Klíma (Ivan)
Écrivain tchèque (Prague 1931).
Auteur dramatique (le Château, 1964 ; la Cour d'assises, 1968), il écrit des récits marqués par les camps de déportation puis les vexations du régime communiste (Une merveilleuse journée, 1960 ; Une heure de silence, 1963 ; Gaies Matinées, 1979), et qui parurent, de 1970 à 1989, en dehors de son pays (Un doux été, 1973 ; Amour et Ordure, 1988).
Klíma (Ladislav)
Écrivain tchèque (Prague 1878 – id. 1928).
Personnalité hors du commun et très discutée par ses contemporains, imprégné de la pensée de Schopenhauer et de Nietzsche, il publia anonymement le Monde en tant que conscience et rien (1904), les Traités et Dictats (1922), la Seconde et l'Éternité (1927), ainsi qu'un roman fantastique (la Souffrance du comte Sternenhoch, 1928).
Klinger (Friedrich Maximilian von)
Écrivain allemand (Francfort 1752 – Dorpat 1831).
Engagé dans l'armée autrichienne, entré en 1780 au service du tsar, il écrit des drames historiques, des réflexions sur le monde et la littérature (1803-1805) et un grand cycle romanesque, dont les Aventures de Faust et sa descente aux enfers (1791). Une de ses premières pièces, Sturm und Drang (1776), donne son nom au renouveau littéraire des années 1770. Violence des sentiments et du langage, mépris des règles de la dramaturgie et démesure des personnages (la Femme souffrante, 1775 ; les Jumeaux, 1776 ; Simsone Grisaldo, 1776) caractérisent le mouvement tout entier.
Klingsor (Léon Leclère, dit Tristan)
Peintre et poète français (La Chapelle-aux-Pots, Oise, 1874 – Le Mans 1966).
Il participa aux revues symbolistes la Vogue et la Phalange, avant de témoigner d'un impressionnisme maîtrisé, qui l'apparente à la fois à Vuillard et à Ravel (ainsi dans les mélodies des Chansons de ma mère l'Oye, 1905), dans ses recueils élégiaques (Schéhérazade, 1903 ; le Valet de cœur, 1908 ; Humoresques, 1921) et ses essais sur l'art (Goya, Chardin, Cézanne).
Kliouev (Nikolaï Alekseïevitch)
Poète russe (gouvern. d'Olonets 1887 – en Sibérie 1937).
Il ne fut pas seulement le « poète-paysan » des histoires de la littérature, mais une figure majeure de la poésie ; admiré des symbolistes, c'est lui qui révéla Essenine. Originaire d'un milieu rural, proche un moment des sectes, il chante dans son premier recueil (le Carillon des pins, 1911) l'univers paysan. Pour ce poète du paysage, la nature se confond avec la Providence. Après un recueil inspiré de son expérience mystique (Chansons fraternelles, 1912), il évoque dans Contes des forêts (1913) la Russie païenne, populaire, avec sa démesure et sa mélancolie. Il accueille la révolution comme la réalisation d'une forme de socialisme mystique, mais très vite percent des motifs tragiques (le Pain du lion, 1922) : le suicide d'Essenine, sur lequel il écrit une magnifique Lamentation (1926), et les persécutions le confortent dans son rejet. Son dernier recueil, qui reprend des poèmes anciens, l'Isba et le champ, sort en 1928. En 1933, il entreprend un cycle (Destruction) dans lequel il parle ouvertement de la famine et de l'extermination des koulaks ukrainiens. Déporté en 1934, il est fusillé en 1937.
Klitgaard (Mogens)
Écrivain danois (Copenhague 1906 – Aarhus 1945).
Son premier roman (Il y a un homme dans le tram, 1937) – dont les douze chapitres se déroulent au cours des douze mois de l'année et sont parsemés de notes authentiques prises au jour le jour – décrit la vie terne du petit-bourgeois, incapable de sortir de sa médiocrité. Le vagabond de Dieu attiédit l'air pour les moutons tondus (1938), la bonne à tout faire Elly Petersen (1941) sont eux-mêmes victimes de la pesanteur des choses.
Klopstock (Friedrich Gottlieb)
Poète et auteur dramatique allemand (Quedlinburg 1724 – Hambourg 1803).
Luthérien convaincu, familier des auteurs anciens, il fait ses études de théologie à l'université d'Iéna (1745), puis à Leipzig (1746), où il écrit la même année les trois premiers chants d'un vaste poème épique, la Messiade, qui, à l'inverse du Paradis perdu de Milton, montrera la rédemption de l'homme, grâce au sacrifice divin du Messie. Les trois premiers chants de cette œuvre, qui en comptera vingt, paraissent en 1748 dans les Bremer et Beiträge et connaissent aussitôt un immense succès, confirmé par la parution des premières Odes (le Disciple des Grecs, Aux amis), fortement marquées de piétisme. Le succès du poème et l'influence qu'il exerça sont dus à son originalité par rapport aux épopées antiques mais aussi au fait que, première grande œuvre poétique allemande, il ouvrait la voie au développement d'une littérature nationale authentique. De 1751 à 1770, Klopstock séjourne à Copenhague, où il poursuit l'écriture de la Messiade. À la même époque, il découvre les mythes de la vieille Germanie et se consacre à la composition d'une épopée dont le héros est le légendaire Hermann (Arminius). Trois drames naissent de cette tentative : la Bataille d'Arminius (1769), Arminius et les Princes (écrit en 1767, publié en 1784) et la Mort d'Arminius (1787). Par ses drames « bardiques », Klopstock se fait l'initiateur d'une littérature puisant aux sources germaniques. Ce cosmopolite, qui vécut ses meilleures années au Danemark et fut fait, en 1792, citoyen d'honneur de la République française, apparaît comme un précurseur de l'idée nationale.
Klossowski (Pierre)
Écrivain et peintre français (Paris 1905 – id. 2001).
C'est le fils aîné du peintre et critique d'art polonais Erich Klossowski et le frère du peintre Balthus. Son œuvre est une réflexion sur l'articulation du corps et du langage. D'un côté, le raisonnement est conçu comme théologique ; de l'autre, le corps est vécu comme pervers. L'obscène est ainsi la réflexion commune du corps et du langage. Dieu et la grammaire, unis depuis Nietzsche, sont mis au service de l'Antéchrist, de Dionysos. L'unité de la théologie (Klossowski sera novice chez les dominicains et participera, en 1945, à la fondation de la revue Dieu vivant) et du voyeurisme est réalisée, répondant ainsi au problème logique traditionnel des rapports du raisonnement et de la description. Capitale est ici, avec celle de Bataille, l'influence de Sade (Sade, mon prochain, 1947), qui lui-même fait systématiquement alterner développements philosophiques et « tableaux » licencieux. Le pornographe est le répétiteur. L'itération est la voie du corps, le répons son parcours. Le Baphomet (1965), dont l'intrigue a pour cadre une commanderie de l'ordre des Templiers, pose la nature théologique du dilemme mort de moi/mort de Dieu. Le moi substitué à la substance divine, c'est, pour Klossowski, un faux changement – le sujet étant une fiction grammaticale (Nietzsche) : moi est Dieu, et la mort de Dieu, la mort de moi. D'où la vanité des réalités, et l'importance des fantasmes, qui subliment les contraires. Seul le fantasme « réfléchit ». Le cérémonial, la pâmoison, le jeu de soi par soi, la syntaxe, faite de cascades et de suspens, participent chez Klossowski d'une même flexion : le corps est langage parce qu'il est, lui-même, flexion (la Vocation suspendue, 1950 ; le Bain de Diane, 1956 ; les Lois de l'hospitalité, 1965, [réunissant Roberte ce soir, 1953 ; la Révocation de l'édit de Nantes, 1959, et le Souffleur, 1960] ; Un si funeste désir, 1963 ; Nietzsche et le cercle vicieux, 1969). Klossowski a traduit le Gai Savoir de Nietzsche et le Nietzsche de Heidegger, ainsi que l'Énéide de Virgile et la Vie des Césars de Suétone. Ses dessins quant à eux semblent échappés d'une lanterne sourde ; les jaunes et les bleus ombrés y dominent. Ils sont le fidèle prolongement de l'œuvre écrite, avec leurs obsessions, leurs violations et leurs élévations. La technique même, exténuante (crayons de couleur pour grandes surfaces), rend plus paradoxale le but du peintre : surprendre le public, en lui faisant pénétrer une action ; d'intrus, il devient quasi acteur, en une saisissante théâtralisation. La suspension picturale rejoint directement les principaux thèmes de l'œuvre écrite : elle est à la fois brusquerie, surprise, gage d'éternité, rouerie fantomale, manie de l'alternance et de la discontinuité (le Baphomet au moment voulu, 1972 ; Roberte à l'hôtel de Longchamp, 1979 ; la Gladiatrice, 1981 ; le Baphomet et le Grand Maître, 1982). Les essais des Écrits d'un monomane (1933-1939), publiés en 2001, croisent déjà les fils de l'œuvre que Klossowski développera.