Abbaye (groupe de l')
Groupe d'écrivains et d'artistes fondé en 1906 à Créteil.
R. Arcos, le musicien Albert Doyen, G. Duhamel, le peintre Gleizes, C. Vildrac tentèrent la vie en phalanstère, vie partagée plus ou moins épisodiquement par G. Chennevière, L. Durtain, P. J. Jouve et J. Romains. Tous sont à la recherche d'un langage nouveau. Après quinze mois de vie collective, déboires financiers et mésentente ruinent cette originale coopérative poétique qui sera évoquée par Duhamel dans le Désert de Bièvres (1937). L'Abbaye aura toutefois marqué une date dans l'histoire de la poésie française. Ses poètes rompent définitivement avec le symbole et l'allusion et privilégient l'image-raccourci et l'image-levier. J. Romains se dirigera vers les chemins de l'unanimisme. En définitive, à part Jouve, c'est surtout par la prose que les hommes de l'Abbaye réaliseront le mieux leurs idéaux. Ceux qui avaient voulu rendre la poésie au réel, loin de l'abstraction, s'en éloigneront à jamais.
Abbê Gubagnâ
Écrivain éthiopien d'expression amharique et anglaise (Bahr Dar 1934 – Addis-Abeba 1979 ou 1980).
Douze ans d'éducation traditionnelle au sein de l'Église éthiopienne (liturgie, art poétique, musique) précèdent son accès à la culture moderne. Fonctionnaire, journaliste, puis essentiellement écrivain, c'est l'auteur prolifique d'une œuvre variée : romans surtout, mais aussi poésie (où il se fait le défenseur des formes classiques), essai, théâtre. Nationaliste et progressiste, il critique la société impériale contemporaine et fait l'éloge de la société traditionnelle, qu'il idéalise. Très populaire dans les dernières années du règne de Hâyla Sellâsê, il eut maille à partir avec la censure et fut astreint à résidence pendant trois ans. Le contenu et la facture de son œuvre en prose répondent bien au goût du lecteur éthiopien : moralisante à souhait, simpliste jusqu'à transformer les personnages en allégories, écrite dans une langue accessible et se référant sans cesse à une expérience largement partagée des abus et de l'injustice, elle pouvait à juste titre inquiéter le pouvoir. Il eut l'idée originale de publier un recueil de discours officiels attribués à un homme politique imaginaire, dans un pays non précisé, pour mieux fustiger par contraste ce qui se passait en Éthiopie. Il a écrit directement en anglais une pièce de théâtre (la Fille sauvage, 1964) et un roman (Défiance, 1975).
Abbey Theatre
Théâtre de Dublin, fondé en 1904, où furent créées les œuvres des jeunes dramaturges associés à la « Renaissance irlandaise » : Yeats, qui en fut brièvement directeur, ou Synge, qui fait scandale avec son Baladin du monde occidental. Après avoir milité contre la censure et participé à la lutte pour l'indépendance, l'Abbey perd de son prestige dans l'entre-deux-guerres. Brûlé en 1951, reconstruit en 1966, il fait figure d'institution nationale. Depuis les années 1970, il a puissamment contribué au renouveau théâtral irlandais.
Abd al-Hamid Ibn Yahya (Ibn Sad)
Écrivain arabe (mort v. 750).
Secrétaire du dernier calife umayyade de Damas, c'est l'un des fondateurs du genre épistolaire arabe (risala), genre qu'il investit en s'inspirant des traditions persanes et grecques.
Abd al-Jawad (Khayri)
Écrivain égyptien (Bûlâq al-Dakrûr 1960).
Cet auteur, dans la lignée de Ghîtânî, allie une écriture expérimentale à une inspiration puisant au plus profond du patrimoine arabe, des mythes orientaux et de la mémoire orale égyptienne (Histoires d'al-Dîb Rammâh, 1988 ; la Guerre d'Italie, 1989 ; le Livre des illusions, 1992 ; l'Amant et l'Aimé, 1995 ; les Voies des amoureux, 1998).
Abd al-Majid (Ibrahim)
Romancier égyptien (Alexandrie 1946).
Ce fils de cheminot, romancier des gares isolées du désert, des marginaux et des solitudes (Pendant l'été 67, 1979 ; Distances, 1982 ; l'Arbre et les oiseaux, 1985 ; les Méduses, 1993), raconte avec causticité les déboires d'un émigré égyptien en Arabie saoudite (l'Autre Pays, 1991).
Abd al-Quddus (Ihsan)
Journaliste et écrivain égyptien (Le Caire 1919 – id. 1990).
Il dirigea l'hebdomadaire Rûz al-Yûsuf et écrivit nombre de nouvelles et de romans sentimentaux à visée émancipatrice, peignant la bourgeoisie (le Marchand d'amour, 1949).
Abd al-Sabur (Salah)
Poète égyptien (al-Zaqâzig 1931 – Le Caire 1981).
Par son œuvre engagée et en vers libre (al-Nâs fî bilâdî [les Gens de mon pays], 1957), il fut l'un des principaux représentants du renouveau poétique de l'Égypte contemporaine. Il écrivit aussi des pièces de théâtre poétique, notamment la Passion de Hallâj, 1964.
Abdallah (Yahya al-Tahir)
Romancier égyptien (al-Karnak 1938 – 1981).
Ses recueils de nouvelles, nourris de la culture populaire de la Haute-Égypte, ont donné la notoriété à cet auteur prématurément disparu (Trois Grands Orangers, 1970 ; le Tambourin et la caisse, 1974 ; Elle et moi, et les fleurs du monde, 1977 ; Berceuse pour le prince, 1978 ; la Danse licite, 1983 ; Histoire racontée par un chien, 1983).
Abdiso Bar Berika
Écrivain syriaque (mort en 1318), connu également sous le nom d'Ebedjesus.
Métropolite de Nisibe et d'Arménie, il fut le dernier des grands auteurs nestoriens. Il reste de lui un recueil de droit, le Nomocanon, un livre de philosophie et de théologie intitulé la Perle, qu'il avait traduit lui-même en arabe, et surtout le Catalogue des écrits de ses prédécesseurs, qui forme la première histoire de la littérature syriaque.
Abdul Latif Bhitai
Soufi et poète sindhi (1689 – 1752).
Inspiré par Djalal al-Din Rumi, il intègre dans ses poèmes (Sur Asa, Sur Bilawal) des contes populaires de la région du Sind interprétés dans un sens mystique. Son œuvre fut réunie après sa mort par ses disciples dans le recueil de la Risalo.
Abe Kobo
Écrivain japonais (Tokyo 1924 – id. 1993).
Il passe son enfance à Moukden, capitale de la Mandchourie, où son père est professeur de médecine. À l'âge de 16 ans, il vient à Tokyo pour finir ses études secondaires et, en 1943, commence sa médecine à l'Université de Tokyo. Marqué par la défaite du Japon, puis par la mort brutale de son père, il publie, en 1947, à compte d'auteur, un recueil, Poèmes anonymes, suivi de Poteau pour un chemin fini, premier roman qui fut reconnu par Haniya Yutaka. Une courte nouvelle, le Cocon rouge, reçoit, en 1950, le prix de littérature d'après-guerre. Puis son recueil de nouvelles, les Murs, obtient, en 1951, le prix Akutagawa. S'affirmant d'emblée comme un auteur surréaliste d'avant-garde, il adhère pour un temps au parti communiste, dont il sera exclu en 1962 pour déviation trotskiste. Dans les années 1950, il fait paraître un grand nombre de nouvelles dans les revues littéraires de l'époque. Auteur dramatique (la Chasse aux esclaves, 1955 ; les Fantômes sont là, 1958 ; les Amis, 1967), il fonde, en 1967, le groupe théâtral « Abe Kobo Studio ». Il n'en poursuit pas moins son œuvre romanesque axée sur une recherche passionnée de l'identité humaine : le Quatrième Âge glaciaire, 1959 ; les Yeux de pierre, 1960). Qualifié de « classique du XXe s. », de « roman-policier utilisant la méthode des tragédies grecques » (Donald Keen), la Femme des sables, 1962, dont Teshigawara Hiroshi tira un film primé au Festival de Cannes en 1964, connut une célébrité mondiale et fut traduit dans une vingtaine de langues. Suivent la Face d'un autre (1964), Mort anonyme (1964), le Plan déchiqueté (1967), l'Homme-Boîte (1973), Rendez-vous secret (1977). Son dernier roman, l'Arche en toc, 1984, traite la possibilité d'une destruction de la planète par une éventuelle guerre nucléaire.