Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
B

Blaman (Johanna Petronella Vrugt, dite Anna)

Romancière hollandaise (Rotterdam 1905 - id. 1960).

Ses nouvelles (Ram Horna, 1951) et ses romans (Femme et Ami, 1941 ; Aventure solitaire, 1948 ; Combat à mort, 1954 ; les Perdants, 1960), influencés par l'existentialisme français, composent une analyse impitoyable du désir et de l'amour aux prises avec une lancinante lucidité.

Blanchot (Maurice)

Écrivain français (Quain, Saône-et-Loire, 1907 – Le Mesnil-Saint-Denis, Yvelines, 2003).

Inaugurée par Thomas l'obscur (1941) et Aminadab (1942), son œuvre narrative ouvre une méditation sur la création qui ressortit à la fois à l'inquiétude métaphysique (l'Arrêt de mort, 1948 ; le Très-Haut, 1948), au sentiment d'exil et de solitude (Celui qui ne m'accompagnait pas, 1953), et à l'expérience d'un temps insaisissable (Au moment voulu, 1951 ; Après coup, 1983). La conscience est sujette à l'Attente, l'Oubli (1962), défaite par le flottement et les contradictions de sa propre parole, menacée par la Folie du jour (1973) que génère le Ressassement éternel (1951). C'est dire combien ces récits, dont le fantastique procède d'une angoisse ontologique, battent en brèche les certitudes du réalisme.

   Parallèlement, Blanchot poursuit une réflexion critique éclectique et profuse, souvent convergente avec la pensée de Bataille (Lautréamont et Sade, 1949 ; l'Amitié, 1971). De ces nombreux essais il ressort que le concept de fiction a cessé de constituer un repère stable, au point que l'existence même de la littérature est mise en doute. Hantée par des revenants, l'écriture se révèle un exercice anonyme, indifférent à la grandeur (De Kafka à Kafka, 1982). De fait, après Faux Pas (1943) et la Part du feu (1949), organisés autour de la figure, mythifiée, de Mallarmé, l'Espace littéraire (1955) se définit désormais sous « le regard d'Orphée ». Tendu entre la préhistoire de la Bête de Lascaux (1959) et l'horizon eschatologique d'une Communauté inavouable (1983), l'Entretien infini (1969) avec la production d'autrui s'inscrit dans une perspective heidegerrienne : s'il est vrai que le propre de l'homme est la possibilité de sa négation, rien ne répond mieux à cet appel que l'œuvre art, où commence la fin (le Pas au-delà, 1973 ; l'Écriture du désastre, 1980). Écrire, c'est faire advenir la non-présence du « désœuvrement » moderne, si bien qu'il ne peut toujours s'agir que d'entrevoir le Livre à venir (1959), auquel correspond le fantasme romanesque du Dernier Homme (1957).

Blanco-White (José María Blanco y Crespo, dit)

Écrivain espagnol (Séville 1775 – Liverpool 1841).

Chanoine sévillan, il émigra en Angleterre (1810) et se fit protestant. Dans son journal El Español, il défendit les mouvements d'indépendance des colonies américaines. Il témoigna d'un esprit critique d'une violence sans précédent à l'égard de son pays natal et renia sa langue maternelle dans ses Letters from Spain (1822) et son autobiographie (1845).

Blanco Fombona (Rufino)

Écrivain vénézuélien (Caracas 1874 – Buenos Aires 1944).

Éminent représentant du modernisme, il cultiva tous les genres, excepté le théâtre : poésie (Cancionero de l'amour malheureux, 1915), conte et roman (Contes américains, 1906 ; la Mitre à la main, 1927), journal intime, essai critique (le Modernisme et les poètes modernistes, 1929), satire (Judas Capitolino, 1912). Il collabora à de nombreux périodiques, fonda et dirigea à Madrid les éditions Editorial América, qui diffusèrent les plus grands auteurs américains.

Blandiana (Ana) , pseudonyme de Otilia Valeria Coman

Écrivain roumaine (Timisoara 1962).

Poète (la Première personne du pluriel, 1964 ; le Talon vulnérable,1966 ; le Sommeil du sommeil, 1977 ; l'Heure de sable,1983) et essayiste (Histoires de mon jardin, 1983), ses ouvrages se distinguent par l'expression de la sensibilité et de la grâce féminine accordée à la gravité des interrogations morales.

Blasco Ibáñez (Vicente)

Écrivain espagnol (Valence 1867 – Menton 1928).

Exilé à Paris à la suite d'une tentative révolutionnaire, amnistié en 1891, il rentre en Espagne et fonde le journal El Pueblo. Il écrit alors la plupart des nouvelles réunies sous le titre de Contes de Valence (1896), ainsi que ses romans Riz et Tartane (1894), Fleur de mai (1895) et, surtout, Terres maudites (1898). Emprisonné au moment de la guerre hispano-américaine, puis relâché, il est élu député et prend part à la vie politique jusqu'en 1909, tout en publiant quelques ouvrages vite célèbres : Boue et roseaux (1902), À l'ombre de la cathédrale (1903), l'Intrus (1904), la Horde (1905), Arènes sanglantes (1908). Vient ensuite la série de ses romans hispano-américains (les Argonautes, 1914-1915), tandis que la Première Guerre mondiale lui inspire les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse (1916), best-seller international. Il s'opposera à la dictature de Primo de Rivera (Pour l'Espagne et contre le roi, 1924).

blason

Genre poétique en faveur au XVIe s., le blason est le développement du dit médiéval. C'est une description détaillée d'un être ou d'un objet dont on fait l'éloge ou la satire. Illustré par Guillaume Alexis (Blason de fausses amours, 1486), Gringore (le Blason des hérétiques, 1524), Roger de Collerye (Blason des dames, 1536), il connut son apogée avec les poètes lyonnais (Héroët, Scève, auteur d'un célèbre Blason du sourcil) et surtout Marot qui, après le Blason du beau tétin (1535), lança le « contre-blason », qui consistait à célébrer le « rebours » des beautés : cette tendance nouvelle finit dans l'obscénité et amena un déclin du genre, malgré les poèmes minutieux d'Hugues Salel (Blason de l'épingle, 1540) et de Guillaume Guéroult (Blason des oiseaux, 1550), ou moralisateurs de Jean Chartier (Blasons de vertu, 1574). La Pléiade, qui le méprisa, vit paradoxalement l'un de ses membres les plus éminents, Rémi Belleau, le rénover sous la forme de l'hymne-blason.

Blaumanis (Rūdolfs)

Écrivain letton (Ērgļi 1863 – Takakharju, Finlande, 1908).

C'est un des plus éminents représentants du courant réaliste dans la littérature lettonne. Il écrivit à la fin des années 1890 des nouvelles remarquables comme les Gelées printannières (1898), le Marécage (1898), Andriksons (1899) ou encore À l'Ombre de la mort (1899). Ses drames, le Fils prodigue (1893), Indrāni (1904) et Dans le feu (1905), dans lesquels les aspects sociaux et psychologiques jouent un grand rôle, témoignent d'un nouveau degré de développement de la dramaturgie lettonne. Rudolfs Blaumanis a également écrit des comédies, dont la plus célèbre est le Tailleur de Silmači (1902), ainsi que des poèmes humoristiques. Il a contribué à lancer des auteurs comme Kārlis Skalbe et Jānis Akuraters.