Kezilahabi (Euphrase)
Romancier tanzanien de langue swahili (né en 1945).
Après douze années passées dans un séminaire catholique, il donne, alors qu'il est encore étudiant, Rosa Mistika (1972), un roman sur les conflits créés par l'éducation moderne chez une jeune femme. La clairvoyance psychologique de l'auteur et la clarté de sa langue sont manifestes dès ce premier livre. Ses romans suivants (Le monde est un champ chaotique, 1975 ; la Peau du serpent, 1979) posent les questions de la construction de la nouvelle société sur le plan individuel et constituent un commentaire sombre et sans concessions sur certaines impasses du socialisme tanzanien, dont la grande réussite reste d'avoir fait du kiswahili la langue officielle, et donc d'avoir donné un public à un romancier critique. E. Kezilahabi est aussi un théoricien de la littérature et enseigne à l'université du Botswana.
Khadra (Yasmina)
Romancier algérien de langue française (Oran 1955).
C'est le pseudonyme de Mohammed Moulessehoul, officier dans l'armée algérienne, qui a publié d'autres romans sous son vrai nom, et dont le premier pseudonyme était Commissaire Llob, également héros d'une grande partie de ces romans noirs qui imposent brillamment le genre policier en Algérie, tout en y dénonçant la corruption et l'horreur quotidienne : le Dingue au bistouri (1991), la Foire aux enfoirés (1993), Morituri (1997), Double Blanc (1997), l'Automne des chimères (1998), les Agneaux du Seigneur (1998), À quoi rêvent les loups (1999). L'écrivain ne révèle sa véritable identité que dans sa récente autobiographie : l'Écrivain (2001).
Khaïr-Eddine (Mohammed)
Écrivain marocain de langue française (Tafraout 1941 – Rabat 1995).
Fondateur du mouvement « Poésie Toute » en 1964, il est aussi un membre actif, depuis Paris, de la revue Souffles, interdite en 1972. Son écriture vit de la rupture avec les formes traditionnelles de poésie comme avec l'usage convenu de la langue française, qu'il dynamite de l'intérieur pour en faire un instrument de subversion. Romans : Agadir (1967), Corps négatif (1968), le Déterreur (1973), Une odeur de mantèque (1976), Une vie, un rêve, un peuple, toujours errants (1978), Légende et vie d'Agoun'chich (1984). Théâtre : Moi, l'aigre (1970). Poésie : Nausée noire (1964), Soleil arachnide (1969), Ce Maroc ! (1975), Résurrection des fleurs sauvages (1981), Mémorial (1991). Son œuvre abondante semble ainsi en constante éruption, s'inscrivant dans une modernité fondatrice assez proche, somme toute, de celle de l'Algérien Kateb Yacine quelques années plus tôt.
Khal (Yusuf al-)
Poète libanais d'origine syrienne ('Ammâr al-Hisn, 1916 – Beyrouth 1987).
Après des études à l'université américaine de Beyrouth, il entreprit un long séjour aux États-Unis (1947-1955). De retour au Liban, il fonda avec Adonis en 1957 la revue Chi'r (1957-1967), qui fut au centre de la révolution poétique en Orient, puis la revue Adab en 1961, avec Unsî al-Hâjj. Auteur d'un drame en vers (Hérodia, 1954), il a également publié des recueils lyriques (Liberté, 1945 ; le Puits abandonné, 1958 ; Poèmes de la quarantaine, 1961 ; Poèmes choisis, 1963 ; la Deuxième Naissance, 1981).
Khaliastre (la Bande)
Mouvement littéraire yiddish (Pologne, 1922-1926).
Ce groupe d'écrivains, aux tendances expressionnistes et futuristes, rassembla à Varsovie des auteurs locaux et d'autres venus tant de la Russie soviétique que de l'ancienne monarchie des Habsbourg : I. J. Singer, P. Markish, M. Ravitch, Uri Zvi Grinberg, M. Broderzon. Leurs revues (Khaliastre, 1922, deuxième numéro : Paris, 1924, avec la participation d'Oser Warszawski) ; Di Wog, 1922 ; Albatros, 1922-1923), constituent l'expression la plus achevée de l'avant-garde littéraire yiddish.
Khalifa (Sahar)
Romancière palestinienne (Naplouse 1941).
Diplômée de l'université palestinienne de Bir Zeït et de l'Iowa, elle a fondé à Naplouse, à Gaza et à Amman des Centres d'affaires et d'études féminines qu'elle dirige actuellement, en terre palestinienne. Ses romans dénoncent les carcans emprisonnant la femme et le peuple palestinien, racontent l'occupation et la révolte, l'Intifada (Nous ne sommes plus vos servantes, 1974 ; Chronique du figuier barbare, 1976 ; la Foi des tournesols, 1980 ; l'Impasse de Bab Essaha, 1991 ; l'Héritage, 1997).
Khalil (Ibn Ahmad al-)
Philologue arabe ('Uman entre 706 et 721 – Bassora entre 776 et 791).
Il est considéré comme le principal fondateur de la philologie et de la métrique arabes. L'essentiel de sa gloire repose en effet sur, d'une part, le Kitab al-'Ayn, le premier dictionnaire arabe, et, d'autre part, sur l'explication et la fixation des règles de la métrique de la poésie classique : le système ainsi élaboré, fort ingénieux, fut appelé « science ('ilm) d'al-Khalil ».
khamriyya
Terme arabe désignant la poésie bachique (khamr renvoie ici au vin).
Les premiers exemples remontent à l'époque prémusulmane, mais c'est en Iraq, et secondairement au Hedjaz, que la khamriyya, au premier siècle de l'Islam, s'élabore comme genre propre, pour culminer ensuite, grâce à un Abou Nuwas, dans la Bagdad de l'époque abbasside. Lié à la musique et au plaisir, témoignant ainsi des libertés prises par les élites avec les réserves religieuses, le poème bachique a joui d'un succès énorme, mais il peut également désigner une ivresse non pas physique, mais purement spirituelle, amoureuse ou mystique.
Khamza (Khakimzade Niazi, dit)
Poète ouzbek (Kokand 1889 – Chakhimardan 1929).
Disciple de Fourkat et de Moukimi, auteur d'un Diwan lyrique (1905-1914) où percent déjà des thèmes sociaux, il évolue dans un drame (la Vie gâchée, 1916) et un célèbre cycle poétique sur la rose (Rose odorante, 1919) vers une attitude radicale. Animateur après 1917 d'un théâtre ambulant, il s'employa par ses satires et ses pièces à sensibiliser les masses au retard culturel, à l'injustice sociale, à la condition féminine, et périt lynché par des nationalistes (Maître et Ouvrier, 1918 ; les Fourberies de Maïsara, 1926 ; le Secret du voile, 1927).
Khansa (Tumadir Bint Amr, dite al-)
Poétesse arabe (vers 575 – millieu du VIIe s.).
Elle est connue surtout pour des élégies funèbres où, tout en sacrifiant aux thèmes éprouvés de la vieille poésie (gloire tribale et vertus du héros), elle les rehausse par l'intensité, la sincérité du sentiment. En effet, la perte de ses deux frères lui aurait inspiré ses plus belles compositions. Son personnage, dramatiquement riche, va servir aussi à alimenter des récits comparables à ceux des Mille et une nuits, où la poésie se mêle à la prose et l'héroïsme à la tragédie.