Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
G

GERE (Richard)

acteur américain (Philadelphie 1949).

Dès son troisième film (À la recherche de M. Goodbar, R. Brooks, 1977), il est dans le peloton de tête des acteurs américains découverts à la fin des années 70. Il incarne quelques archétypes avec conviction : le desperado solitaire - avatar du « born loser » de l'après-guerre —, le rocker sexy, le GI romanesque, le prolétaire qui cherche à s'élever dans la hiérarchie sociale par la promotion militaire. On le voit dans les Moissons du ciel (T. Malick, 1978), les Chaînes du sang (A. Mulligan, id.), American Gigolo (P. Schrader, 1979), Yanks (J. Schlesinger, id.), Officier et Gentleman (An Officer and a Gentleman, Taylor Hackford, 1982), À bout de souffle made in USA (Breathless, Jim McBride, 1983), Cotton Club (F. F. oppola, 1984), le Consul (The Honorary Consul, John Mackenzie, id.), le Roi David (B. Beresford, 1985), les Coulisses du pouvoir (S. Lumet, 1986), Sans pitié (No Mercy, Richard Pearce, id.), Miles From Home (Gary Sinise, 1988), Affaires privées (Internal Affairs, Mike Figgis, 1990), Pretty woman (Garry Marshall, id.). Ce dernier film est pour lui un retour en force après une période de baisse de popularité : plus mûr, le cheveu poivre et sel, il semble bénéficier d'un registre élargi. Après un court rôle dans Rhapsodie en août (1991), pour le plaisir d'être dirigé par Kurosawa, il reprend sur les chapeaux de roue une carrière commerciale brillante. Psychiatre au cœur d'un suspense hitchcockien (Sang chaud pour meurtre de sang-froid, Phil Joanou, 1992), il joue cependant de sa séduction, affrontant les féminités conjuguées de Kim Basinger et d'Uma Thurman. Il est très à l'aise auprès de Jodie Foster dans Sommersby (Jon Amiel, id.), honorable remake du Retour de Martin Guerre, transposé dans l'Ouest américain. Malheureusement, il semble moins à l'aise dans Intersection (M. Rydell, 1994), morne remake des Choses de la vie ou dans le Lancelot de Jerry Zucker (1995). Il a tendance à se cantonner au film d'action plus ou moins conventionnel, comme en témoignent Peur primale (Primal Fear, Gregory Hoblit) et en 1997 le Chacal (The Jackal, Michael Caton-Jones) ou à s'accrocher aux succès éprouvés comme Just Married (ou presque) (G. Marshall, 2000) qui reformait l'équipe de Pretty Woman. C'est pourquoi il est agréable de le voir ironiser sur son image de quinquagénaire séduisant dans le corrosif Dr. T et les femmes (R. Altman, 2000) où il joue un gynécologue à la mode harcelé par ses patientes et miné par une vie personnelle désastreuse.

GERIMA (Haile)

cinéaste américain d'origine éthiopienne (Gondar 1946).

Formé à l'université de Californie de Los Angeles, Gerima commence à tourner aux États-Unis, où il réside. Hour Glass (1971), Child of Resistance (1972), Bush Mama (1975), ses premiers films, ont pour protagonistes des Noirs américains (un joueur de basket-ball, une détenue, une mère de famille), chez qui s'éveille la conscience. De retour en Éthiopie, il y réalise la Récolte de trois mille ans (Harvest : 3000 Years, 1976), une des œuvres les plus mûres du cinéma africain. Gerima sait y exprimer le désir de justice qui anime les paysans dépossédés et faire du bourg montagnard, où se déroule le film, un microcosme du pays à la veille de la révolution. Depuis, son travail se poursuit aux États-Unis dans le documentaire et le film de fiction : Cendres et Braises (Ashes and Embers, 1982), After Winter : Sterling Brown (DOC., 1985), Sankofa (1992).

GERLACH (Arthur von)

cinéaste allemand (1881 - Berlin 1925).

Venu du théâtre, il est certainement le plus méconnu et le plus mystérieux des réalisateurs dits « expressionnistes ». Il est l'auteur de deux films seulement, mais l'un comme l'autre de premier plan. Vanina (id., 1922, sur un scénario de Carl Mayer d'après Stendhal) est une étude sur le sadisme, noyée dans une poésie prenante et tourmentée ; l'autre, la Chronique de Grieshuus (Zur Chronik von Grieshuus, 1925, sur un scénario de Thea von Harbou d'après une nouvelle de Theodor Storm), est un mélodrame noir et angoissant. A. von Gerlach meurt prématurément en laissant inachevé son film le Prince de Hombourg (Der Prinz von Homburg).

GERMI (Pietro)

cinéaste italien (Gênes 1914 - Rome 1974).

D'abord attiré par une carrière de capitaine au long cours, Pietro Germi modifie l'orientation de ses études pour aller suivre à Rome les cours de mise en scène et d'interprétation du Centre expérimental de cinématographie. Après avoir été l'assistant de Blasetti, Germi réalise, sous la supervision de ce dernier, son premier film, le Témoin (Il testimone), en 1946. La carrière de Germi, qui comprend dix-huit films au total, peut se diviser en deux parties. De 1946 à 1958, le cinéaste tourne des films où dominent la critique sociale et la volonté de porter un témoignage sur la situation de l'Italie de l'après-guerre. Avec le recul, ces œuvres ne semblent pas toujours très bien maîtrisées, elles hésitent entre le constat dépouillé à la manière du néoréalisme et une intention spectaculaire qui doit beaucoup à l'influence du film noir américain. Les films réalisés pendant cette période pèchent parfois par leur schématisme ou par un didactisme trop appuyé : Il testimone (1946) ; Jeunesse perdue (Gioventù perduta, 1948) ; Au nom de la loi (In nome della legge, 1949) ; la Tanière des brigands (Il brigante di Tacca del Lupo, 1952). En revanche, certains d'entre eux ont une force narrative incontestable et posent avec acuité les problèmes de l'émigration des travailleurs siciliens (le Chemin de l'espérance [Il cammino della speranza, 1950]), de la délinquance dans les grandes villes (Traqué dans la ville [La città si difende, 1951]), de la désagrégation familiale (le Cheminot/le Disque rouge [Il ferroviere, 1956] ; l'Homme de paille [L'uomo di paglia, 1958]). Après un film charnière comme Meurtre à l'italienne (Un maledetto imbroglio, 1959), comédie policière inspirée du célèbre roman de Carlo Emilio Gadda, Quer pasticciaccio brutto de via Merulana (l'Affreux Pastis de la rue des Merles), Germi commence la seconde partie de sa carrière. Pendant plusieurs années, le cinéaste se consacre à des comédies de mœurs — souvent situées en Sicile — dans lesquelles l'épaisseur du trait n'empêche pas la précision et la virulence de la critique. Divorce à l'italienne (Divorzio all'italiana, 1961), Séduite et abandonnée (Sedotta e abbandonata, 1964), Ces messieurs-dames (Signore e signori, 1966 ; Palme d'or au festival de Cannes), Beaucoup trop pour un seul homme (L'immorale, 1967) constituent une espèce de tétralogie sur la médiocrité et la petitesse des passions humaines. Les dernières œuvres, Serafino (1968), Le castagne sono buone (1970), Alfredo, Alfredo (1972), indiquent une volonté de renouvellement qui aurait dû culminer avec Mes chers amis (Amici miei, 1975), film que Germi gravement malade demanda à Mario Monicelli de réaliser à sa place. Également acteur (dans plusieurs de ses films mais aussi dans des œuvres de Mario Soldati, Damiano Damiani, Mauro Bolognini), Germi est un cinéaste assez représentatif de l'évolution du cinéma italien depuis les années de l'immédiat après-guerre jusqu'au milieu des années 70. L'amertume de ses analyses sociales, malgré des choix stylistiques parfois contestables, confère à ses films une force de témoignage qui trouve à s'exprimer aussi bien dans les drames que dans les comédies.