Danrit (Émile Driant, dit Capitaine)
Écrivain français (Neufchâtel 1855 – Douaumont 1916).
Officier, il écrivit des récits souvent destinés aux jeunes et décrivant, non sans chauvinisme, des conflits imaginaires : la Guerre de demain (1889-1891), l'Invasion noire (1895) contre l'Afrique, la Guerre fatale (1901-1903) contre l'Angleterre, et l'Invasion jaune (1905-1906) contre l'Orient. Influencé par J. Verne, il publie Robinsons de l'air (1907) sur la conquête du Pôle et, avec Arnould Galopin, une anticipation sociale : la Révolution de demain (1909).
Dantas (Júlio)
Écrivain portugais (Lagos 1876 – Lisbonne 1962).
Connu aujourd'hui par son drame en vers le Souper des cardinaux (1902), il a résumé son œuvre de poète et de romancier dans l'Héroïsme, l'élégance, l'amour (1923).
Dante Alighieri
Écrivain italien (Florence 1265 – Ravenne 1321).
D'antique tradition guelfe, sa famille appartient, économiquement, à la petite noblesse florentine. On ignore presque tout de ses premières études : il se peut qu'il ait fréquenté en 1287 l'université de Bologne et, dans le chant XV de l'Enfer, il rend hommage à son premier maître, Brunetto Latini. Deux expériences essentielles marquèrent son adolescence : l'amitié qui le lia aux principaux poètes florentins de sa génération (G. Cavalcanti, L. Gianni) au sein de l'avant-garde poétique du dolce stil nuovo ; et l'amour pour celle qu'il célébra, de la Vita nuova à la Divine Comédie, sous le nom de Béatrice. Les luttes de Florence contre Arezzo et les autres cités gibelines de Toscane offrent au parfait chevalier qu'il rêvait d'être l'occasion de ses premiers faits d'armes : bataille de Campaldino et prise de la forteresse pisane de Caprona (1289). Après la mort de Béatrice (1291), il se consacre à la philosophie (Cicéron, Boèce) et fréquente les écoles théologiques des dominicains de Santa Maria Novella et des franciscains de Santa Croce. À partir de 1295, il prend une part active à la vie politique de Florence et est nommé en 1300 au Conseil des prieurs, suprême magistrature de la commune. Lorsque les Noirs sont rappelés à Florence, ils exilent leurs adversaires par centaines. Injustement accusé de concussion, Dante est exclu à vie de toute magistrature et condamné à l'exil. Refusant à chaque amnistie de se plier aux conditions mises à son retour, il ne devait plus jamais revenir à Florence. Il mène alors une vie errante en Vénétie, à Bologne et à Lucques. Il réside ensuite à Vérone, sous la protection de Cangrande Della Scala. On ignore à quelle date il passe ensuite à la cour de Guido Novello da Polenta, à Ravenne, où il meurt le 14 septembre 1321, au retour d'une ambassade à Venise.
Les Rimes de jeunesse de Dante comprennent une trentaine de compositions qui annoncent le dolce stil nuovo. Regroupant les rimes dédiées à Béatrice, la Vita nuova (1292-1293) est accompagnée d'un commentaire en prose, dont la structure narrative autobiographique constitue la principale nouveauté. Le récit définit l'amour du poète pour Béatrice à la fois comme une expérience étendue dans le temps et l'espace, comme une aventure spirituelle transcendante et comme le fondement même de toute parole poétique. La période de déviance qui succède à la mort de Béatrice est marquée par une expérimentation poétique orientée dans trois directions : les Rime allégoriques et doctrinales (à partir de 1293) célèbrent le mythe de la « donna gentile », synthèse harmonieuse de beauté et de vérité ; la tenson avec Forese Donati (1293-1296) renouvelle les techniques médiévales du style comique ; les « rime petrose » (à partir de 1296) s'inscrivent dans la tradition âpre (complexité prosodique et inspiration tragique) du troubadour provençal Arnaut Daniel. Ses dernières Rime, constat d'amertume et d'échec, datent des premières années de son exil. Le Banquet, en langue vulgaire, dont seuls les 4 premiers livres ont été écrits (1304-1307), se propose de fonder une culture laïque moderne, fondée sur la spéculation philosophique et destinée à rénover l'action et les structures politiques. Contemporain du Banquet, l'Éloquence vulgaire est interrompu avant la fin du livre II. Le livre I est consacré à la définition du « vulgaire illustre » à partir d'une analyse des dialectes de la langue italienne en tant que langue originelle d'Adam. Dante propose de fonder la grammaire de ce « vulgaire illustre » sur la récente tradition poétique italienne. Dans le livre II, il en précise le champ de pertinence stylistique, selon les canons rhétoriques de l'époque. Le traité de philosophie politique Monarchia (1310-1313) développe la théorie, esquissée dans le livre IV du Banquet, de la mission providentielle dévolue dans l'histoire de l'humanité à l'institution impériale, de l'Empire romain au Saint Empire germanique, légitime incarnation historique de la monarchie universelle. Les 13 Épîtres latines de la même période exaltent la perfection de l'institution monarchique et affirment l'idée de l'autonomie du pouvoir temporel par rapport au pouvoir spirituel, que le pape doit exercer dans le seul but de reconduire l'Église à la pauvreté évangélique.
La Divine Comédie : l'expérience politique décisive que fut pour Dante l'élection à l'Empire puis l'échec d'Henri VII de Luxembourg inspirèrent la vision à la fois prophétique et apocalyptique de l'histoire qui s'affirme dans son poème. Écrit de 1306-1308 à 1321, la Divine Comédie (qui comprend l'Enfer, le Purgatoire et le Paradis) est composée de 3 fois 33 chants (plus un chant d'introduction). Elle narre l'itinéraire fictif de Dante dans l'outre-tombe, en l'an jubilaire 1300. Accompagné de Virgile, le poète parcourt successivement, de Jérusalem au centre de la Terre, les 9 cercles concentriques de l'Enfer, avant de gravir les 7 terrasses, ou girons, de la montagne du Purgatoire. Au sommet de celle-ci s'étend le luxuriant plateau du Paradis terrestre, d'où Dante et Béatrice s'envolent à travers les 9 ciels du Paradis, jusqu'à l'empyrée. Si la structure ascendante du poème, du négatif au positif, justifie le titre de Comédie, il ne rend compte cependant qu'imparfaitement du projet « totalitaire » de l'œuvre, au double niveau de l'expression et de la fiction, qui fait éclater les rigoureuses catégories de la rhétorique médiévale. Dante lui préfère d'ailleurs la définition de « poème sacré » (Paradis, XXVI), soit le déchiffrement et la révélation d'un ordre transcendantal à travers les contradictions de l'histoire humaine, et l'accomplissement de celle-ci dans l'éternité. Bien plus, en effet, que dans telle ou telle illustration des techniques « comiques » (Enfer, XVIII-XXX), c'est dans la double articulation exégétique et poétique de la Comédie et dans son extraordinaire extension linguistique que se manifeste le véritable « réalisme » de Dante. Et, dans cette ambition de représenter la totalité du réel et de l'histoire à la lumière de la transcendance, bien plus encore qu'à la leçon (exclusivement tragique ou sublime) de Virgile, c'est à la Bible que Dante demande de l'inspirer. Son idéal est d'atteindre à l'épaisseur signifiante de l'écriture biblique, à la polysémie de sa lettre. D'où l'infinie richesse de l'articulation du sens dans la Divine Comédie par rapport aux précédentes expériences de Dante. Excepté les tout premiers chants de l'Enfer, la représentation n'y est jamais résorbée dans le symbole, mais c'est précisément de la représentation au symbole, comme entre deux pôles, que naît la tension proprement poétique, à la fois narrative et métaphorique, de l'écriture dantesque.