Richardson (Ethel Florence Lindesay, dite Henry Handel)
Romancière australienne (Melbourne 1870 – Hastings, Sussex, 1946).
Son père, médecin dublinois devenu orpailleur puis boutiquier en Australie, sombre dans la folie et meurt quand elle a 8 ans. Renonçant à la carrière de pianiste à laquelle elle se préparait à Leipzig, elle épouse un universitaire anglais qu'elle suit à Strasbourg puis à Londres en 1903. Après avoir traduit des romans du danois et du norvégien, elle publie ses deux premiers romans en grande partie autobiographiques (Maurice Guest, 1908 ; la Voie de la sagesse, 1910). De facture réaliste, son œuvre est caractérisée par la précision des descriptions et des portraits (la Jeune Cosima, 1939), mais également par un important élément romantique, en particulier celui de l'échec, que l'on trouve dans son chef-d'œuvre, une trilogie intitulée le Destin de Richard Mahony. Suivant l'itinéraire qui a été celui du père de H. H. Richardson, les trois volumes retracent la venue en Australie, en 1854, du jeune et instable docteur Richard Mahony à l'époque de la ruée vers l'or (Australia Felix, 1917), son retour désenchanté en Australie après un séjour dans la vieille Angleterre qui vit repliée sur sa propre culture (le Retour, 1925), puis, après la perte de sa fortune, son isolement pathologique et la désintégration de sa personnalité (Ultima Thule, 1929).
Richardson (Samuel)
Écrivain anglais (Mackworth, Derbyshire, 1689 – Londres 1761).
Apprenti chez l'imprimeur John Wilde, il s'établit à son compte en 1719. La qualité de son travail et ses relations d'amitié dans les milieux littéraire et parlementaire font de lui un bourgeois prospère, dont l'activité d'écrivain est d'abord orientée vers des fins pragmatiques : à la demande d'amis, il rédige en 1739 un recueil de lettres-modèles à l'usage de toutes les circonstances de la vie. De là naît l'idée de Paméla ou la Vertu récompensée (1740), roman épistolaire qui connaît aussitôt un succès énorme dans l'Europe entière, grâce à son réalisme social qui donnera naissance au roman de mœurs bourgeois et à l'expression des mouvements complexes de l'âme et du sentiment. Livrée innocente au fils libertin de sa maîtresse qui vient de mourir, une servante défend et fait valoir sa vertu : elle finira par épouser le comte de Belfart. Exploitant la même veine, Clarisse Harlowe (7 vol., 1747-1748) exalte la vertu de la jeune fille avec un érotisme discret : Clarisse, éprise de l'ignoble Lovelace, est quasiment droguée et violée. L'Histoire de sir Charles Grandison (7 vol., 1753-1754) offre un portrait du gentleman idéal. Si Paméla suscita en Angleterre les parodies de Fielding, notamment à cause de sa morale ambiguë et de la technique selon laquelle les personnages sont censés décrire les événements « en direct » dans leurs lettres, l'œuvre de Richardson fut au contraire l'objet d'un véritable culte sur le continent. En 1742, l'abbé Prévost traduisait Paméla ; en 1761, Diderot écrivait un dithyrambique Éloge de Richardson ; Sade en dit le plus grand bien dans Idée sur les romans ; et Crébillon fils avouait à lord Chesterfield que, sans Paméla, on ne saurait, en France, que dire et que faire.
Richaud (André de)
Poète français (Perpignan 1909 – Montpellier 1968).
Orphelin de père à 5 ans, élevé par une mère dont l'image hantera toute son œuvre, condisciple de Pierre Seghers au collège de Carpentras, lié avec Joseph Delteil (il lui consacrera une Vie de saint Delteil en 1929), professeur de philosophie à Meaux, il publie en 1930 la Création du monde, récit de la Genèse fait par un paysan ivrogne : ce poème en prose, transparent et lumineux, se place dans la grande tradition des conteurs provençaux, qu'il porte à son sommet. Un voyage en Grèce, l'amitié de Fernand Léger ouvrent une période féconde marquée par des romans (la Douleur, 1930 ; l'Amour paternel, 1936) et des pièces de théâtre (Village, 1931 ; le Château des papes, 1932 ; Hécube, 1937). Mais la Confession publique (1944) et le Droit d'asile (1937-1955) témoignent d'un même sens tragique de la vie, un même appel à l'Autre. Au contraire des paroles et des jugements qui ne s'incrustent nulle part, la poésie, pensée et communication des âmes, brûle la vie, secoue l'homme et en appelle aux dieux. Je ne suis pas mort (1965) prolonge le récit autobiographique qu'était la Confession : l'« amour dénoué », le « poignard sanglant », le « vent mortel » sont les images mêmes de la vie du poète qui s'effiloche dans un asile de Vallauris. André de Richaud, qui avait fait entrevoir à Camus « le monde de la création », a gardé son masque de poète maudit.
Richelet (César Pierre)
Lexicographe français (Cheminon, près de Châlons-sur-Marne, 1631 – Paris 1698).
Précepteur du fils du président de Courtivron à Dijon, il fut introduit dans la société de l'abbé d'Aubignac. Traducteur de l'espagnol (notamment de l'Histoire de la Floride de Garcilaso de la Vega), curieux de versification (la Versification française, 1671 ; Dictionnaire des rimes, 1692), auteur d'anthologies (les Plus Belles Lettres des meilleurs auteurs français, 1689-1698), il est surtout connu pour son Dictionnaire français contenant les mots et les choses (1680), plusieurs fois réédité et augmenté jusqu'en 1759 : l'ouvrage témoigne d'un grand intérêt pour la langue populaire et exprime des vues originales sur les niveaux de langage ainsi que sur l'orthographe, qu'il propose de simplifier. Il faut noter qu'il publie, non sans difficulté, son Dictionnaire bien avant celui de l'Académie. Il emprunte à des écrivains contemporains la majorité des exemples.
Richepin (Jean)
Écrivain français (Médéa, auj. Lemdiyya, Algérie, 1849 – Paris 1926).
Personnalité haute en couleur de la vie littéraire fin de siècle, il rompt avec son milieu et sa formation de normalien pour s'engager comme franc-tireur durant la guerre de 1870, menant ensuite une vie de bohème, et s'exerçant à tous les métiers. Ses premiers recueils poétiques font scandale dans le climat d'ordre moral qui marque les débuts de la IIIe République : la Chanson des gueux (1876), dont les accents plébéiens et libertaires à la Vallès lui valent un mois de prison ; les Caresses (1877), puis les Blasphèmes (1884), aux sulfureuses couleurs baudelairiennes. Ses amours, passagères, mais tempétueuses, avec Sarah Bernhardt contribuent à le rendre célèbre, et c'est pour elle qu'il compose le drame exotique de Nana Sahib (1883) et traduit Macbeth. À côté de son œuvre romanesque (la Glu, 1881 ; Miarka, la fille à l'ourse, 1883 ; la Clique, 1917), il s'illustre désormais au théâtre, avec des drames en vers dont le plus célèbre, le Chemineau (1897), inspire un opéra à Xavier Leroux (1907). Son œuvre, frondeuse et flamboyante, fait de Richepin le dernier des romantiques (en dépit d'une fin de carrière de notable des lettres).