Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
O

Ouïgoun (Rakhmatoulla Atakouziev, dit)

Écrivain ouzbek (Merke 1905-? 1990).

Poète de la nature (Joies du printemps, 1929), de l'homme nouveau (Djantemir, 1931 ; Au pays du soleil, 1936) et de la résistance (Colère et Amour, 1943 ; Ouzbékistan, 1947), il fait revivre au théâtre le poète Ali Sçir Nevaî (1940), puis aborde la réalité des kolkhozes dans des pièces (le Chant de la vie, 1947 ; Printemps précoce, 1948) où il soulève des problèmes de morale familiale et sociale (les Amis, 1961) et dénonce rétrospectivement les abus du culte de la personnalité (le Soupçon, 1967).

Oukraïnka (Laryssa Petrivna Kossatch, dite Lessia)

Poétesse ukrainienne (Novograd-Volynski 1871 – Sourami 1913).

Fille de la poétesse O. Ptchilka, nièce de Drahomanov, elle révéla des dons poétiques précoces (Espoir, 1880) et reçut une vaste culture artistique et littéraire. Initiée au marxisme, elle sera proche des milieux sociaux-démocrates et connaîtra même la prison en 1907. Évoluant du monde des sentiments intimes (Sur l'aile des chansons, 1893) à des préoccupations sociales et révolutionnaires (Pensées et Rêves, 1899 ; Échos, 1902), elle s'exprime surtout dans des poèmes dramatiques d'inspiration biblique, mythique et folklorique, où elle appelle à combattre l'oppression (la Captivité de Babylone, 1903 ; Parmi les ruines, 1904 ; Dans les catacombes, 1905) et se penche sur le sort de l'intelligentsia (Cassandre, 1908 ; le Chant des forêts, 1912). Elle a laissé avec l'Hôte de pierre (1912) une version originale et amère du mythe de Don Juan.

Oulipo, sigle de l'« Ouvroir de Littérature Potentielle »

Cet atelier de littérature expérimentale est né des réflexions de François Le Lionnais et de Raymond Queneau sur la possibilité de créer de nouvelles contraintes formelles à l'expression littéraire. Le groupe, qui tint sa première réunion le 24 novembre 1960, se proposait également d'affiner des procédures connues (ainsi revigorer le centon à l'aide de la théorie des chaînes de Markov), de manière à mettre des structures nouvelles à la disposition des écrivains dont l'inspiration se nourrit des règles et s'affermit sur l'obstacle. Rattaché au « Collège de pataphysique », l'Oulipo a rassemblé entre autres, aux côtés de ses initiateurs, Jacques Bens, Jean Lescure, Ross Chambers, Stanley Chapman, Georges Perec, Jacques Roubaud, et intéressa Marcel Duchamp. L'Oulipo se reconnaît des ancêtres, ou « plagiaires par anticipation », dans les troubadours, Villon, Rabelais, les Grands Rhétoriqueurs, la commedia dell'arte, Raymond Roussel, les formalistes russes. Ses méthodes supposent une pratique assidue du dictionnaire encyclopédique (la méthode S + 7 de J. Lescure remplace tous les substantifs d'un texte par le 7e qui suit dans un lexique donné ; la littérature définitionnelle de Queneau substitue à chaque mot sa définition dans le dictionnaire et génère ainsi un vaste « cancer » littéraire) ou des mathématiques (poèmes booléens de F. Le Lionnais, poèmes pour rubans de Moebius de Luc Étienne). Elles bénéficient aujourd'hui de l'assistance de l'ordinateur et avec J. Roubaud rejoignent les objectifs de l'« ALAMO » (Atelier de littérature assistée par la mathématique et l'ordinateur). En 1982, l'Oulipo s'est donné une « filiale », l'Oulipopo (Ouvroir de littérature policière potentielle), qui s'est fixé plus particulièrement l'étude du rôle des lieux du crime et du problème du « local clos ». La création oulipienne pratique l'écriture à contrainte, engendre du texte à partir de structures formelles dont les pouvoirs sont systématiquement exploités non sans succomber, parfois, aux pièges d'une démarche laborieusement mécaniste. Certaines réalisations, réglées en sous-main, constituent toutefois des réussites remarquables. C'est le cas notamment de la Vie mode d'emploi de Georges Perec (1978), qui prouve à l'évidence que contraintes formelles, imaginaire et talent ne sont pas inconciliables. L'Oulipo anime depuis des années des ateliers qui proposent à un large public de pratiquer ce type d'écriture.

Oulitskaïa (Lioudmila)

Écrivain russe (Davlekanovo 1943).

Née dans l'Oural, elle vit à Moscou. Biologiste de formation, elle travaille dans un laboratoire puis dirige pendant quelques années la section littéraire du Théâtre Yiddish de Moscou. Elle commence à publier à la fin des années 1980, et se fait connaître avec Sonietchka (1993, prix Médicis en 1996) : cette longue nouvelle est le portrait d'une lectrice, qui puise dans sa passion la force d'accepter avec une admirable sérénité la trahison des siens. Avec Médée et ses enfants (1997), elle livre, sur fond de saga familiale, un autre destin de femme (elle est grecque cette fois, et l'action se passe en Crimée), grande par la simplicité avec laquelle elle se sacrifie pour les siens, devenant ainsi la gardienne du foyer et des traditions ancestrales. Attachée à dépeindre toutes les nuances de la vie quotidienne, Oulitskaïa offre dans ses recueils de nouvelles (les Pauvres Parents, 1992 ; Un si bel amour, 2002) un véritable tableau de la société contemporaine ; elle s'est aussi penchée sur le milieu de l'émigration russe new-yorkaise dans De joyeuses funérailles (1998). L'ensemble de son œuvre est pénétré d'une forme de tendresse lyrique pour le monde et les personnages qu'elle décrit et résonne souvent comme un hymne à la vie. Elle a obtenu le prix Smirnoff-Booker en 2001 pour le Cas de Koukotski.

Ouloug-Zoda (Satym)

Écrivain tadjik (Varzyk 1911).

Fils de paysan du Ferghana, il se fait connaître par des essais et des récits que publie la presse locale, puis consacre des drames à la vie des kolkhozes cotonniers (Chodmon, 1939), aux années de guerre civile (les Gourdins rouges, 1940) et de résistance (le Brasier, 1944), ainsi qu'au poète persan Rudaki (1958). Il a, dans des récits à base autobiographique, retracé la naissance du Tadjikistan socialiste (Terre ressuscitée, 1953 ; l'Aube de notre vie, 1954) et fait revivre dans un roman historique le chef paysan Vossè (1967).

Ouologuem (Yambo)

Écrivain et sociologue malien (Bandiagara 1940).

Son unique roman, le Devoir de violence (1968, prix Renaudot), relate, à la manière des litanies islamiques, le destin du monde noir sous la domination des notables, de la conquête arabe et de la colonisation blanche. Démystifiant l'image idéale de la société traditionnelle et montrant que le despotisme autochtone n'avait rien à envier à la colonisation blanche, il fit scandale en Afrique.