Speroni (Sperone)
Écrivain italien (Padoue 1500 – id. 1588).
Élève de Pomponazzi à Bologne, membre de l'Académie des Infiammati, commentateur, il est l'auteur de dialogues moraux (De l'amour, De la discorde, De l'usure, De la vie active et contemplative) et rhétoriques (Dialogue sur les langues, 1542) qui influencèrent le Tasse. Sa tragédie la Canace (1542) suscita de longues polémiques.
Sperr (Martin)
Auteur dramatique allemand (Steinberg, Bavière, 1944).
Il a participé au renouveau du théâtre populaire allemand, en particulier avec sa trilogie bavaroise : Scènes de chasse en Bavière (1966, filmé par P. Fleischmann, 1969), Récits de Landshut (1967) et Liberté à Munich (1971). Tout en restant dans le milieu traditionnel du Volksstück, en conservant ses personnages et son dialecte, en utilisant ses intrigues simples, ses effets grossiers, son manichéisme, Sperr, comme Fassbinder et Kroetz, veut mettre au jour dans la société allemande d'aujourd'hui les mécanismes d'oppression et d'exclusion du « fascisme ordinaire ».
Spicer (Jack)
Poète américain (Pasadena, Californie, 1925 – San Francisco 1965).
Son œuvre (Billy the Kid, 1959 ; le Chef du village jusqu'à l'éther, 1962 ; Langage, 1965 ; le Livre des poèmes pour magazines, 1966), proche de la Renaissance de San Francisco, mais en marge du mouvement beat, allie une recherche formelle très innovante fondée sur une théorie de la dictée et de l'improvisation à la conviction que le poète, en agissant sur le langage, joue un rôle politique et social fondamental.
Spielhagen (Friedrich)
Écrivain allemand (Magdebourg 1829 – Berlin 1911).
Nouvelliste (Quisisana, 1879 ; Maîtresse, 1898), auteur dramatique, théoricien du réalisme bourgeois (Contributions à la théorie et à la technique du roman, 1883), il fut un des romanciers les plus lus de son temps (Natures problématiques, 1861 ; Noblesse oblige, 1888 ; Sacrifice, 1899). Dans la tradition du Zeitroman, il décrit la société et ses bouleversements, sans pourtant s'attarder sur la misère ouvrière (le Marteau et l'Enclume, 1869). En admirateur de F. Lassalle (dont il fait le héros de En rangs, 1867), il tempère son réalisme par ses convictions libérales et son optimisme social.
Spiess (Henry)
Poète suisse d'expression française (Genève 1876 – id. 1940).
Au terme d'études de droit, il se rendit à Paris et décida de se consacrer à la poésie. De retour à Genève, il fut un des animateurs de la Voile latine. Son œuvre, influencée par F. Jammes et Paul Fort, dessine une évolution qui, de l'amour de la terre, s'élève à l'amour de Dieu (Rimes d'audience, 1903 ; le Silence des heures, 1904 ; Chansons captives, 1910 ; le Visage ambigu, 1915 ; Attendre, 1916 ; l'Amour offensé, 1917 ; Saison divine, 1920 ; Simplement, 1922 ; Chambre haute, 1928).
Spinrad (Norman)
Écrivain américain (New York 1940).
Si ses premiers récits (les Solariens, 1966 ; les Pionniers du chaos, 1967 ; les Hommes dans la jungle, 1967) présentent déjà tous les éléments d'une pensée politique radicale sur les rapports entre l'ordre et la violence, c'est avec Jack Barron et l'éternité (1971) et Rêve de fer (1973) que cette vision du monde trouve sa véritable expression littéraire. Spinrad est un représentant typique de la génération contestataire des années 1960 et du « changement de conscience » qui, à travers les conflits raciaux, la guerre du Viêt Nam, la lutte pour les droits civiques, l'usage des drogues et la liberté sexuelle, a profondément bouleversé les États-Unis. Il dénonce la manipulation des masses par les médias (les Avaleurs de vide, 1979), recherche la solution des crises du monde contemporain dans une société conviviale dont les fondements moraux conjuguent l'hindouisme et les valeurs écologiques (la Grande Guerre des Bleus et des Roses, 1980 ; Chants des étoiles, 1982 ; Bleue comme une orange, 2001), et porte un regard critique sur le phénomème sectaire (les Miroirs de l'esprit, 1981 ; la Dernière Croisière du « Dragon-Zéphyr », 1982).
Spire (André)
Écrivain français (Nancy 1868 – Paris 1966).
Il prit part à tous les débats sur le judaïsme mondial, milita pour la création d'un État juif, fonda la Ligue des amis du sionisme et la revue Palestine. Ami de Péguy, il défendit Benda contre Bergson (Vers les routes absurdes, 1911). Sa recherche poétique et sa vocation politique ne font qu'un (la Cité présente, 1903 ; Et vous riez !, 1905 ; Versets, 1908 ; Poèmes juifs, 1908 ; le Secret, 1919 ; Poèmes de Loire, 1929 ; Poèmes d'ici et de là-bas, 1944 ; Poèmes d'hier et d'aujourd'hui, 1953). Il attacha cependant une grande importance aux problèmes de métrique et réfléchit sur la matière du langage poétique (Plaisir poétique et plaisir musculaire, 1949). On lui doit aussi des Souvenirs à bâtons rompus (1961).
Spitteler (Carl)
Écrivain suisse-allemand (Liestal 1845 – Lucerne 1924).
Influencé par Schopenhauer et J. Burckhardt, proche de Nietzsche, il tenta de réactualiser les mythes grecs dans la vie quotidienne suisse en composant des fresques épiques opposant la révolte de l'ascète au confort bourgeois (Prométhée et Épithémée, 1881, remanié en 1924) ou la beauté apollinienne aux menaces du destin (Printemps olympien, 1900-1906). Auteur de poèmes (Ballades, 1896) et d'un roman (Imago, 1906), où Freud a pu reconnaître l'amorce de ses théories, il fut aussi un pacifiste (Notre point de vue suisse, 1915). Le prix Nobel couronna son œuvre en 1919.
Spitz (Jacques)
Écrivain français (Nemours, Algérie, 1896 – Paris 1963).
Polytechnicien, il reste le grand écrivain français d'anticipation de l'avant-guerre. En douze ans, de 1935 à 1947, il a publié neuf récits marqués du sceau de l'ironie, dont trois sont des chefs-d'œuvre : l'Homme élastique (1938), qui explore l'hypothèse d'une humanité à taille variable, la Guerre des mouches (1938), qui place l'homme en concurrence avec des mouches devenues intelligentes, et surtout l'Œil du purgatoire (1945), sur la possibilité de voir l'avenir.
Sponde (Jean de)
Poète français (Mauléon 1557 – Bordeaux 1597).
Issu d'une famille protestante, il reçut une éducation humaniste par les soins de Jeanne d'Albret, dont son père était secrétaire. Ayant épousé le parti d'Henri IV, il se convertit au catholicisme en même temps que le roi, qui le nomma en 1592 lieutenant général de la sénéchaussée de La Rochelle. Mais son abjuration brisa sa carrière. Outre des traductions latines d'Homère, d'Hésiode et de la Logique d'Aristote, il a composé l'une des œuvres les plus éclatantes de la poésie baroque qui tient tout entière en deux minces recueils : les Amours, qui comprennent une chaîne de Sonnets, des Stances et une Élégie. Les poèmes sont construits sur de fortes antithèses logiques. Les éléments de la nature n'y sont évoqués que pour se heurter et s'annuler terme à terme. L'originalité d'un tel recueil est surtout d'échapper au réseau thématique conventionnel du canzoniere : ici, l'amour est tout entier désincarné, pour finir par se réduire à un principe d'élevation spirituelle qui doit permettre d'embrasser la seule vraie lumière. D'inspiration religieuse, les Amours visent à faire éclater aux yeux du croyant la vanité et les illusions de la vie mondaine. Cette poétique, dont la densité confine au silence, culmine avec les Douze Sonnets de la mort, suivis d'Autres Sonnets sur le même sujet, dans l'Essai de quelques poèmes chrestiens (1588). Fondée sur l'incommensurable écart entre la créature et le Créateur, cette « poésie métaphysique » apparaît indissociable de la pensée protestante et s'apparente à celle d'un John Donne. Théâtralisation souvent violente du parcours conduisant l'âme à se convertir en abandonnant les réalités de ce monde promises à la décrépitude, elle met en exergue l'inconstance de la vie humaine, poussant le lecteur à se tourner vers Dieu. Quant aux Méditations sur les psaumes (1588), elles annoncent en une prose coupée et anticicéronienne, certaines des Pensées de Pascal.