Larousse Médical 2006Éd. 2006
G

génétique (suite)

L'information génétique

La molécule l'A.D.N. est donc constituée d'un enchaînement de bases. Le principe du codage de l'information est le même que celui du langage, et l'ensemble des gènes d'un individu, appelé génome, peut être comparé à un roman : le « langage » des gènes comprend quatre lettres, les quatre bases ATGC, l'ordre de ces lettres définissant les « mots » que sont les gènes. De même qu'une faute d'orthographe peut changer le sens d'un mot, et donc du message, une mutation peut changer le message porté par le gène. Cette altération se traduit par une maladie génétique.

— Le rôle des acides aminés. Chaque caractère est dû à une protéine, enchaînement de petites molécules – les acides aminés –, dont il n'existe que 20 sortes ; l'information nécessaire pour la formation de cette protéine est contenue dans le gène qui en commande la synthèse mais, l'alphabet des gènes n'étant pas le même que celui des protéines (lequel est constitué de 20 « lettres »), un décodage de l'information contenue dans les gènes est nécessaire ; il est réalisé par la cellule en deux étapes, appelées transcription et traduction.

— La transmission de l'information. La molécule d'A.D.N., étant structurée en deux chaînes complémentaires, peut se reproduire exactement à l'identique et aboutir ainsi à deux molécules filles totalement semblables. En effet, selon une loi dite « de complémentarité », le A d'un brin ne peut s'associer qu'à un T sur l'autre brin, et il en est de même pour G et C. La cellule possède un système permettant de séparer les deux brins de la molécule d'A.D.N. et de fabriquer des brins complémentaires des brins ainsi libérés. Ce système introduit des A en face des T et des T en face des A ; il en est de même pour les G et les C : il résulte de ce phénomène, appelé réplication, deux molécules totalement identiques à la molécule de départ.

— Transcription et traduction. Pour décrypter le message porté par un gène et le traduire en un caractère physique, la cellule doit procéder à un décodage de l'information en deux étapes. Tout d'abord, des copies de l'information contenue dans le gène sont effectuées dans le noyau de la cellule. Elles sont constituées d'un acide nucléique très légèrement différent, l'acide ribonucléique (A.R.N.). Cette étape de duplication porte le nom de transcription. L'A.R.N. fabriqué, appelé A.R.N. messager, sort du noyau et va dans le cytoplasme de la cellule. Un système complexe va alors lire l'information, la décoder et fabriquer la protéine correspondante. Cette étape est appelée traduction.

La génétique moléculaire

Les lois de la génétique établies par Mendel permettaient d'établir des prévisions statistiques de la survenue d'une maladie héréditaire au sein d'une famille, mais non une prévision individuelle, et de déterminer un risque, mais non une certitude. Celle-ci n'aurait pu être obtenue qu'à l'examen non pas du phénotype (le sujet est-il atteint de la maladie ?) mais du génotype (la mutation responsable de la maladie est-elle présente dans ses chromosomes ?). À partir du milieu des années 1970, le développement des techniques de biologie moléculaire (clonage, lecture des séquences de bases, modification et correction du message génétique, etc.) permet d'étudier dans le détail la molécule d'A.D.N. qui constitue les gènes. L'ensemble de ces techniques constitue la « génétique moléculaire ». Pour certaines maladies héréditaires dont le gène a été isolé, celle-ci permet de proposer aux couples concernés la recherche, chez le fœtus, du défaut génétique en cause (diagnostic prénatal génotypique). Les progrès de la génétique moléculaire laissent espérer que l'on aura un jour isolé la totalité des gènes responsables des maladies génétiques (on en dénombre plus de 5 000). On pourra alors réaliser le diagnostic prénatal de toutes ces maladies et, peut-être, envisager leur guérison définitive en remplaçant dans chaque cellule le gène altéré par sa copie normale (génothérapie, ou thérapie génique).

— Premières tentatives de thérapie génique. L'identification du gène en cause ne suffit pas pour qu'une maladie se prête à une tentative de thérapie génique. Il faut en outre, dans l'état actuel de la technologie, que cette maladie soit consécutive au défaut d'un seul gène, que celui-ci ne commande pas la synthèse d'une protéine toxique pour l'organisme et que l'on connaisse les facteurs qui commandent l'activité de ce gène. Aussi la première tentative de thérapie génique, réalisée en 1990 par les Américains French Anderson et Michael Blaese, a-t-elle porté sur une maladie génétique pourtant très rare, dans laquelle une enzyme, l'adénosine déaminase (ADA), n'est pas fabriquée, ce qui entraîne un grave déficit immunitaire : le gène manquant a été introduit dans les lymphocytes du malade, transporté par un rétrovirus inoffensif pour l'homme. Une autre tentative de thérapie génique porte sur le traitement du cancer : aux États-Unis, Steven Rosenberg a expérimenté chez un patient atteint de mélanome (cancer de la peau) un « vaccin anticancer », constitué de cellules tumorales prélevées sur le malade et cultivées en y intégrant un gène, le facteur de nécrose tumorale (TNF). La réinjection de ces cellules provoquerait une réaction immunitaire de défense contre les cellules cancéreuses.

— Le génome humain. Les progrès de la génétique moléculaire ont permis de dresser la carte complète du génome humain, c'est-à-dire des gènes contenus dans chacune des molécules d'A.D.N. de l'espèce humaine. Ce travail, entrepris par l'équipe du Français Daniel Cohen et terminé fin 1993, constituait un préalable indispensable pour isoler les gènes. Parallèlement, un vaste programme de recherche a débuté en 1986 aux États-Unis ; il visait à déterminer la totalité de la séquence en bases du génome humain. Terminé en 2003, il a montré que le génome humain contenait environ 25 000 gènes. Ces recherches permettent d'espérer que de nombreuses maladies génétiques pourront, dans les prochaines années, être précocement dépistées et traitées.

Voir : acide désoxyribonucléique (A.D.N.), chromosome, conseil génétique, génome, génothérapie, hérédité, mutation, thérapie génique.

Génétique et problèmes d'éthique

Le développement de la génétique moléculaire suscite un vaste débat, portant notamment sur le risque d'eugénisme lié aux manipulations génétiques : l'avortement consécutif au dépistage d'une grave maladie héréditaire et la non-implantation dans l'utérus (lors d'une fécondation in vitro) des embryons porteurs d'une telle maladie constituent-ils ou non une dérive visant à améliorer la race humaine en éliminant certains individus ? Si les thérapies géniques s'appliquaient un jour aux cellules transmises à la descendance, risquerait-on de détériorer le patrimoine génétique humain ? La possibilité de découvrir, dès le plus jeune âge, une prédisposition à telle ou telle maladie risque-t-elle d'être exploitée au préjudice de l'individu ? Autant de questions auxquelles la législation des différents États n'a pas encore apporté de réponse définitive.

Les mystères du génome

Peu après la découverte de la structure de la molécule d'A.D.N., les chercheurs découvrent avec étonnement que le génome des cellules ayant un noyau contient vingt fois plus d'A.D.N. que nécessaire, les gènes ne représentant qu'environ 5 % de la molécule d'A.D.N. Le rôle exact de cet A.D.N. apparemment inutile, appelé A.D.N. égoïste, est toujours en partie inconnu. On sait simplement qu'il joue un rôle dans la mise en place et dans le maintien de la structure du noyau. À la fin des années 1970, les chercheurs constatent encore, sans pouvoir l'expliquer, que l'information permettant la synthèse des protéines est morcelée au sein des gènes, qui sont constitués d'une alternance de séquences codantes et non codantes.