Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
G

Giguère (Roland)

Poète et graveur québécois (Montréal 1929 – id. 2003).

Illustrant lui-même ses œuvres, il a fréquenté à Paris le groupe Phases et le mouvement surréaliste, et publié à Montréal plusieurs recueils où une inspiration apocalyptique (Le défaut des ruines est d'avoir des habitants, 1959) se mêle à un lyrisme amoureux (Adorable Femme des neiges, 1959) et au désir de donner une voix au pays natal (l'Âge de la parole, 1965), tout en maintenant la prééminence de l'image visuelle (Forêt vierge folle, 1967 ; la Main au feu, 1973).

Gijsen (Jan Albert Goris, dit Marnix)

Diplomate et écrivain belge d'expression néerlandaise (Anvers 1899 – Louvain 1984).

Poète expressionniste (la Maison, 1925), il chercha l'authenticité de la vie et de l'écriture dans une poésie du détail quotidien et de l'objet extérieur, compensation au doute métaphysique qui l'envahit progressivement. Après vingt-cinq années passées aux États-Unis (les Tranchées de la Cinquième Avenue, 1981), il exprime dans ses romans (le Livre de Joaquim de Babylone, 1946 ; Télémaque au village, 1948) une sagesse résignée, qui côtoie sans cesse l'absurde (le Bien et le Mal, 1951) et qui mêle les images d'une société bourgeoise et européenne étriquée à celles de l'espace américain (le Chat dans l'arbre, 1953 ; le Fils aîné, 1955 ; Autoportrait évidemment flatteur, 1965).

gikuyu

Peu de textes écrits en gikuyu, langue parlée au Kenya autour du mont éponyme, existent avant le milieu du XXe siècle. Seule l'œuvre de Gakaara Wa Wanjau émerge avec une série de brochures et de romans d'amour éducatifs dans une perspective chrétienne. L'auteur, éditeur indépendant, actif dans les milieux politiques, raconte aussi sa détention dans les camps d'internement lors de la rébellion Mau-Mau (1954-1958) et obtient le prix Noma en 1984 pour son récit. Au même moment, Ngugi Wa Thiongo, écrivain anglophone réputé, commence à écrire en gikuyu des pièces de théâtre politique (Je me marierai quand je le voudrai, 1980), puis des romans (le Diable en croix, 1980 ; Matigari, 1982) qui rompent avec le didactisme chrétien des brochures précédentes et montrent une voie originale pour l'avenir des littératures de l'Afrique.

Gil y Zárate (Antonio)

Auteur dramatique espagnol (El Escorial 1793 – Madrid 1861).

De Paris il rapporta le goût du théâtre classique : ses premières pièces ne sont guère que des traductions ou des adaptations d'œuvres françaises (l'Importun, 1825). Il se laissa ensuite influencer par les tendances romantiques, sensibles dans ses drames historiques (Rosamunda, 1839 ; Guzmán le Bon, 1843). On lui doit aussi des comédies sentimentales (Cecilia, 1843).

Gilbert-Lecomte (Roger)

Écrivain français (Reims 1907 – Paris 1943).

Il se lie dès l'adolescence à Vailland et à Daumal, ses « phrères » simplistes, ses complices du Grand-Jeu. C'est dans cette revue centrale qu'il prône, via une « révélation, révolution », la destruction d'un modèle occidental qui a fait son temps et masque l'être véritable tel qu'il se donne à lire dans l'enfance. Par sa recherche de l'unité du primitif, par la drogue aussi, il évoque Rimbaud. La Vie l'Amour la Mort le Vide et le Vent (1933) ainsi que le Miroir noir (1937) éclairent sa quête de l'absolu.

Gilbert (Gabriel)

Écrivain français (Paris v. 1620 – id. 1680).

Secrétaire de la duchesse de Rohan puis de la reine Christine de Suède, auteur prolixe, il connut une certaine notoriété avec son théâtre, dans des genres variés : tragi-comédies (Marguerite de France, 1640 ; Téléphonte, 1642 ; Rhodogune, 1646), tragédies (Hippolyte ou le Garçon insensible, 1647), pastorales (les Amours de Diane, 1663 ; les Peines et les Plaisirs de l'amour, 1672), comédies (les Intrigues amoureuses, 1663).

Gilbert (Nicolas Joseph Laurent)

Écrivain français (Fontenoy-le-Château, Vosges, 1750 – Paris 1780).

Après avoir vainement cherché à faire reconnaître son talent (le Génie aux prises avec la fortune ou le Poète malheureux, 1772), il finit par trouver sa voie dans la satire antiphilosophique : le Carnaval des auteurs (1773), le Siècle (1774), repris dans le Dix-Huitième Siècle (1775), Mon apologie (1778) obtinrent les applaudissements de Fréron et du parti dévot.

Gilboa (Amir)

Poète israélien (Radzivilov, Ukraine, 1917 – Tel-Aviv 1984).

Il émigra en 1937 en Palestine, où il travailla comme ouvrier. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il s'engagea dans l'armée britannique, puis il prit part à la guerre d'Indépendance. Son premier recueil de poèmes (En signe) parut en 1942. Les recueils suivants (Chants à l'aube, 1953 ; Bleus et Rouges, 1963 ; J'ai voulu écrire les lèvres de ceux qui dorment, 1968 ; Florilège, poèmes d'ici et de là, 1971) traduisent, dans un langage simple et à travers une multitude d'images chargées de symboles, une vision tragique de la vie.

Gilgamesh

Héros de poèmes épiques akkadiens et sumériens. La littérature sumérienne ne connaît qu'un cycle de poèmes indépendants qui n'ont en commun que d'illustrer la geste d'un même héros. Ainsi le poème Gilgamesh et Agga raconte la rivalité entre le seigneur d'Ourouk et son suzerain le roi de Kish, qui peut se rapporter à des événements historiques (on possède une inscription du père de cet Agga de Kish). D'autres poèmes comme Gilgamesh et le Pays des vivants ou Gilgamesh et le Taureau céleste font place au merveilleux (apparition du monstre Houmbaba, interventions d'Innanna, la déesse sumérienne de l'amour).

   La plupart des mythes relatifs à Gilgamesh ont été rassemblés en un récit unique, rédigé en langue akkadienne, à l'époque palé-babylonnienne (XVIIIe-XVIIe s. av. J.-C.) : il ne reste plus que des fragments de cette œuvre, dont la spontanéité ne se retrouve plus dans la version tardive, connue par la bibliothèque du roi assyrien Assurbanipal (669-626 av. J.-C.), et qui ne couvrait pas moins de 12 tablettes, d'environ 300 vers chacune.

   Le thème central de l'épopée akkadienne est celui de l'amitié entre deux hommes, le roi d'Ourouk Gilgamesh et son compagnon Enkidou, d'abord présenté, par la déesse Aruru, comme un rival du monarque, sous la forme d'un être brutal et fruste que Gilgamesh arrivera progressivement à initier à la civilisation. La mort d'Enkidou met fin aux exploits (très semblables aux travaux d'Hercule) que tous deux accomplissaient. Dès lors, hanté par la disparition de son ami, Gilgamesh poursuit le secret de l'immortalité. Il le cherche auprès d'Outa-napishtim, le « Noé babylonien » : après lui avoir raconté le Déluge, auquel il échappa, ce dernier donne au héros plusieurs conseils qui se soldent tous par un échec (notamment lorsque le serpent lui ravit l'herbe qui porte le souffle de la vie). Gilgamesh rentre à Ourouk et, après avoir évoqué l'ombre d'Enkidou – qui lui décrit la vie dans l'au-delà –, il se résigne à sa condition de mortel. Il existe des versions hittite et hourrite de l'épopée de Gilgamesh, qui fut connue de tout le Moyen-Orient et probablement enseignée dans les écoles.