Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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HEPBURN (Audrey Hepburn-Ruston, dite Audrey)

actrice américaine (Bruxelles, Belgique, 1929 - Tolochenaz, Suisse, 1993).

D'origine anglo-hollandaise, elle gagne Londres après la guerre pour devenir danseuse et joue de petits rôles dans les films britanniques. En 1951, alors qu'elle tourne sur la Côte d'Azur Nous irons à Monte-Carlo dirigé par Jean Boyer, elle rencontre Colette ; celle-ci suggère avec insistance qu'elle incarne Gigi dans la version scénique du roman prévue à Broadway. C'est un triomphe, et il lui ouvre les portes d'Hollywood. La jeune Hepburn apporte au cinéma un charme tout nouveau de « garçonnet manqué » mais très féminin par sa grâce, ses yeux immenses et ses longues jambes. Elle y apporte aussi une volonté de fer sous les apparences de la fragilité. Dès 1953, elle remporte l'Oscar pour Vacances romaines (W. Wyler), où elle exprime la sensibilité du temps, sans tics ni affectation. Actrice intelligente et consciencieuse, également douée pour le drame et la comédie, elle a su longtemps maintenir le rayonnement si précaire de la juvénilité. Elle a été mariée (1954-1968) à Mel Ferrer, qui fut parfois son producteur et l'a dirigée, si l'on peut dire, dans un de ses rares films médiocres. Ayant paru abandonner l'écran après 1967, elle y est revenue en 1976. Quoi qu'il en soit, Audrey Hepburn a fait don à Hollywood d'une grâce que Donen, Cukor, Edwards ou Quine ont su chérir, avec aussi la touche d'anticonformisme ou d'humour que le métier de l'actrice savait rendre étincelante. Tempérée, adoucie, mais vive comme vif-argent, acide ou rêveuse, elle demeure dans notre mémoire l'Eliza de My Fair Lady, l'héroïne délicieuse de Charade, la libre Holly Golightly de Diamants sur canapé, aiguë et radieuse. Nous ne l'entendons pas comme un banal compliment.

Films  :

One Wild Oat (Charles Saunders, 1951) ; Rires au paradis (M. Zampi, id.) ; De l'or en barres (Ch. Crichton, id.) ; Nous irons à Monte-Carlo (J. Boyer, id.) ; Young Wives' Tale (Henry Cass, id.) ; The Secret People (T. Dickinson, 1952) ; Vacances romaines (W. Wyler, 1953) ; Sabrina (B. Wilder, 1954) ; Guerre et Paix (K. Vidor, 1956) ; Drôle de frimousse (S. Donen, 1957) ; Ariane (Wilder, id.) ; Vertes Demeures (M. Ferrer, 1959) ; Au risque de se perdre (F. Zinnemann, id.) ; le Vent de la plaine (J. Huston, 1960) ; Diamants sur canapé (B. Edwards, 1961) ; la Rumeur (Wyler, 1962) ; Charade (Donen, 1963) ; Deux Têtes folles (R. Quine, 1964) ; My Fair Lady (G. Cukor, id.) ; Comment voler un million de dollars (Wyler, 1966) ; Voyage à deux (Donen, 1967) ; Seule dans la nuit (Wait until Dark, T. Young, id.) ; la Rose et la Flèche (R. Lester, 1976) ; Liés par le sang (Bloodline, Young, 1979) ; Et tout le monde riait (P. Bogdanovich, 1981) ; Always (S. Spielberg, 1989).

HEPBURN (Katharine)

actrice américaine (Hartford, Conn., 1907).

Née dans une riche famille bourgeoise et fille d'une suffragette, Katharine Hepburn fait ses débuts à l'âge de trois ans dans des spectacles féministes organisés par sa mère. Secrète, volontaire, brusque, Katharine décide d'être actrice. Mais son caractère entêté et impétueux n'arrange pas les choses. Entre 1928 et 1931, elle va d'échec en échec. Il était donc assez audacieux de la part de la RKO de lui confier le rôle principal d'Héritage, en 1932, face à John Barrymore ; avec la fierté et le courage qui allaient toujours la caractériser, elle lui tint bravement tête et fit de ce film un triomphe personnel et une revanche éclatante sur ses insuccès de théâtre. De plus, ce film lui fait rencontrer George Cukor, qui va être son ami et son metteur en scène de toujours. Elle avait d'emblée imposé sa figure de jeune fille rebelle et généreuse dont le prénom masculin, Sidney, était en lui-même symbolique. La RKO décide alors de faire d'elle une star à part entière et lui donne très vite la vedette, dans la Phalène d'argent, prévue pour Ann Harding (D. Arzner, 1933) : ce rôle d'aviatrice indépendante qui, enceinte d'un lord, se suicide en lançant son avion dans les airs, dégoûtée par les préjugés, lui convenait à merveille. Dans les années 30, Katharine Hepburn va être un peu la jeune fille symbolique, alternant les héroïnes volontaires et modernes et les délicates créations style « Bibliothèque rose » qu'elle fut la seule à tenir.

À une époque de féminité rebondie, elle a imposé une androgynie irrespectueuse. Le public, dérouté par la nouveauté, ne la suivra pas toujours. Mais le temps lui a donné raison : on est maintenant frappé à la fois par le modernisme de sa démarche et de son jeu, et par la nouveauté totale de sa beauté d'elfe farceur, tout en aspérités et en angles. Pour Cukor, elle est l'inoubliable Jo des Quatre Filles du docteur March, garçon manqué plus femme que ses coquettes de sœurs. Pour Lowell Sherman, elle dessine le saisissant portrait d'une jeune actrice arriviste dans Morning Glory (1933) : un rôle qui doit beaucoup à son expérience personnelle et qui lui vaut son premier Oscar.

1935 est pour elle une année cruciale, à cause d'un échec et d'un succès. Le succès, c'est Alice Adams (G. Stevens), où elle incarne une jeune provinciale modeste prise au piège cruel du jeu social : création minutieuse et exacte, un des personnages les plus révélateurs de la décennie. L'échec, ce fut celui, injustifié, du chef-d'œuvre de Cukor, Sylvia Scarlett, magnifique hybride où la comédie américaine se croise avec l'Angleterre de Charles Dickens. Au sommet de son art et de son rayonnement, Katharine Hepburn, délicieusement travestie en jeune homme, le chapeau sur l'œil et le cheveu court, puis en pierrot lunaire, menait un marivaudage subtil entre le rire et les larmes. Après cela, sa carrière se mit à battre de l'aile : l'échec de la grande production de Marie Stuart (J. Ford, 1936), dont elle interprétait le rôle-titre avec éclat, vint confirmer celui de Sylvia Scarlett. Mais en 1937, elle trouvait un nouveau rôle superbe et un autre cinéaste complice : dans Pension d'artistes de Gregory La Cava, elle affinait encore sa création de comédienne arriviste, appuyée par un dialogue scintillant et par une réalisation d'une vivacité rare. 1938 lui offre encore deux chefs-d'œuvre de comédie : le doux-amer Vacances, de George Cukor, et le loufoque Impossible Monsieur Bébé, d'Howard Hawks. Mais, hélas  ! elle était une star qui ne rapportait pas d'argent et elle dut aller reconquérir sa gloire à la scène.