Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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DE HAVILLAND (Olivia)

actrice anglaise naturalisée américaine (Tokyo, Japon, 1916).

Née au Japon, Olivia De Havilland regagne les États-Unis à l'âge de deux ans avec sa sœur cadette, Joan Fontaine. Elle interprète divers spectacles avec les Community Players de Saratoga, dont le Songe d'une nuit d'été, qu'elle reprend en 1934 au Hollywood Bowl, sous la direction de Max Reinhardt. Ce dernier la retient pour jouer le rôle d'Hermia dans l'adaptation cinématographique de cette pièce (CORÉ William Dieterle, 1935). Elle est alors prise sous contrat par la Warner Bros et choisie comme partenaire d'Errol Flynn dans Capitaine Blood (M. Curtiz, 1935). Elle forme avec ce comédien un des grands couples romantiques des années 30, s'illustrant sous la direction du même Curtiz dans la Charge de la brigade légère (1936), les Aventures de Robin des Bois (1938), Quatre au paradis (id.), les Conquérants (1939), la Vie privée d'Élisabeth d'Angleterre (id.), la Piste de Santa Fé (1940), et sous la direction de Raoul Walsh dans la Charge fantastique (1941). Dans ces films, qui figurent parmi les plus représentatifs de la production épique Warner, Olivia De Havilland incarne le plus souvent une jeune aristocrate ou une « garçonne » naïve, que l'amour révèle à elle-même et rend capable des plus nobles sacrifices. Ses personnages, d'un naturel tendre (n'excluant pas une certaine malice), sont faits pour aimer, et surtout pour endurer, comme ceux qu'elle tourne à la même époque chez Selznick (Autant en emporte le vent, V. Fleming, 1939) ou à la Paramount (Par la porte d'or, M. Leisen, 1941).

Malgré des succès personnels incontestables, Olivia De Havilland voit, à la Warner, les rôles « forts » échoir à Bette Davis. En 1943, elle remporte contre cette firme un procès qui aura une incidence majeure dans la législation hollywoodienne. Après deux années de mise à l'index, elle tourne la Double Énigme (R. Siodmak, 1946), qui lui permet de prouver son aptitude aux rôles dramatiques. Elle obtient la même année l'Oscar pour À chacun son destin de Mitchell Leisen, où elle aborde son premier emploi de femme mûre. Après le tour de force de la Fosse aux serpents (A. Litvak, 1949), l'Héritière (deuxième Oscar, sous la direction de William Wyler, id.) et Ma cousine Rachel (H. Koster, 1953) révèlent une finesse et une disposition à l'ambiguïté : deux qualités rarement exploitées chez elle.

La troisième partie de sa carrière, moins fournie, caricature à la fois les traits masochistes (Une femme dans une cage [Lady in a Cage], Walter Grauman, 1964) et potentiellement maléfiques du personnage Havilland (Chut, chut, chère Charlotte, R. Aldrich, 1965). Les années 70 ne lui offrirent que de brèves apparitions dans des productions comme les Naufragés du 747 (Jerry Jameson, 1977) et l'Inévitable Catastrophe (I. Allen, 1978), aux titres appropriés. Depuis 1956, l'actrice séjourne principalement à Paris. Elle a tiré de son expérience parisienne un livre d'anecdotes, Every Frenchman Has One (1961).

DEHELLY (Suzanne)

actrice française (Paris 1902 - id. 1968).

Ses succès au théâtre, au cabaret et dans l'opérette l'amènent au studio, où, dans la première partie d'une carrière bien remplie, elle ne trouve que de médiocres rôles dans de médiocres films signés René Pujol, Pierre Caron, Maurice Cammage ou Fernand Rivers. Deux exceptions avec La crise est finie (R. Siodmak, 1934) et Arsène Lupin détective (H. Diamant-Berger, 1937). Épouse du scénariste Marcel Rivet, elle évolue, à partir de l'Idole (Alexandre Esway, 1948), vers des compositions sobres et parfois émouvantes (Au grand balcon, H. Decoin, 1949 ; Olivia, J. Audry, 1951 ; La nuit est mon royaume, G. Lacombe, id.).

DE HEER (Rolf)

cinéaste australien d'origine néerlandaise (1951).

Rolf De Heer grandit à Sumatra, puis ses parents s'installent en Australie. Après quelques expériences théâtrales au lycée, il abandonne ses études pour se lancer dans la carrière d'acteur de cinéma. Après quelques emplois divers, il change d'orientation. Il sera réalisateur. À peine sorti de l'école, il réalise son premier film, Tail of a Tiger (1984). Le public français le découvre en 1995 avec Bad Boy Bubby (id.). Son film suivant, The Quiet Room (la Chambre tranquille, 1996) bien que salué par la critique, ne reste que très peu de temps à l'affiche. Avec Bad Boy Bubby (prix spécial du jury à Venise, en 1993), Rolf De Heer signe une œuvre étrange et décapante dans laquelle il expose les frontières de la « normalité ». Il atteint dans ce domaine une intensité aux limites du supportable dans Dance Me to My Song (id. 1998). Car pour servir son idéologie de tolérance, il n'hésite pas à mettre en scène de vrais handicapés dans ses films (Bad Boy Bubby, Dance Me to My Song) et se définit lui-même comme un cinéaste de l'humain.

DEHN (Paul)

scénariste britannique (Manchester 1912 - Londres 1976).

Cet ancien critique cinématographique obtint l'Oscar du meilleur scénario pour Ultimatum (J. et R. Boulting, 1950). Depuis, il a signé les scénarios de films à grande diffusion internationale comme Ordre de tuer (A. Asquith, 1958) ; Goldfinger (G. Hamilton, 1964) ; l'Espion qui venait du froid (M. Ritt, 1965) ; la Nuit des généraux (A. Litvak, 1967) ; la Mégère apprivoisée (F. Zeffirelli, id.) ; le Secret de la planète des singes (T. Post, 1970) ; la Conquête de la planète des singes (J. L. Thompson, 1972) ; le Crime de l'Orient-Express (S. Lumet, 1974).

DEKEUKELEIRE (Charles)

cinéaste belge (Ixelles 1905 - Bruxelles 1971).

D'abord critique cinématographique, il s'impose, à la charnière de la deuxième et de la troisième avant-garde, avec des films expérimentaux puis, le parlant venu, s'oriente vers le documentaire industriel ou civique de commande. Étonnant précurseur, il anticipe dès la fin du muet le cinéma le plus moderne : Impatience (1928) fonctionne déjà comme beaucoup de films underground ; Histoire de détective (1929) devance le Jean-Luc Godard de Week-end (1967). Il a laissé plusieurs ouvrages de réflexion. Du ciné-œil de Vertov, il tire la technographie : usage documentaire du cinéma propre à réconcilier l'individu avec la société. C'est une étrange synthèse de matérialisme et d'idéalisme, partagée entre l'illuminisme d'un Jean Epstein et le rationalisme d'un Dziga Vertov.