Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
Q

Qian Zhongshu

Romancier et critique chinois (1910 – 1998).

Formé en partie à l'étranger (Oxford, la Sorbonne), ce grand lettré est le fondateur de l'école comparatiste chinoise. Son roman la Forteresse assiégée (1947) est, en pleine guerre civile, un grand succès populaire : c'est à travers la destinée lamentable d'un fils de famille, faux docteur en philosophie, coincé dans une vie conjugale catastrophique, la satire brillante des milieux intellectuels shanghaiens. À la fondation de la République populaire, Qian Zhongshu renonce à l'écriture romanesque pour se consacrer à la recherche. Avec sa femme Yang Jiang, elle aussi écrivain, il est déporté pendant la Révolution culturelle, afin d'être « rééduqué » dans une « école de cadres du 7 mai ». Réhabilité en 1979, il fait paraître le Bambou et le poinçon, panorama en langue classique de la littérature universelle, ouvrage tout entier composé mentalement pendant sa dure « rééducation », où il met en évidence les échanges entre Chine et Occident.

Qorpo-Santo (José Joaquim de Campos Leão, dit)

Écrivain brésilien (Triunfo, Rio Grande do Sul, 1833 – Porto Alegre 1883).

Son inclassable journal en plusieurs volumes, Encyclopédie (1876-1877), où il est question de morale, de religion et de réforme de l'orthographe, le fit considérer comme un fou par ses contemporains.

Qosja (Rexhep)

Écrivain kosovar d'expression albanaise (Vuthaj 1936).

Publiciste, membre de l'Académie des sciences et des arts de Kosova, il a largement contribué au renouveau de la critique littéraire dans la littérature albanaise de Kosova (Dialogues avec les écrivains, 1968 ; Critiques littéraires, 1969 ; Anthologie de la poésie albanaise, 1970 ; Continuités, 1972 ; Écrivains et périodes littéraires, 1975 ; Anatomie de la culture, 1976 ; De la typologie à la périodisation, 1979 ; Histoire de la littérature albanaise I, II, III, 1984-85). Il est également auteur de drames (la Mort me vient de ces yeux-là, 1974 ; les Mythes dépouillés, 1978) , de romans (le Grand message, 1986) ; d'essais et d'écrits historiques (le Peuple interdit, 1990 ; la Question albanaise, 1990).

Qu Qiubai

Écrivain chinois (1899 – 1935).

Marxiste militant, membre du Comité central du P.C.C., grand reporter en U.R.S.S. (Voyage dans la nouvelle Russie, 1922 ; Essais sur la capitale rouge, 1924), essayiste, traducteur (Tolstoï, Gorki), proche de Lu Xun au sein de la Ligue de gauche, il défendit avec lui la « popularisation de la littérature ». Il fut fusillé par le Guomindang.

Qu Yuan

Poète chinois (vers 340 – 278 av. J.-C.).

Premier poète chinois connu, il resta au service du roi de Chu, principauté sudiste ayant développé une culture originale aux marges de l'espace chinois, jusqu'à ce que des calomniateurs l'en chassent. Blessé au plus profond de son âme, il exprime son amertume dans un genre poétique emprunt d'un lyrisme débridé, offrant une profusion d'images, de symboles et de locutions descriptives passées depuis dans le langage poétique conventionnel. Lorsque son pays tomba aux mains de Qin, il se jeta dans la rivière Miluo. C'était le 5e jour du 5e mois, dit-on, et sa mort est commémorée encore de nos jours par des fêtes aquatiques. Son destin tragique et son œuvre sont souvent confondus avec les Élégies de Chu, anthologie de longs poèmes de 50 à 100 vers, rassemblés par Wang Yi au IIe siècle de notre ère. Pourtant le poète semble n'avoir écrit qu'à peine plus d'un tiers des 17 chapitres que celle-ci contient. Le seul poème sur lequel aucun doute ne plane est célèbre et s'intitule Lamentations sur la séparation (Lisao). Cette œuvre unique à plus d'un titre, longue de 374 vers, est passionnée, lyrique, désespérée : phénix exilé parmi les hommes, le poète incompris, chassé par son roi, part en quête d'une âme sœur à travers le monde et les étoiles, sur un char attelé de dragons. Foisonnant jusqu'à la confusion, difficile à comprendre par ses dialectalismes de Chu, les nombreuses références mythologiques et allégoriques, le symbolisme floral compliqué, le Lisao a fasciné tous ses lecteurs et son influence sur l'ensemble de la littérature chinoise jusqu'à aujourd'hui ne saurait être évaluée. Le reste du Chuci explore la même veine élégiaque, individualiste, bien qu'avec des variations attestant de créations d'époques et d'idéologies différentes. Ce sont les Neuf Chants (Jiu ge), hymnes d'amour chamanistique adressés à des divinités, les Neuf Admonestations, poèmes lyriques sur divers sujets, le Yuan you ou Voyage lointain qui narre un voyage chamanistique teinté de taoïsme. Le Tian wen (Questions célestes) propose une collection d'énigmes sur des sujets cosmologiques, mythiques et historiques. Un certain nombre de pièces sont attribuées avec plus ou moins de certitude à des lettrés Han, qui comme Song Yu (IIIe s. av. J.-C.), auteur du Rappel de l'âme, créèrent dans l'ombre de Qu Yuan, dont l'importance dans la littérature chinoise a été comparée à celle d'Homère dans l'histoire de la littérature européenne.

Quasimodo (Salvatore)

Écrivain italien (Syracuse 1901 – Naples 1968).

Influencé par l'hermétisme de G. Ungaretti (Eaux et terres, 1930 ; Hautbois submergé, 1932 ; Érato et Apollon, 1936 ; Et c'est tout de suite le soir, 1942), il fut ensuite le premier poète de sa génération à chanter pour un plus vaste public l'épopée de la Résistance et la difficile conquête quotidienne de la liberté (Jour après jour, 1947 ; La vie n'est pas un rêve, 1949 ; la Terre incomparable, 1958 ; Donner et avoir, 1966). Le public préfère toutefois sa poésie intemporelle, où le militant s'efface derrière l'esthète : Quasimodo y chante la nostalgie d'un impossible retour aux origines, qu'il s'agisse de l'enfance ou de sa Sicile natale, confondues dans un même mythe. Nostalgie puisée également dans la Grèce antique,  qui lui a inspiré son chef-d'œuvre sous la forme d'une anthologie de Poètes grecs (1940). Il reçut le prix Nobel de littérature en 1959.

Qudama ibn Djafar

Écrivain arabe (mort entre 932 et 948).

Il occupa des fonctions de scribe, à Bagdad, et fit œuvre aussi de critique littéraire, n'hésitant pas, à l'occasion, à s'inspirer de modèles grecs, notamment de la pensée aristotélicienne. Il fut à cet égard l'un des premiers, dans sa Critique de la poésie, et peu après Ibn al-Mu'tazz, à tenter un relevé systématique des figures de la rhétorique (badi') dans les textes arabes.