Traz (Robert de)
Écrivain suisse de langue française (Paris 1884 – Nice 1951).
L'école d'endurance du service militaire lui inspire l'Homme dans le rang (1913). Fondateur, en 1920, de la Revue de Genève, qu'il dirigera pendant dix ans, il met en scène dans ses romans des personnages de la société genevoise aux prises avec le conformisme bourgeois (la Puritaine et l'Amour, 1917 ; Fiançailles, 1922 ; Complices, 1924 ; l'Écorché, 1927 ; À la poursuite du vent, 1932 ; la Blessure secrète, 1944). Ses essais (l'Esprit de Genève, 1929 ; Témoin, 1952) abordent avec intelligence et sensibilité les problèmes sociaux et culturels.
Trediakovski (Vassili Kirillovitch)
Poète et philologue russe (Astrakhan 1703 – Saint-Pétersbourg 1768).
D'origine modeste mais lettrée, il fit ses études à l'étranger, en particulier à Paris. Il eut beaucoup de mal à se faire admettre dans la société cultivée de Saint-Pétersbourg, mais il finit par obtenir le poste de secrétaire à l'Académie des sciences, et il s'imposa comme poète de cour et professeur d'éloquence. Un des grands introducteurs de la culture occidentale en Russie, il chercha à traduire Boileau, Ésope, Horace, et surtout à les imiter, mais se heurta à la rigidité du vers russe. Ce fut le début de la révolution poétique du XVIIIe siècle : prenant pour modèle la prosodie antique, et remplaçant les syllabes longues ou brèves par des syllabes accentuées ou atones, il forgea un instrument chantant et flexible et élabora une nouvelle méthode de versification, le système syllabo-tonique, promis à un grand avenir. Lomonossov, avec lequel il eut de violentes polémiques, paracheva sa réforme.
Tremblay (Michel)
Écrivain québécois (Montréal 1942).
Il inaugure avec les Belles-Sœurs (1968) un théâtre contestataire suscitant enthousiasme et controverse, qui adopte le joual pour mieux souligner la déchéance du sous-prolétariat qu'il dépeint : quinze femmes du peuple, à la fois typées et fortement individualisées, font éclater leurs frustrations dans une alternance de monologues, duos, trios, quatuors, quintettes et chœurs. Le contraste est violent entre la forme musicale, la langue jouale et le fond revendicateur du discours. Il revient au français dans son adaptation d'Aristophane (Lysistrata, 1969) et poursuit sur la scène (À toi, pour toujours, ta Marie-Lou, 1971 ; Albertine en cinq temps, 1984), comme dans ses chroniques romanesques du plateau Mont-Royal (La grosse femme d'à côté est enceinte, 1978 ; Thérèse et Pierrette à l'école des Saints-Anges, 1980 ; la Duchesse et le Roturier, 1982 ; Des nouvelles d'Édouard, 1984), la peinture du climat social et religieux québécois dont l'humour tempère le réalisme. La galerie de portraits est impressionnante.
Tressan (Louis-Élisabeth de La Vergne, comte de)
Écrivain français (Le Mans 1705 – Paris 1783).
Durant un voyage en Italie, il s'enthousiasma dans la bibliothèque du Vatican pour les manuscrits médiévaux et rédigea en français moderne de nombreux récits du Moyen Âge. Il adapta, en les affadissant, pour la « Bibliothèque des romans » le Petit Jehan de Saintré, des fabliaux et des chansons de geste. Il composa un abrégé d'Amadis de Gaule et du Roman de la Rose et fut membre de l'Académie des sciences pour un traité sur l'électricité (1749).
Trevisan (Dalton)
Écrivain brésilien (Curitiba, Paraná, 1925).
Il est l'auteur de contes grotesques et macabres, de tonalité très expressionniste (Nouvelles pas du tout exemplaires, 1959 ; le Vampire de Curitiba, 1965 ; la Guerre conjugale, 1969).
Trévoux
Ville de l'Ain, près de Bourg, célèbre au XVIIIe siècle pour son collège et sa communauté jésuites.
Les pères jésuites animèrent un centre d'édition qui imprima le Dictionnaire universel, extension de celui de Furetière, paru pour la première fois en 1704 et réédité régulièrement jusqu'en 1775, ainsi que des Mémoires, appelés le Journal de Trévoux, organe de la lutte antijanséniste et antiphilosophique. Le Journal de Trévoux, composé sur le modèle du Journal des savants, fut longtemps dirigé par le père Berthier, connu pour ses démêlés avec Voltaire (de 1745 à 1763).
Trifonov (Iouriï Valentinovitch)
Écrivain russe (Moscou 1925 – id. 1981).
Fils d'un révolutionnaire professionnel, il fut ajusteur. Son premier roman, les Étudiants (1950), connut un très grand succès, sans doute parce que les lecteurs s'y reconnurent. Avec la Soif étanchée (1963), récit sur l'industrialisation du Turkestan, il donne à la fois un roman de production et une œuvre caractéristique du dégel, expression d'une soif de justice et de l'attention que l'écrivain porte à l'Histoire – présente aussi dans deux récits consacrés à son père, le Reflet du bûcher (1965) et le Vieux (1980), ou dans Temps et Lieu (1980). Dans les années 1960, il compose un cycle de romans qui inaugure le genre dit « moscovite » ou « urbain », dont le plus connu est la Maison sur le quai (1976) : derrière les descriptions de la vie quotidienne, la peinture cruelle et lucide d'une intelligentsia installée, égoïste, et prête à tous les compromis, il livre une réflexion sur le sens de l'existence.
Trigo (Felipe)
Écrivain espagnol (Villanueva de la Serena, Badajoz, 1864 – Madrid 1916).
Auteur de romans naturalistes centrés sur la problématique sexuelle (les Ingénues, 1901 ; la Soif d'amour, 1902 ; les Èves du paradis, 1909 ; le Médecin de campagne, 1912), il fut considéré comme un des maîtres de l'école érotique. Il est en outre l'auteur de deux essais (Socialisme individualiste, 1906 ; la Crise de la civilisation, 1913).
Trilussa (Carlo Alberto Salustri, dit)
Poète italien (Rome 1871 – id. 1950).
Auteur de poésies en dialecte romain, il trouve cependant sa meilleure expression dans la fable avec Hommes et Bêtes (1908), les Histoires (1915), Loups et Agneaux (1919), les Choses (1922), les Gens (1927), Livre n. 9 (1929), Jupiter et les Bêtes (1932), Cent Apologues (1934), le Miroir et autres poésies (1938), Eau et Vin (1945). Tout comme son parler dialectal, son moralisme est l'expression typique de la petite-bourgeoisie romaine de son temps.