Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Leonardo de Argensola (Lupercio)

Poète et historiographe espagnol (Barbastro, Aragon, 1559 – Naples 1613).

Il a donné deux tragédies (Isabela, Alejandra) et près de 150 poésies lyriques dans la tradition latine et italienne. Historiographe comme son frère, Bartolomé (Barbastro 1562 – Saragosse 1631) a composé des poèmes exempts des excès du cultisme. Les poésies des deux frères, qu'on surnomma les « Horaces de l'Espagne », furent publiées par le fils de Lupercio (1634).

Leonetti (Francesco)

Écrivain italien (Cosenza 1924).

Fondateur, avec Pasolini et Roversi, de la revue Officina (1955), membre du Groupe 63, il fait porter sa réflexion sur les rapports entre politique et littérature, tout en poursuivant une œuvre de poète (Dans un échec, 1979 ; Choses du ciel, 1989 ; les Écrits infinis, 1994) et de romancier (Fumée, feu et taquinerie, 1956 ; Connaissance par erreur, 1961 ; l'Incomplet, 1964 ; l'Art long, 1992 ; Des Pieds en quête de nourriture, 1995 ; les Tout Petits et l'ensorceleuse, 1998).

Leonidze (Giorgi Nik'olozis dze)

Poète géorgien (P'at'ardzeuli, rég. de Sagaredjo, 1899 – Tbilisi 1966).

Il est l'un des chantres de la terre géorgienne, lié aux symbolistes des Tsisperi q'ants'ebi (la Nuit de Ninots'minda ; Chant de la première neige, 1926), puis de la Révolution mise en perspective dans l'histoire de Géorgie (Samgori, 1950 ; Portoxala, 1951). Son récit, l'Arbre du désir (1962), fut porté à l'écran en 1976 par Tengiz Abuladze.

Leonov (Leonid Maximovitch)

Écrivain russe (Moscou 1899 – id. 1994).

Il est d'abord remarqué comme styliste (Bouryga, 1922), mais devient célèbre avec les Blaireaux, roman de 1924 où le récit d'une révolte paysanne contre l'État prolétarien traduit l'affrontement des principes de liberté et d'ordre. La structure du Voleur (1927), complexe (il s'agit d'un roman dans le roman), lui permet de porter un point de vue duel sur la révolution, facteur de progrès mais aussi de destruction, en décrivant la déchéance d'un révolutionnaire déçu et tombé dans la délinquance. Les romans qu'il consacre aux constructeurs de la vie nouvelle (la Rivière Sot, 1930) sont loin du modèle officiel du héros positif. Dans les années 1930, il se tourne vers l'écriture dramatique : la Tempête (1939) évoque les répressions massives qui se sont abattues sur la Russie. Correspondant de guerre, il évoque dans des pièces et des récits l'héroïsme des combattants (l'Invasion, 1942 ; la Prise de Vielikochoumsk, 1944). De 1950 à 1953, il travaille à la Forêt russe, roman qui retrace le conflit opposant un savant intègre à un arriviste ; l'enjeu en est la forêt, symbole du lien que Leonov établit entre l'homme soviétique, son peuple et sa culture. En 1994 paraît le dernier roman de Leonov, Pyramide, entrepris au début des années 1940 et où, dans une esthétique qui mêle réalisme et symbolisme, l'écrivain philosophe se pose la question du bien et du mal, se demandant pourquoi le peuple russe s'est éloigné de Dieu.

Leopardi (Giacomo)

Poète italien (Recanati 1798 – Naples 1837).

Les rêves héroïques de gloire et d'action du jeune comte Leopardi, nourri des idéaux classiques, furent très tôt contrariés par la maladie, par un milieu familial réactionnaire, provincial et dévot, par la médiocrité d'une période historique de stagnation succédant à l'épopée napoléonienne. Se considérant comme exilé dans son siècle, il en vitupère la décadence morale, intellectuelle et politique, au nom de la grandeur et de l'énergie des Anciens auxquels il emprunte surtout une vision matérialiste du monde, démasquant l'idéalisme des idéologies romantiques. La seule évasion, qu'enfant, il se concède est de fréquenter la bibliothèque paternelle. Érudit précoce, il écrit une Histoire de l'Astronomie à 15 ans et compose à 17 ans un Essai sur les erreurs populaires des Anciens. En 1819, il entreprend la composition de l'Infini, où l'exercice de la pensée est défini comme jouissance métaphorique d'un infini imaginaire. Après une tentative de fugue et un bref séjour à Rome en 1821, dont il est déçu, il mènera une existence itinérante (Milan, Bologne, Florence, Pise, Florence, Naples à partir de 1833), entrecoupée de courtes visites à Recanati, occupée à des travaux d'érudition : d'où les deux volumes anthologiques (prose et poésie) de la Chrestomathie italienne (1826-1827). Le premier tome, ordonné par genres, accorde une grande place à Galilée. Le second, chronologique (XVIe-début XIXe s.), exclut les poèmes épiques. Considéré comme le plus grand poète italien depuis Pétrarque, il est à l'origine de la poésie italienne moderne. Si ses Poésies lyriques, publiées entre 1824 et 1835, lui apportent une renommée mondiale, elles ne constituent toutefois qu'une infime partie de son œuvre. Son journal posthume, Mélanges (1817-1832), transpose l'autobiographie sur le plan de la méditation philosophique. La critique littéraire et la réflexion linguistique y occupent une place de premier plan. Ses dialogues philosophiques Petites Œuvres morales (1827-1833), qui révèlent l'ironie désespérée de son athéisme hérité du matérialisme antique, sont une méditation assidue sur la mort. Expérience radicale de la négativité et de la mort, le pessimisme léopardien s'exprime tour à tour à travers une vision catastrophique de l'histoire (À l'Italie) et une méditation sur la fuite du temps : dans À Silvia (1828), le poète déplore sa jeunesse enfuie en pleurant la mort d'une jeune fille aimée, prématurément disparue. L'impossibilité d'aimer est le thème de Aspasie et l'hostilité de la nature à l'égard de l'homme celui de Chant nocturne, 1831. Le Genêt (1836, mais publié en 1845), de structure libre, est une méditation stoïque sur la précarité de la condition humaine comparée à la fleur du genêt qui embaume les pentes du Vésuve. Pendant longtemps, on a considéré la réflexion philosophique matérialiste de Leopardi comme un pur élément extérieur qui aurait nui à sa création poétique. Aujourd'hui, non seulement on pense que la philosophie de Leopardi constitue un ensemble cohérent et très profond, mais qu'elle est même l'élément fondateur de sa poésie. Ainsi, on a parlé d'une « pensée poétique » qui se charge d'exprimer la douloureuse vérité de l'existence humaine. En ce sens, les écrits de la dernière période de sa vie sont assez révélateurs. Ils tournent autour de la question de la matérialité de l'homme, et donc de la fragilité de son existence, toujours précaire. L'originalité de Leopardi consiste en l'union de cette conscience irrémédiable de la souffrance humaine avec l'espoir de pouvoir trouver quand même des formes de résistance dans l'association des hommes. Le genêt en témoigne admirablement : étant le symbole d'un être naturel qui est dévasté par la Nature, il a toutefois toujours la force de renaître comme une fleur « collective ». Dans le « lent genêt », Leopardi a peut-être trouvé dans sa maturité un moyen pour faire de la vertu humaine non plus un simple témoignage de protestation contre l'inexorabilité de la Nature, mais une forme de résistance qui se révèle dans la « confédération ». L'homme reste un « néant », mais il peut trouver une façon d'exister différemment, en prônant une résistance collective. La correspondance complète de Leopardi, récemment éditée, s'est révélé un outil de travail critique utile.