Ibuse Masuji
Écrivain japonais (Fukuyama 1898 – Tokyo 1993).
Il se destine d'abord à la peinture de style traditionnel (nihon-ga) avant de s'orienter, au cours de ses études à l'Université Waseda de Tokyo, vers la création littéraire. De ses premières nouvelles on retient surtout la Salamandre (1929), conte allégorique composé dès 1923. Déjà apparaissent deux composantes de l'œuvre d'Ibuse : la précision quasi picturale de son trait, et un humour qui se tempère pourtant de mélancolie et de tendresse. Ces qualités vont ensuite s'affiner, notamment dans l'évocation burlesque du Tokyo d'après-guerre, vu à travers le regard détaché d'un vieux médecin, Pas de consultations aujourd'hui (1949-1950). Mais c'est Pluie noire (1965-1966), récit de la vie des habitants d'Hiroshima après le bombardement atomique, qui révèle le mieux sa vision désabusée du monde. Ibuse occupe dans la littérature japonaise contemporaine une place originale.
Icaza (Jorge)
Diplomate et écrivain équatorien (Quito 1906 – id. 1978).
Après avoir publié quelques pièces de théâtre et un recueil de nouvelles rurales (Glaise de la sierra, 1933), il devint célèbre avec son roman la Fosse aux Indiens (1934), dans lequel il relate, avec un réalisme brutal, l'histoire d'une communauté indienne des hauts plateaux, exploitée par des Blancs et finalement massacrée lors d'une jacquerie. Ses romans suivants naissent de la même inspiration dénonciatrice (Dans les rues, 1935 ; Cholos, 1937 ; Une demi-vie de poudre aux yeux, 1942 ; Fils du vent, 1948). Ses derniers récits, l'Homme de Quito (1958) et la trilogie autobiographique d'Atrapados (1972), poursuivent sa description de la réalité sociale équatorienne. Précurseur du groupe de Guayaquil, Icaza reste avant tout attaché au courant de l'indigénisme, dont il fut l'un des chefs de file.
Ichikawa Danjuro
Acteur japonais (Edo 1660 – id. 1704).
Dès l'âge de 14 ans, il imposa sur une scène de kabuki à Edo sa « manière rude » (aragoto), caractérisée par l'emphase du jeu et l'extravagance des maquillages et des costumes. Fondateur d'une prestigieuse lignée de comédiens, il s'adonna également, sous le nom de Mimasuya Hyogo, à la composition dramatique. Il mourut poignardé sur scène par l'acteur Ikushima Hanroku.
idjaz
Ce terme arabe, qui désigne l'« inimitabilité » du Coran, a suscité des études minutieuses comme celles d'al-Djurdjani. Le texte coranique a en effet constitué pour la littérature arabe à la fois un modèle tenu pour inaccessible, et une incitation. Certains auteurs se sont risqués à s'en inspirer, à le pasticher. Le Coran étant qualifié de « défi » par la doctrine établie, il s'agissait en l'espèce de contre-défis caractérisant des attitudes d'effraction ou d'ironie, lesquelles ne font pas plus défaut dans la civilisation islamique que dans n'importe quelle autre.
Idris (Suhayl)
Écrivain libanais (Beyrouth 1925 – id. 2008).
Fondateur à Beyrouth de la revue al-Âdâb (1953), professeur à l'Université américaine, traducteur de Sartre et de Camus, il est l'auteur de nouvelles (Désirs, 1947 ; Feux et Neiges, 1948 ; Larmes amères, 1956), de romans (Quartier latin, 1953 ; Nos doigts qui brûlent, 1962) et de pièces de théâtre (Fleur de sang, 1969).
Idris (Yusuf)
Écrivain égyptien (al-Bayrum 1927 – Londres 1991).
Médecin, il publie très tôt des nouvelles qui l'imposent d'emblée (les Nuits les moins chères, 1954 ; la République de Farhat, 1956 ; la Fin du monde, 1961 ; Une maison de chair, 1971). Il écrivit aussi des romans (le Héros, 1957 ; le Péché, 1959 ; Des hommes et des taureaux, 1964) et des pièces de théâtre en langue dialectale (le Roi du coton, 1957 ; le Moment critique, 1958 ; al-Farâfîr, 1964, le Troisième Genre, 1971). L'évocation fouillée des sentiments, la qualité de l'analyse psychologique, l'humour et la spontanéité d'une expression usant largement de la langue quotidienne servent une œuvre qui, surtout réaliste, parfois fantastique, s'enracine profondément dans l'Égypte et dans son peuple.
Idrus
Écrivain indonésien (Padang 1921 – id. 1979).
Employé du Balai Pustaka, rédacteur de la revue Indonesia, il travailla au service de la publicité de la compagnie aérienne Garuda puis à la Radio Republik Indonesia. Sous le régime de Soekarno, il s'exila en Malaisie puis en Australie. Il est considéré comme le promoteur de l'Angkatan 45 dans le domaine de la prose. Ses premières œuvres sont d'abord de tonalité romantique (ainsi sa nouvelle Ave Maria ou sa pièce Quelle chose horrible que la vengeance !), puis évoluent rapidement vers le réalisme, voire le cynisme, décrivant l'amère réalité de la vie quotidienne sous l'occupation japonaise (Notes souterraines, 1942-43). C'est le ton qui prévaut dans ses recueils ultérieurs (Surabaya, 1950 ; les Yeux ouverts, 1961), ses romans (la Femme et le nationalisme, 1949 ; Aki, 1950 ; l'Amour-propre des hommes, 1963) et son théâtre (la Famille Surono, 1948).
Iffland (August Wilhelm)
Auteur dramatique allemand (Hanovre 1759 – Berlin 1814).
Acteur puis directeur du Nationaltheater de Mannheim, où furent créées la plupart de ses pièces (œuvres de circonstance, drames bourgeois, comédies larmoyantes inspirées de Lessing et de Diderot), il dirigea, à partir de 1796, le Théâtre royal de Berlin, où il monta les œuvres de Goethe et de Schiller. Ses pièces ont monopolisé, avec celles de Kotzebue, près du tiers du répertoire des théâtres allemands à la fin du XVIIIe s., mais elles se démodèrent rapidement. Ses Mémoires (1798) éclairent le contexte théâtral dans lequel naquit le classicisme allemand.
igbo
L'igbo est le nom de la variété écrite de la langue parlée par les Igbo, qui peuplent ce qui fut l'éphémère État du Biafra (1967-1970), au sud-est du Nigeria. Les Igbo sont plusieurs dizaines de millions et commercent dans toutes les villes du pays. À la différence des Yoruba, ils n'étaient pas organisés en royaume mais en villages, largement autonomes. Il ne fut donc pas aisé d'obtenir une transcription standard de leur langue, d'autant plus que la ville d'Onitsha, longtemps considérée comme le plus grand marché de l'Afrique, était sur le Niger, tout à l'ouest de la région, et voulait imposer sa prééminence sur les régions plus orientales. Telle est sans doute la raison de l'exceptionnel succès des romanciers igbo anglophones (Achebe, Ekwensi, Aluko) alors que la littérature en igbo peinait à s'affranchir des querelles dialectales. Dès les années 1930, les linguistes essayèrent d'encourager la fiction dans un igbo écrit : le premier texte, le roman Omenuko, de Pita Nwana (1933), vainqueur du concours de l'Institut international africain, est toujours lu, réédité et commenté : il raconte comment Omenuko vend ses concitoyens comme esclaves et, poursuivi par les remords, s'efforce de se racheter tout au long du roman. La définition en 1973 d'un comité de standardisation de l'igbo a été le signal d'une nouvelle production romanesque où le nom de Tony Ubesie se détache. Des poètes (notamment le romancier anglophone Achebe) privilégient une autre variété de langue et maintiennent active la querelle linguistique, dans une région très fortement christianisée et alphabétisée.