Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
C

CANTINFLAS (Mario Moreno Reyes, dit)

acteur mexicain (Mexico 1911 - id. 1993).

Comique de music-hall, il débute au cinéma dans No te engañes corazón (M. Contreras Torres, 1936). Il passe tout de suite du rôle de comparse, traditionnellement dévolu aux pitres dans le cinéma mexicain, à la tête d'affiche : Así es mi tierra et Águila o sol (A. Boytler, 1937), Ahí está el detalle (J. Bustillo Oro, 1940), Ni sangre ni arena (A. Galindo, 1941) sont des films réalisés par certains des metteurs en scène les plus actifs de cette période. L'immense popularité de Cantinflas dans le monde de langue espagnole est, à ses débuts, assez compréhensible : il incarne des personnages déclassés, rusés, irrévérencieux, dans la tradition picaresque. Le succès le pousse à s'attacher par contrat un tâcheron docile, Miguel M. Delgado (El gendarme desconocido, 1941), responsable de ses nombreux films ultérieurs. Le bavardage de Cantinflas se mue en discours moralisateur, la farce se perd en conformisme, l'invention s'estompe au profit d'une formule répétée à l'infini. Ce nouvel emploi de benêt domestiqué le reconduit à son point de départ, celui de faire-valoir, cette fois au service de Hollywood (le Tour du monde en 80 jours de M. Anderson, en 1956 ; Pepe de G. Sidney, en 1960).

CANTOR (Edward Israel Iskowitz, dit Eddie)

acteur américain (New York, N. Y., 1892 - Los Angeles, Ca., 1964).

Venu du théâtre, il s'adaptera mieux à la radio qu'au cinéma. Ses roulements d'yeux lui valent des rôles muets (tel Special Delivery, de W. Goodrich, en 1927, dont il écrit aussi le scénario), mais il faut attendre le parlant pour découvrir sa voix abusivement plaintive, son phrasé inventif et sa fantaisie malicieuse : Glorifying the American Girl (Milliard Webb, 1929) ; son goût du grivois le rapproche de Berkeley : Whoopee ! (Thornton Freeland, 1930), Palmy Days (E. Sutherland, 1931) ; le Roi de l'arène (L. McCarey, 1932) et Roman Scandals (F. Tuttle, 1933) les réunissent. Remerciez votre bonne étoile (D. Butler, 1943) et Quatre du music-hall (Show Business, Edwin L. Marin, 1944) mettent encore en évidence son humour saugrenu.

CANUDO (Riccioto)

écrivain, journaliste, dramaturge et critique italien (Gioia del Colle, Bari, 1879 - Paris 1923).

Il s'établit à Paris en 1902 (d'où son surnom en Italie de « Parisien »). Adepte de l'art moderne, il crée la revue littéraire Montjoie ! (1913-14) et se fait l'apôtre du cinéma, qu'il baptise « 7e art », et des cinéastes, qu'il nomme, avec moins de bonheur, « écranistes ». Il fonde en 1920 le Club des amis du 7e art, prototype des prochains ciné-clubs, soutient la « première avant-garde » dans sa Gazette des sept arts, lancée en 1923. Les historiens s'accordent pour voir en lui l'initiateur de l'esthétique du cinéma, ses premiers écrits sur le sujet remontant à 1908, mais cette priorité (son principal titre de gloire) semble devoir être partagée avec le Tchèque Václav Tille, auteur, en 1908 aussi, de réflexions moins poétiques mais plus sérieusement analytiques que celles de Canudo. Ses textes ont été rassemblés après sa mort par Fernand Divoire sous le titre : l'Usine aux images (Paris-Genève, 1927).

CANUTT (Enos Edward, dit Yakima)

cascadeur et cinéaste américain (Colfax, Wash., 1895 - Hollywood, Ca., 1986).

Champion du monde de rodéo de 1917 à 1923, il devient acteur dès 1922 ; à partir de 1931, il double John Wayne, dont il aide à modeler la personnalité à l'écran, Clark Gable (dans Autant en emporte le vent), Errol Flynn. Depuis que John Ford l'a chargé de la seconde équipe de la Chevauchée fantastique, il imagine, règle, exécute et filme des morceaux de bravoure restés célèbres, dans différents genres : antique avec Ben Hur (W. Wyler, 1959), Spartacus (S. Kubrick, 1960) et la Chute de l'Empire romain (A. Mann, 1964) ; historique avec Ivanhoé (R. Thorpe, 1952) et le Cid (A. Mann, 1961) ; aventure et western, sérieux ou comique, de Cat Ballou (E. Silverstein, 1965) à Equus (S. Lumet, 1977, date à laquelle il prend sa retraite). Il a également signé quelques films et serials. Il remporte un Oscar spécial en 1966 pour avoir été à la fois le pionnier des stuntmen et l'un de ses représentants les plus brillants.

ČÁP (František)

cinéaste tchécoslovaque (Čachovice 1913, Ledna, Yougoslavie, 1972).

Entré à dix-neuf ans à la Lucernafilm, il est d'abord acteur (Avant le bachot, V. Vaňcura et S. Innemann, 1932) puis scénariste (notamment sur des films réalisés par Hugo Haas, Otakar Vávra, Martin Frič et Miroslav Cikán), il passe à la mise en scène en 1939 (Un été de feu [Ohnivé léto], co : V. Krška). Sous l'Occupation, il adapte des œuvres classiques de la littérature tchèque, filme le monde de la bourgeoisie cosmopolite, les mœurs paysannes, l'émancipation des jeunes filles étouffées par les contraintes de leur milieu social. La Grand'mère (Babička, 1940), le Papillon de nuit (Nočni motýl, 1941), les Hommes sans ailes (Muži bez křídel, 1946), l'Obscurité blanche (Bílá tma, 1948) lui confèrent une enviable réputation. Mais, en 1949, il part en Allemagne où il tourne trois films puis, à l'invitation de la société slovène Triglav, s'installe définitivement en Yougoslavie, qui devient sa patrie d'adoption. Il réalise notamment Vesna (1954) et les Instants de la décision (Trenutki odločitve, 1955).

CAPELLANI (Albert)

cinéaste français (Paris 1870 -id. 1931).

D'abord acteur au Théâtre-Libre d'Antoine, puis à l'Odéon, il commence sa carrière cinématographique chez Pathé en 1905, dirigeant quelques films comiques avec André Deed, Prince Rigadin et Max Linder. Collaborateur de Zecca, il réalise ensuite des mélodrames. Capellani est un des innombrables pionniers qui font la transition entre le théâtre filmé et les débuts du 7e art comme langage, grâce, surtout, au soin apporté aux cadrages. Il est nommé directeur artistique de la SCAGL (Société cinématographique des auteurs et gens de lettres). Il commence à employer le découpage avec l'Homme aux gants blancs (1908). La même année, il réalise l'Assommoir, premier long métrage français. Les Misérables (1912), film d'une durée de cinq heures, attire l'attention sur lui : sa mise en scène s'adapte déjà aux possibilités narratives de l'image animée. Il est également l'auteur d'autres adaptations littéraires comme l'Arlésienne (1909), les Mystères de Paris (1942), Germinal (1913), Quatrevingt-Treize ( 1914 ; 1920). En 1915, il part pour les États-Unis, où il travaille jusqu'en 1922, dirigeant notamment de nombreux films avec Alla Nazimova et Clara Kimball Young. Mais les temps changent et Capellani, épuisé, revient en France en 1923. Atteint de paralysie, il ne tourne plus jusqu'à sa mort.