Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
L

LUMIÈRE.

Orifice laissant passer la lumière, par extension, lumière de tirage, niveau de réglage du contrôle de lumière pour chacune des voies rouge, verte et bleue ( ÉTALONNAGE).

LUMIÈRE (Louis)

inventeur et pionnier du cinéma français (Besançon 1864 - Bandol 1948).

Fils d'un fabricant de plaques photographiques (Antoine Lumière), il met au point, à moins de vingt ans, un nouveau type de plaques au gélatino-bromure dont le succès assure la prospérité de l'entreprise familiale. Louis Lumière et son frère Auguste (Besançon 1862 - Lyon 1954), qui étaient en contact avec Marey, Demeny, Reynaud, ont l'occasion en 1894 d'examiner un Kinetoscope, et ils sont vivement intéressés par l'idée de pouvoir projeter des images animées (alors que le Kinetoscope ne permettait qu'une vision individuelle). Après que plusieurs mécanismes eurent été essayés, Louis Lumière imagine la griffe, qui demeure le mécanisme d'avance intermittente de toutes les caméras actuelles. Dès l'été 1894, une première caméra est construite, qui débouche sur le Cinématographe, appareil réversible, c'est-à-dire apte à la prise de vues, au tirage des copies, à la projection. ( invention du cinéma.) Breveté en février 1895, le Cinématographe est présenté en mars à Paris, rue de Rennes, lors d'une séance de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, puis, à partir de juin, lors de diverses manifestations scientifiques, les représentations publiques payantes débutant le 28 décembre 1895. Alors qu'aux États-Unis les démonstrations publiques des projecteurs Latham ou Armat-Jenkins n'avaient rencontré qu'un accueil mitigé, le Cinématographe connaît tout de suite un immense succès, dont le retentissement mondial conduit de nombreux historiens à considérer le 28 décembre 1895 comme la date de naissance du cinéma.

Aussi bien pour montrer et vendre le Cinématographe que pour tourner les films nécessaires à la constitution de son catalogue (1 000 titres dès 1898), Lumière envoie ses agents et opérateurs – comme Promio ou Mesguich – dans le monde entier, constituant ainsi la première collection de documents d'actualités. Mais le cinéma allait rapidement évoluer vers des formes différentes de spectacle. Lumière réalise encore, à l'Exposition universelle de Paris en 1900, des projections sur grand écran (20 m) à partir de films de 75 mm de large, puis il s'adonne à d'autres activités, notamment à la mise au point des plaques Autochrome, qui constituèrent jusqu'à la Seconde Guerre mondiale le seul procédé disponible de photographie en couleurs. (Ce procédé additif absorbait beaucoup trop de lumière pour se prêter à des projections cinématographiques, et seuls quelques essais eurent lieu.) Lumière expérimenta également plusieurs procédés de cinéma en relief par anaglyphes. ( relief.)

Films attribués à Louis Lumière comme opérateur et « réalisateur » :

la Sortie des usines Lumière (1894) ; la Sortie du port / Barque sortant du port (1895) ; l'Arrivée d'un train en gare de La Ciotat (id.) ; Partie d'écarté (id.) ; le Jardinier et le petit espiègle [connu sous le titre l'Arroseur arrosé] (id.) ; Querelle enfantine (id.) ; Premiers pas de Bébé (id.) ; Mauvaises Herbes (id.) ; le Déjeuner de Bébé (id.) ; Gros Temps en mer (id.) ; Démolition d'un mur (id.) ; Photographe (id.).

LUMINANCE.

Terme scientifique pour désigner la luminosité apparente d'une source lumineuse ou d'un objet éclairé, anciennement appelée brillance ( PHOTOMÉTRIE).

LUMINATION.

Quantité de lumière reçue par une surface sensible, la lumination est égale au produit de l'éclairement par le temps d'exposition de la surface sensible.

LUNTZ (Édouard)

cinéaste français (La Baule 1931).

Après plusieurs courts métrages, il signe en 1966 les Cœurs verts, portrait en noir et blanc de jeunes marginaux, puis il aborde le romanesque sous la férule du romancier Antoine Blondin, qui signe le scénario du Dernier Saut (1970), curieuse histoire d'une « amitié » dangereuse entre un commissaire de police solitaire et un ex-para assassin de son épouse, et offre au cinéaste la possibilité d'adapter l'un de ses romans : l'Humeur vagabonde (1972), satire de la vie parisienne avec Michel Bouquet dans un rôle à métamorphoses. Peu après les événements de mai 1968, il avait réalisé le Grabuge, film qui ne fut pas distribué en raison d'un différend entre le réalisateur et le producteur Darryl Zanuck, où il évoque avec humour les fantasmes de révolte des jeunes bourgeois.

LUPINO (Ida)

actrice et cinéaste américaine d'origine britannique (Londres 1914 - Burbank, Ca., 1995).

Issue d'une célèbre « dynastie » du théâtre britannique, elle débute à dix ans sur scène et à quatorze ans à l'écran, sous la direction d'Allan Dwan (Her First Affair, 1933). Aux États-Unis, sous contrat à la Paramount, elle apparaît dans Peter Ibbetson (H. Hathaway, 1935), mais ne connaît son premier succès qu'avec la Lumière qui s'éteint (W. Wellman, 1940). À la Warner Bros, elle s'impose dans des compositions dramatiques d'une singulière intensité, conférant une énergie névrotique, parfois shakespearienne, à des personnages extrêmes : la maîtresse de George Raft dans Une femme dangereuse (R. Walsh, id.), la compagne d'Humphrey Bogart dans la Grande Évasion (R. Walsh, 1941) ou de John Garfield dans le Vaisseau fantôme (M. Curtiz, id.). Elle se meut avec la même aisance dans le film noir (la Femme aux cigarettes, J. Negulesco, 1948 ; la Maison dans l'ombre, N. Ray, 1952) que dans le romantisme néogothique (Ladies in Retirement, Ch. Vidor, 1941 ; la Vie passionnée des sœurs Brontë (Devotion, C. Bernhardt, 1946), où elle incarne Emily Brontë) ou le mélodrame sur fond de show-business (The Hard Way, V. Sherman, 1943 ; The Man I Love, Walsh, 1947).

En 1949, avec son mari Collier Young, elle fonde une société de production indépendante, Emerald Films, qui deviendra The Filmmakers. Remplaçant Elmer Clifton tombé malade, elle accède à la réalisation avec Avant de t'aimer (Not Wanted, 1949). Le couple écrit et produit ensuite huit films intimistes, à petit budget, le plus souvent tournés en extérieurs réels et inspirés de faits divers qui sont, pour la plupart, réalisés par Ida Lupino elle-même. À rebours de l'angélisme ou de la « glamour » de Hollywood, celle-ci choisit pour héroïnes une fille-mère (Avant de t'aimer), une danseuse atteinte de poliomyélite (Faire Face [Never Fear], 1950), une ouvrière victime d'un viol (Outrage, id.), une championne de tennis exploitée par sa mère (Hard, Fast and Beautiful, 1951). Brutalement arrachées à un destin tout tracé, exclues de leur milieu petit-bourgeois par un événement traumatisant, ces femmes meurtries, dépossédées d'elles-mêmes, doivent apprendre à surmonter leur passivité comme leur désespoir. Avec une pudeur qui n'exclut ni la cruauté ni les éclats déchirants, la cinéaste s'attache au désarroi de ses héroïnes, à leur panique devant le désir, à leur sentiment d'incomplétude ; elle inscrit leur solitude dans un environnement urbain claustrophobique, presque abstrait, non sans suggérer les différences de classe, de génération ou de morale qui traversent la condition féminine. Une vérité quasi documentaire, une direction d'acteurs attentive aux moindres frémissements, une modulation des sentiments assez subtile pour évoquer la musique de chambre : on retrouve ces qualités dans The Bigamist (1953), qui décrit à nouveau les tourments d'un être trop vulnérable, masculin cette fois, plus que dans le Voyage de la peur (The Hitch-Hiker, id.), un exercice de style où la réalisatrice rivalise avec ses pairs N. Ray et J. Losey dans une mise en scène de la paranoïa.