Lamb (Charles)
Humoriste anglais (Londres 1775 – Edmonton 1834).
Ami d'enfance de Coleridge, incapable de devenir pasteur à cause de son bégaiement, il travaille pendant plus de trente ans comme employé de bureau. Interné en 1795, après un chagrin d'amour, il vivra dans la crainte de la folie. Ayant obtenu la garde de sa sœur Mary qui, dans un accès de démence, a tué leur mère à coups de ciseaux, il parvient à la faire participer à son œuvre (Contes tirés de Shakespeare, 1807, pour enfants : elle traite les comédies, lui les drames). Attaqué comme jacobin (1798), mêlé aux « libéraux », il siffle allègrement ses propres pièces (Mr. H., 1806) et trouve dans ses essais, publiés dans le Reflector de Leigh Hunt, le ton fantasque où s'expriment le mieux sa peur et son amour de la vie (1810-1811). Défenseur d'un pittoresque humain dégagé de toute caricature à la Dickens, Lamb définit l'égotisme comme sagesse : l'auteur s'observe comme un spécimen d'humanité. La fondation du London Magazine lui donne enfin sa chance : de 1820 à 1825, il y publie les Essais d'Elia, où s'expriment la générosité et l'inquiétude spirituelle d'une subjectivité attentive à toutes les excentricités de la vie quotidienne. L'enjouement et la séduction de ces textes feront l'admiration de Stendhal.
Lambert (Anne-Thérèse de Marguenat de Courcelles, marquise de)
Écrivain français (Paris 1647 – id. 1733).
Elle ouvrit en 1686 un salon qui se rangea du côté des « Modernes ». Elle composa pour ses enfants : Avis d'une mère à sa fille, Avis d'une mère à son fils (1726-1728), Réflexions sur les femmes (1727), deux traités sur l'Amitié et la Vieillesse (1732).
Lamdan (Yitzhak)
Poète israélien (Mlinov, Ukraine, 1899 – Tel-Aviv 1954).
Ses années d'errance durant la Première Guerre mondiale et la mort de son frère au cours d'un pogrom le poussèrent à rejoindre la cause communiste. Déçu, parce qu'il ne se sentait pas, en tant que Juif, complètement accepté, il immigra en 1920 en Palestine. Dans sa célèbre épopée, à la fois autobiographique et symbolique, Massada (1927), il dépeint les efforts des pionniers livrant un ultime combat pour la survie du judaïsme. La majeure partie de son œuvre est rassemblée dans le Triple Harnais (1930) et la Montée des scorpions (1945).
Lamennais (Félicité de)
ou Félicité de La Mennais
Prêtre et écrivain français (Saint-Malo 1782 – Paris 1854).
Fils d'un armateur malouin anobli, il manifeste une vive vocation religieuse, accompagnée de tendances antigallicanes. Sa Tradition de l'Église (1814), peu conforme à la politique concordataire napoléonienne, le conduit en exil à Guernesey pendant les Cent-Jours. Ordonné prêtre à Vannes (1816), il devient brusquement célèbre avec son Essai sur l'indifférence en matière de religion (1817-1823), qui, contre l'esthétisme du Génie du christianisme, insiste sur la nécessité des pratiques religieuses. Champion de l'ultramontanisme (De la religion considérée dans ses rapports avec l'ordre politique et social, 1824), entouré de disciples enthousiastes (Lacordaire, Montalembert), il proclame la subordination du pouvoir temporel au spirituel, condamne le pluralisme de l'Université, et réclame une « démocratie chrétienne » dans le journal l'Avenir, qu'il fonde en 1830, et dans l'Agence générale pour la défense de la liberté religieuse. Or, au retour d'un voyage à Rome où il n'a reçu de Grégoire XVI que des encouragements ambigus, il apprend la condamnation de ses idées par l'encyclique Mirari vos (1832). Après deux ans de retraite, ses Paroles d'un croyant (1834), aussitôt condamnées (Singulari nos, 1834), marquent à la fois sa rupture avec l'Église et ses anciens amis et le début de l'intérêt des républicains et des premiers socialistes pour une Église combattant le despotisme. Rêvant d'unir le message évangélique et le progrès social, il critique la hiérarchie catholique (les Affaires de Rome, 1836-1837) comme la monarchie de Juillet (l'Esclavage moderne, 1839 ; le Pays et le Gouvernement, 1840) et sera député à l'Assemblée constituante en 1848. Ne pouvant faire prévaloir ses vues dans la commission chargée d'élaborer la nouvelle Constitution, il abandonne toute activité politique, mais sa philosophie mystique et humanitaire continuera à exercer une influence profonde.
Lamentations (livre des)
Ce recueil de cinq poèmes est classé dans la Bible hébraïque parmi les « Écrits » (Ketubim) sous le titre : 'êkah (« comment ? »), d'après le premier mot du livre. Elles font partie des Cinq Rouleaux (Megillôt). Les Lamentations sont considérées comme l'un des chefs-d'œuvre du lyrisme biblique. Les quatre premiers poèmes adoptent le rythme de l'élégie funèbre, déplorant la ruine de Jérusalem. Ces poèmes semblent avoir été composés peu de temps après la chute de la ville en 587 av. J.-C.
Lamming (George)
Écrivain barbadien (La Barbade 1927).
Son premier roman, les Îles Fortunées (1953), recrée une enfance démunie dans des quartiers populaires à l'atmosphère stimulante et animée. Le second, les Émigrés (1954), peint des rapports entre Antillais fraîchement débarqués dans la capitale britannique, dont l'ambiance intellectuelle les fascine tandis que le racisme les tient à distance. Son essai autobiographique, les Plaisirs de l'exil (1960) reprend ce thème et fera date : il retrace, avec une ironie amère, les difficiles étapes de l'adaptation et de l'intégration problématique des jeunes immigrés antillais dans la société britannique. Dans Âge et Innocence (1957), une visite à l'île de San Cristobal permet d'analyser l'échec de l'exilé noir revenant au pays en quête de ses racines. Une saison d'aventures (1960) se passe dans la même île, indépendante depuis peu : par les yeux d'une jeune fille, membre de la bourgeoisie mulâtre, sont évoquées les difficultés du nationalisme naissant, dont l'échec va de pair avec la célébration de pratiques populaires et africaines (comme le steel band) en opposition à la culture européanisée de l'élite : la rupture entre le gouvernement et les masses est consacrée par l'interdiction de la « Cérémonie des Âmes », proche du culte vaudou. En 1972, Ces étrangers qui sont en moi démonte les origines de l'oppression coloniale : le voyage de « Reconnaissance » sur la route des négriers campe une allégorie des désirs et des dilemmes des capitaines d'aventures. Tout aussi allégorique, Water with Berries (1971) ne se réduit pas aux déboires commerciaux ou amoureux d'artistes noirs à Londres ; au niveau symbolique, c'est une reprise de la Tempête (déjà amorcée dans les Plaisirs de l'exil) : représenté par la vieille Douairière, Propéro ne peut empêcher Caliban d'échapper au néocolonialisme ; en voilant les tabous, Teeton démontre la nécessité d'une table rase psychologique comme préalable à la décolonisation. Résolument engagée, sans exclure l'expérimentation ni le formalisme, son œuvre fait de Lamming l'un des grands romanciers antillais contemporains.