ (1929-30), tourné en Suisse, et traitant des dangers de l'avortement clandestin.

Principaux films :

‘ Signal ’ (Signal, V. Gardine, 1918) ; ‘ Sur la terre des moujiks ’ (Na mužickoj zemle, Boris Tchaikovski, 1920) ; Faim, faim, faim (Gardine et V. Poudovkine, 1921) ; la Faucille et le Marteau (id.) ; le Bonheur juif (A. Granovski, 1925) ; ‘ Misères de femmes, joies de femmes ’ (Frauennot, Frauenglück, E. Tissé, 1929-30) ; Moscou-Karakoum-Moscou (Moskva-Kara-Koum-Moskva, Tissé et Roman Karmen, 1933) ; Aérograd (A. Dovjenko, 1935) ; le Pays des Soviets (E. Choub, 1937) ; Rencontre sur l'Elbe (G. Alexandrov, 1949) ; Glinka (id., 1952) ; ‘ Poussière d'argent ’ (A. Room, 1953) ; ‘ Garnison immortelle ’ (Bessmertnyj garnizon, Zakhar Agranenko, 1956) — et tous les films d'Eisenstein.

TISSIER (Jean)

acteur français (Paris 1896 - Granville 1973).

Avec plus de 150 films, autant de pièces ou revues à la belle époque du Boulevard, un livre de souvenirs (Sans maquillage, 1945), il fait partie intégrante du paysage comique français du cinéma parlant, avec sa voix mielleuse, son air ahuri et son regard somnolent. Son premier film porte un titre qui est tout un programme : le Monde où l'on s'ennuie (Jean de Marguenat, 1935). Dans le dernier, Sex-shop (C. Berri, 1972), il est un vieil érotomane fatigué... Entre-temps, une foule d'apparitions funambulesques, dont on retiendra le confident déluré de Battement de cœur (H. Decoin, 1940), le trafiquant homosexuel de l'Enfer des anges (Christian-Jaque, 1939) et l'inquiétant fakir de L'assassin habite au 21 (H.-G. Clouzot, 1942). Il aurait souhaité jouer Alceste. Il ne fut, et ce n'est pas tout à fait négligeable, que le nonchalant qui passe...

TISSOT (Alice)

actrice française (Paris 1895 - id. 1971).

C'est à la fois la belle-mère type et la vieille fille idéale du cinéma français, qu'elle traverse depuis les films de Feuillade et de Poirier jusqu'à une ultime apparition dans le Jour le plus long en 1962. Bottines, chignon, pince-nez ou face-à-main, guimpe et collet monté, elle a joué de tous ces accessoires et d'une bonne humeur communicative. Parmi des centaines de titres, citons : les Deux Gamines (L. Feuillade, 1920 ; puis R. Hervil, 1936), la Cousine Bette (Max de Rieux, 1927), Un chapeau de paille d'Italie (R. Clair, 1928), Cagliostro (R. Oswald, 1929), la Maternelle (J. Benoît-Lévy, 1933), l'Appel du silence (L. Poirier, 1936), Ces dames aux chapeaux verts (M. Cloche, 1937) et des vaudevilles de Maurice Cammage, Pierre Caron, Christian-Jaque et Pierre Colombier.