Vallatol Narayana Menon
Poète indien de langue malayalam (1879 – 1958).
Partisan de Gandhi, il dénonça les inégalités sociales et la domination étrangère dans Ode à la vérité (1918), Mon précepteur (1922). Il traduisit Kalidasa et Valmiki en malayalam.
Valle-Inclán (Ramón del Valle y Peña, dit Ramón María del)
Écrivain espagnol (Villanueva de Arosa, Galice, 1869 – Saint-Jacques-de-Compostelle 1936).
Il est l'auteur d'une œuvre considérable, tant en qualité qu'en quantité, à laquelle on pourrait attribuer le qualificatif de « baroque ». Ses premiers récits en prose (Féminines, 1895 ; Epitalamio, 1897) empruntent beaucoup aux décadents et aux symbolistes. Les Mémoires du marquis de Bradomín racontent les aventures d'un personnage à mi-chemin entre Don Juan et Casanova, « laid, catholique et sentimental », et fournissent la matière de quatre nouvelles en prose poétique, les Quatre Sonates, dont chacune porte le nom d'une saison : la Sonate d'automne, d'ambiance galicienne (1902) ; la Sonate d'été, d'ambiance mexicaine (1903) ; la Sonate de printemps, sur un fond de Renaissance italienne (1904) ; la Sonate d'hiver, d'ambiance navarraise et carliste (1905). Jardin ombreux (1903-1914) et Fleur de sainteté (1904) sont des recueils de souvenirs de son enfance en Galice, à laquelle il consacra une trilogie, la Guerre carliste (1908-1909), qui comprend les Croisés de la cause, la Lueur du brasier et Comme un vol de gerfauts. Tirano Banderas (1926) raconte sur le mode tragi-comique l'histoire d'un didacteur ibérique imaginaire et pourtant très concret, tandis que les deux romans du cycle de l'Arène ibérique (la Cour des miracles, 1927 ; Vive mon maître, 1928) offrent un tableau cinglant de la cour décadente de la reine Isabelle.
Ayant débuté au théâtre par des pièces épiques et lyriques (le Marquis de Bradomín, 1906) ou qui représentent personnages et paysages de Galice (Comédies barbares, 1907-1922), il donne à la scène la Marquise Rosalinda (1913), « farce sentimentale et grotesque », où percent des éléments de parodie, une tragi-comédie (Divines Paroles, 1920) qui relève du théâtre panique. Son sentiment du tragique de la vie le pousse à faire la caricature du monde réel dans ses « esperpentos » (ou farce-épouvantail), courtes pièces en prose qui mettent en scène des personnages affligés de difformités physiques ou morales (les Lumières de Bohême, 1924). Ses trois recueils de poésie (Arômes de légende, 1907 ; la Pipe de kif, 1919 ; le Passager, 1920) montrent, de l'esthétisme idéaliste au réalisme classique, la même évolution que l'ensemble de l'œuvre.
Vallée (François)
ou Fransez Vallée
Écrivain, grammairien et lexicographe français d'expression bretonne (Plounévez-Moëdec 1860 – Saint-Laurent 1949).
Fils d'industriel, il fut élevé en français, mais apprit le breton parmi les ouvriers. Après une licence de philosophie, la maladie interrompit sa carrière universitaire et il se voua aux études celtiques. Il fonda l'hebdomadaire Kroaz ar Vretoned (la Croix des Bretons) qui parut de 1898 à 1920. Investi barde au pays de Galles sous le nom d'Abhervé, il participa à la création du gorsedd de Bretagne. Son Grand Dictionnaire français-breton (1931) fait toujours autorité. On lui doit encore un manuel de Langue bretonne en 40 leçons, des poèmes sur feuilles volantes, des Eñvorennou beaj (Souvenirs de voyage) et Eñvorennou eur brezonegour (Souvenirs d'un bretonnant), ainsi que les Notennou diwar-benn ar Gelted koz (Notes sur les anciens Celtes) en collaboration avec Meven Mordiern.
Vallejo (César)
Écrivain péruvien (Santiago de Chuco 1892 – Paris 1938).
Son premier recueil de poèmes, les Hérauts noirs (1918), influencé par les poètes modernistes, mais aussi par l'œuvre intimiste de Valdelomar, contient en germe les thèmes de son œuvre à venir : l'amour, la mort, l'enfance, la solidarité avec l'opprimé, la rébellion contre l'oppresseur. Par l'abandon de toute logique et syntaxe au profit de la seule métaphore, les poèmes de Trilce (1922) rompent avec le modernisme. Vallejo publie deux recueils de nouvelles (Scènes mélographiées, 1923 ; Fable sauvage, 1923) et un roman indigéniste sur l'exploitation des Indiens des Andes par le capitalisme étranger et péruvien (Tungstène, 1931). Il formule son espoir en un avenir meilleur dans Poèmes humains (posthume, 1939) et exalte la résistance et l'idéal républicain face à l'insurrection franquiste (Espagne, éloigne de moi ce calice).
Vallès (Jules Vallez, dit Jules)
Journaliste et écrivain français (Le Puy 1832 – Paris 1885).
Vallès est le fils d'un instituteur, qui fera (assez difficilement) sa carrière dans l'enseignement ; sa femme est de la campagne comme lui, mais bien vite il ne s'entend plus avec elle et entretient des liaisons que l'administration n'apprécie guère. Jules a suivi sa famille du Puy à Saint-Étienne et enfin à Nantes. C'est l'époque de l'Enfant, où une mère tyrannique fait subir à son fils mille brimades. Vallès échoue au bac en 1850 : même chose l'année suivante, avant la réussite en 1852.
Ces années cependant sont surtout des années politiques, où il participe aux combats républicains de 1851 et à la lutte contre le coup d'État. Son père à ce moment-là le fait interner, mais il échappe à l'asile grâce à ses amis. Avec eux, il prépare un complot contre Napoléon III. C'est la prison puis la misère quand on le relâche. Il commence à écrire et fait différents petits métiers. Expéditionnaire à la mairie de Vaugirard, il quitte finalement l'administration à la suite d'une conférence jugée subversive. Il est devenu peu à peu un journaliste apprécié, quoique parfois bien dangereux par ses audaces (il fera même de la prison en 1868). Les Réfractaires (1865) puis la Rue recueillent ses chroniques déjà parues sur les marginaux qu'il aime. En 1867, il fonde la Rue, un hebdomadaire qui réunit des signatures célèbres mais qui est interdit de même que, plus tard, le Peuple et le Réfractaire.
C'est alors la Commune et Vallès y représente le XVe arrondissement. Il échappe à la répression en fuyant d'abord en Suisse puis à Londres. Condamné à mort en France, il survit en exil grâce à quelques économies. Triste période pour Vallès qui perd en 1875 une petite fille. À partir de 1876, les journaux français acceptent à nouveau ses articles, ses chroniques et Jacques Vingtras (1878), premier état de l'Enfant, un livre auquel il pense depuis longtemps. L'Enfant paraît sous un faux nom, de même que les Mémoires d'un révolté (1879), c'est-à-dire le Bachelier. En 1880, l'amnistie lui permet de revenir en France : Vallès ne se contente pas d'écrire dans les journaux des autres et le Cri du peuple reparaît. En 1884 aussi, la Rue à Londres reprend de ses chroniques. Vallès meurt le 14 février 1885 : son enterrement sera suivi par des dizaines de milliers de personnes. L'Insurgé, dont une première version avait déjà paru, sera achevé et publié (1886) par Séverine.
Après l'Enfant et le Bachelier, l'Insurgé complète donc la trilogie autobiographique de Vallès. On retrouvera dans l'œuvre littéraire toutes les colères du journaliste ou du politique, tous ses enthousiasmes aussi. Vallès a choisi son camp et il le défend avec virulence : c'est celui des faibles écrasés par les puissants, celui des petits humiliés par les gros, l'enfant contre ses parents, les gueux contre les bourgeois. Toute son œuvre exalte une nostalgie, aux accents presque rousseauistes, de l'état de nature ; dans l'Enfant, il exalte les bonheurs champêtres pour mieux condamner les stupides rigueurs de la petite bourgeoisie. Pour lui, on a toujours raison de se révolter. À bas l'école, le grec et le latin incapables de nourrir leur homme, à bas la famille-prison, la société injuste ! Au contraire, vive la Révolution « espérée et attendue depuis la première cruauté du père, depuis la première gifle du cuistre, depuis le premier jour passé sans pain, depuis la première nuit passée sans logis ». Au fond, ce que refuse Vallès, c'est la relation d'autorité qui empoisonne les rapports humains : l'attitude du professeur face à l'élève, du proviseur face au professeur. Toutes ses sympathies vont à ceux qui choisissent l'indépendance ou l'aventure, aux réfractaires en dehors de l'institution, aux pauvres, aux obscurs, aux sans-grade pittoresques. Car on aurait tort de réduire Vallès à la colère ou à l'amertume. Il y a dans son œuvre une sensibilité très grande à la beauté, à la souffrance, à l'émotion. Mais sans grandes phrases, avec pudeur et humour. Rien n'échappe à son regard, y compris les ridicules de ses amis ou les siens propres. Selon son expression, il rue et se cabre, « trouvant en route de l'ironie et de la colère », avec un « style de pièces et de morceaux que l'on dirait ramassés, à coups de crochet, dans des coins malpropres et navrants ». Même dans son écriture, Vallès est un insurgé : abandonnant toutes les lourdeurs de la rhétorique ancienne, il invente une forme rapide, concise, libérée.