Larousse Médical 2006Éd. 2006
S

sida (suite)

PHASE SECONDAIRE D'INFECTION CHRONIQUE

Cette phase dure plusieurs années et se caractérise par une multiplication du virus, en particulier au niveau des ganglions, et par des symptômes souvent peu importants.

   Des infections mineures peuvent apparaître, témoignant d'une atteinte modérée du système immunitaire.

— Les infections cutanées ou muqueuses mineures, virales ou mycosiques, ne sont pas spécifiques de l'infection à V.I.H. mais prennent chez les sujets qui en sont atteints une forme chronique récidivante : candidoses buccales (muguet) ou anogénitales, dermite séborrhéique de la face, folliculites, prurigo, zona, verrues, etc.

— Les signes généraux tels qu'une altération de l'état général, une forte fièvre prolongée, des sueurs, un amaigrissement, une diarrhée persistante sont parfois présents mais peuvent manquer totalement jusqu'au sida.

SIDA

Il s'agit de la forme évoluée de l'infection à V.I.H., due à une immunodépression majeure.

   Cette phase se manifeste par des infections dites opportunistes liées à des micro-organismes (bactéries, virus, microchampignons ou parasites) qui « profitent » de l'état défaillant des défenses immunitaires pour se développer. Ces infections peuvent être dues à une contamination récente, ou à une réactivation de l'agent infectieux (notamment d'un virus, ou du parasite responsable de la toxoplasmose), présent à l'état latent dans l'organisme.

   Les malades du sida peuvent également développer des tumeurs caractéristiques : le sarcome de Kaposi et les lymphomes malins.

— Les infections bactériennes sont principalement dues à des mycobactéries, notamment le bacille de Koch responsable de la tuberculose. Ses formes extrapulmonaires sont plus fréquentes chez les patients atteints de sida que dans la population générale. Les infections à mycobactéries non tuberculeuses peuvent atteindre les poumons ou le cerveau. D'autres infections bactériennes peuvent également se déclarer.

— Les infections parasitaires par des micro-organismes tels que Toxoplasma gondii, responsable de la toxoplasmose, peuvent se réactiver et entraîner des troubles neurologiques en cas de localisation cérébrale. Une infection par Pneumocystis jiroveci (anciennement Pneumocystis carinii) provoque une atteinte pulmonaire grave conduisant à une insuffisance respiratoire en l'absence de traitement approprié. Des atteintes parasitaires digestives (microsporidiose, cryptosporidiose) entraînent des diarrhées et une altération de l'état général.

— Les infections fongiques les plus fréquentes sont les candidoses, dues au champignon Candida albicans. Celui-ci se manifeste par un muguet, parfois associé à une atteinte de l'œsophage entraînant une difficulté à avaler lors de la déglutition.

— Les infections virales observées au cours du sida sont dues à des réactivations de virus présents à l'état latent dans l'organisme. Ainsi, une réactivation du virus varicelle-zona entraîne un zona. Un papovavirus (virus JC) est responsable d'une leucoencéphalite multifocale progressive (L.E.M.P.), forme grave d'encéphalite.

— Le sarcome de Kaposi, plus fréquent chez les malades homosexuels, est dû à un virus Herpes (HHV8) transmis par voie sexuelle et qui s'exprime en cas de déficit immunitaire. La forme cutanée, avec lésions planes, violacées, indolores, en est l'expression fréquente. Des localisations viscérales sont possibles, surtout en cas d'immunodépression majeure.

— Les lymphomes malins sont dus à une prolifération cancéreuse des précurseurs des lymphocytes, les lymphoblastes T et B.

Diagnostic

Le diagnostic de l'infection à V.I.H. se fait par la mise en évidence dans le sang des anticorps dirigés contre le virus, grâce à la technique dite ELISA. Deux tests ELISA utilisant des méthodes distinctes sont réalisés. En cas de positivité, un test de confirmation, appelé Western-Blot, doit être effectué car le test ELISA peut donner des résultats faussement positifs.

   Les anticorps anti-V.I.H. apparaissent à un niveau détectable dans le sang à partir de la 3e semaine et, au plus tard, au 3e mois suivant la contamination. Aussi, lorsque la suspicion d'infection par le virus V.I.H. est élevée, d'autres tests, permettant de détecter le virus plus tôt, peuvent être utilisés : recherche de la protéine virale p24, et surtout de l'A.R.N. du virus (dont le taux sanguin est appelé charge virale). Ces deux composants du virus sont détectables respectivement environ 15 jours et 10 jours après la contamination. En tout état de cause, et si aucun signe évoquant une primo-infection n'est observé, la réalisation d'un nouveau test ELISA 3 mois après la date de l'exposition est nécessaire pour confirmer avec certitude l'absence d'infection par le V.I.H.

Traitement

Il existe plusieurs types de traitement : les deux principaux sont d'une part le traitement dirigé contre le virus, d'autre part les traitements dirigés contre les conséquences infectieuses et tumorales du V.I.H. Une dernière voie thérapeutique consistait à tenter d'amplifier les défenses immunitaires. Cette voie thérapeutique est actuellement abandonnée.

— Le traitement contre le virus repose sur des médicaments s'opposant à la multiplication du virus. Plus de 30 molécules sont actuellement utilisées. Elles se répartissent en 3 principaux groupes, selon leur mode d'action et leur nature chimique : les inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse – dont un représentant, l'AZT (ou zidovudine), fut le premier antirétroviral utilisé (1987) –, les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (1998), et les inhibiteurs de protéase (1996). Plus récemment, de nouvelles familles d'antiviraux (antirétroviraux) ont été développées (anti-intégrase, inhibiteurs d'entrée).

   Les objectifs sont d'une part de bloquer la multiplication du virus (évaluée par la charge virale, quantité d'A.R.N. viral présente dans le sang), ce qui doit conduire à une charge virale indétectable, et, d'autre part, de reconstituer des défenses immunitaires (augmentation, consécutive au traitement, du nombre des lymphocytes T4).

   Une association de trois molécules antirétrovirales (trithérapie) est aujourd'hui habituellement prescrite. La trithérapie a ainsi permis de diminuer de 70 % l'incidence des infections opportunistes, et de plus de 75 % le risque de déclaration du sida chez une personne positive. Elle a permis de réduire la fréquence des décès mais n'entraîne pas une guérison définitive : le virus est toujours présent dans l'organisme. Ces médicaments présentent souvent des inconvénients. Le nombre de comprimés ou de gélules à prendre chaque jour peut être important (parfois plus de 14), mais il diminue actuellement. Les inhibiteurs de protéase, en particulier, peuvent présenter une toxicité à long terme, 60 % des patients étant sujets à des effets secondaires au terme de 2 années de traitement (modification de la répartition des graisses, apparition d'un diabète ou d'une hypercholestérolémie). Compte tenu de sa puissance, l'association synergique de 3 molécules est souvent appelée HAART (highly active antiretroviral therapy).

   La régularité de la prise des médicaments, qui doit être continue, sans oubli, et à vie est essentielle pour maintenir une charge virale indétectable et l'absence de mutation de résistance.

   Certaines souches virales peuvent en effet devenir résistantes à ces molécules, ces résistances conduisant à un échec thérapeutique.

   Néanmoins, l'espérance de vie des sujets infectés par le V.I.H. et traités, dont le nombre de lymphocytes CD4 est supérieur à 500, est équivalente à celle des sujets non infectés. La tendance récente est donc de proposer un traitement antirétroviral à un très grand nombre de patients et dont le niveau de lymphocytes CD4 est relativement élevé.

— Le traitement des infections opportunistes repose sur des molécules dirigées contre des bactéries, des parasites, des virus, ou des champignons. Ces traitements sont curatifs mais aussi préventifs.

— Le traitement des conséquences tumorales associe la chimiothérapie, la chirurgie et la radiothérapie.