Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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PICHEL (Irving)

cinéaste américain (Pittsburgh, Pa., 1891 - Los Angeles, Ca., 1954).

Acteur de théâtre, employé au « script department » de la MGM (1927) puis acteur de cinéma, il incarne Staline dans Agent britannique (M. Curtiz, 1934) et joue, la même année, le rôle d'Apollodorus dans Cléopâtre de Cecil B. De Mille. Il débute dans la mise en scène aux côtés d'Ernest Schoedsack avec les Chasses du comte Zaroff (1932). Ensuite, il a signé seul quelques films à budget modeste, notamment des mélodrames, pour la Republic, puis pour diverses firmes plus importantes : Demain viendra toujours (Tomorrow Is for Ever, 1946, avec Orson Welles et Claudette Colbert) ; le Miracle des cloches (Miracle of the Bells, 1948) ainsi que quelques films de guerre : les Héros dans l'ombre (O. S. S., 1946), ou de science-fiction : Destination Lune (Destination Moon, 1950). Ce réalisateur assez renommé à Hollywood, mais qui eut quelques démêlés avec le maccarthysme, manque de personnalité artistique. L'un de ses derniers films fut une biographie de Martin Luther (1953).

PICKFORD (Gladys Smith, dite Mary)

actrice américaine (Toronto, Ontario, Canada, 1893 - Santa Monica, Ca.., 1979).

Elle fut, selon Adolphe Zukor, la première des grandes vedettes du cinéma muet, connue sous le slogan fétiche de « la petite fiancée du monde ». Vingt ans durant, de 1909 à 1929, elle représenta l'archétype de la femme-enfant, dont le public a toujours raffolé, et de ce fait marqua durablement l'histoire du cinéma, non seulement, comme l'écrit Jean Mitry, « par son talent, sa grâce primesautière, ses élans juvéniles, mais encore parce qu'elle fut l'incarnation quasi mythique d'une société et d'une époque ».

Elle était montée sur les planches dès l'âge de six ans, aux côtés de sa sœur Lottie et de son frère Jack, sous la houlette de leur mère, l'avisée Charlotte Smith (qui restera jusqu'à la fin son manager attitré). On la vit dans The Littlest Girl, la Case de l'oncle Tom, Little Red Schoolhouse et autres pièces édifiantes. The Warrens of Virginia, qu'elle joue à New York en 1907 dans la troupe de David Belasco, confirme sa réputation d'enfant prodige et l'incite à tenter sa chance au cinéma (bien que ce dernier eût encore assez mauvaise presse auprès des gens de théâtre). Elle a la chance de se faire remarquer par Griffith, qui lui fait faire un bout d'essai dans sa série burlesque, The Jones Family, mais elle n'est pas encore vedette. Cela viendra vite, Griffith voyant en elle l'adolescente rêvée — souvent en butte aux manigances des adultes — dans les films qu'il prépare pour la Biograph, et qui vont leur assurer la célébrité à tous deux : The Lonely Villa ; The Little Darling ; The Little Teacher ; An Arcadian Maid ; Wilful Peggy, etc. En 1911, elle quitte la Biograph pour l'IMP (Independant Motion Pictures) de Carl Laemmle. Elle y tourne quelques films sous la direction de Thomas Ince et George Loane Tucker. Puis elle passe à la Majestic Pictures de Harry Aitken, avant de retrouver son mentor, Griffith, à la Biograph. On la voit dans Lena and the Geese (dont elle a écrit elle-même le scénario), A Pueblo Legend, My Baby et surtout The New York Hat, où elle est inoubliable en orpheline en proie à la bigoterie de son village. On la retrouve au théâtre en 1913, dans une adaptation d'Un bon petit diable de la comtesse de Ségur (un film en sera tiré la même année). Ses triomphes à l'écran vont désormais se succéder. Elle est engagée à la Paramount, dont elle devient l'un des piliers. Son salaire de début est de mille dollars par semaine, il sera multiplié par dix au bout de deux ans. En 1919, consécration suprême, elle est aux côtés de David Wark Griffith, Charles Chaplin et Douglas Fairbanks pour la fondation des Artistes Associés.

On ne peut guère que citer les titres de la cinquantaine de films, moyens ou longs métrages, qu'elle tourne entre 1914 et 1933, la plupart ayant disparu (une clause de son testament en prévoyait la destruction, tellement, paraît-il, elle s'y trouvait mauvaise). Mais ils suffisent à cerner ce que fut, pour une génération, son image de marque : Mademoiselle Cordon-bleu ; Romance d'autrefois ; l'Ange gardien ; Fille d'Écosse ; Une pauvre petite riche ; Petite Patriote ; Petite Princesse ; le Petit Lord Fauntleroy ; la Petite Annie ; Rosita... Beaucoup ne sont que des véhicules commerciaux, mais quelques-uns sont tout de même signés Allan Dwan, Maurice Tourneur, Cecil B. De Mille ou Lubitsch. Tous visent à mettre en relief son caractère de « petite fée », que copieront à l'envi Catherine Hessling, Shirley Temple, Judy Garland à ses débuts, et tant d'autres. Il est hors de doute que nous baignons là en plein stéréotype, encore que Jean Mitry puisse écrire que « contrairement à l'image d'une petite fille capricieuse et bonbon fondant illustrée par le Petit Lord Fauntleroy et une dizaine de films semblables, Mary Pickford incarna bien plus souvent une gamine des faubourgs, enfant abandonnée ou petite sauvageonne revêche et autoritaire. Ainsi Marie-les-Haillons, le Roman de Mary, l'Enfant de la forêt, Dans les bas-fonds, Tess au pays des tempêtes, etc., qui furent parmi ses meilleurs films ». Assez logiquement, en tout cas, elle ne put franchir le cap de la maturité (à la différence de Lillian Gish), et ses films d'« adulte » eurent peu de succès : la Mégère apprivoisée (S. Taylor, 1929, seul film où elle a pour partenaire son mari, Douglas Fairbanks) ; Kiki (id., 1931) et Secrets, le dernier, en 1933, signé Frank Borzage, où elle témoigne pourtant d'une grande sensibilité. Elle fera encore par la suite un peu de production, puis se retirera (immense) fortune faite.

C'était une héroïne de Dickens. À travers tous ses rôles, et surtout chez Griffith, qui reste son meilleur faire-valoir, elle n'a fait que jouer le même personnage : celui de la petite Dorrit. Elle avait reçu un Oscar pour son premier film parlant : Coquette (1929). Elle en obtiendra un autre, en 1975, par reconnaissance pour sa contribution à l'histoire du cinéma américain.

Films :

M. Jones Entertains (D. W. Griffith, 1909) sous le pseudonyme de Dorothy Nicholson ; The Violin Maker of Cremona (id., id.) ; The Lonely Villa (id., id.) ; The Country Doctor (id., id.) ; The Little Darling (id., id.) ; The Little Teacher (id., id.) ; The Renunciation (id., id.) ; To Save Her Soul (id., id.) ; A Romance of the Western Hills (id., 1910) ; Ramona (id., id.) ; White Roses (id., id.) ; The Sorrows of the Unfaithful (id., id.) ; Three Sisters (id., 1911) ; Their First Misunderstanding (T. Ince, id.) ; Little Red Riding Hood (James Kirkwood, id.) ; The Female of the Species (Griffith, 1912) ; The New York Hat (id., id.) ; Un bon petit diable (A Good Little Devil, E. S. Porter et J. Searle Dawley, 1913) ; Tess au pays des tempêtes (Tess of the Storm Country, id., 1914) ; Cinderella (Kirkwood, id.) ; Marie-les-Haillons (Rags, id., 1915) ; The Girl of Yesterday (A. Dwan, id.) ; Madame Butterfly (S. Olcott, id.) ; Fille d'Écosse (M. Tourneur, 1917) ; Une pauvre petite riche (id., id.) ; The Little American (C. B. De Mille, id.) ; Petit Démon (Rebecca of Sunnybrook, M. Neilan, id.) ; Stella Maris (Neilan, 1918) ; le Roman de Mary (Don't Ever Marry, id., 1919) ; Papa longues jambes (id., id.) ; The Hoodlum (S. Franklin, id.) ; Heart o' the Hills (id., 1919) ; Pollyanna (Paul Powell, 1920) ; le Petit Lord Fauntleroy (The Little Lord Fauntleroy, A. E. Green et Jack Pickford, 1921) ; Rosita (E. Lubitsch, 1923) ; les Moineaux (W. Beaudine, 1926) ; Coquette (S. Taylor, 1929) ; Secrets (F. Borzage, 1933).]