Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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pataphysique

Terme créé dès 1894 dans Ubu cocu par Alfred Jarry pour désigner la « science des solutions imaginaires qui accorde symboliquement aux linéaments des propriétés des objets décrits par leur virtualité ». Ubu et Faustroll en seront les deux experts. Dans les Gestes et opinions du Dr Faustroll, pataphysicien (1898, publié en 1911), les « Éléments de pataphysique » opposent l'induction à la déduction, l'accident au général, le paradoxal au consentement universel. Par d'autres passages du même « roman néoscientifique », on comprend que la pataphysique affirme l'identité des contraires et qu'elle spécule, au-delà de la métaphysique, sur la surface de Dieu qui est « le point tangent du zéro et de l'infini ». Ces principes entraînent la liberté d'indifférence et l'idée d'analogie universelle. Née dans la cour de récréation du lycée de Saint-Brieuc, la pataphysique est une création de l'esprit d'enfance, qu'elle perpétue dans ses œuvres. Un essai de René Daumal (la Pataphysique et la révélation du rire, 1929), les œuvres du prétendu Julien Torma et surtout les travaux du Collège de pataphysique, de Boris Vian et de Raymond Queneau en développent les caractères essentiels.

Pater (Walter Horatio)

Écrivain anglais (Londres 1839 – Oxford 1894).

Lié aux préraphaélites, influencé par Ruskin, il fait de l'esthétisme une valeur quasi religieuse, assimilant les extases psychique et sexuelle et répudiant la morale du devoir au profit de celle de l'accomplissement individuel (Études sur l'histoire de la Renaissance, 1873 ; Portraits imaginaires, 1887 ; Appréciations, 1889 ; Platon et le platonisme, 1893 ; Études grecques, 1895). Ses romans (Marius l'Épicurien, 1885 ; l'Enfant dans la maison, 1894 ; Gaston de Latour, 1896) placent la recherche et l'épreuve de la beauté dans la perspective lancinante de la mort.

Paterson (Andrew Barton, dit Banjo)

Poète et journaliste australien (Narrambla, Nouvelle-Galles du Sud 1864 – Sydney 1941).

Il fut correspondant de guerre en Afrique du Sud pendant la guerre des Boers, en Chine et aux Philippines, en France pendant la Première Guerre mondiale (Dépêches joyeuses, 1935). Rédacteur en chef (1904) du Sydney Evening News, il collabora au Town and Country Journal et au Sydney Morning Herald. Il est surtout l'auteur très populaire de The Man From Snowy River and Other Verses (1895) et de la Dernière course du Rio Grande (1902) : ses ballades reprennent les thèmes et les formes des chansons folkloriques anonymes du bush et célèbrent la vie rurale, dont la fameuse « Waltzing Matilda », qui a été mise en musique. On lui doit aussi des livres pour enfants (les Animaux oubliés par Noé, 1933).

Pathelin (la Farce de Maître)

Composée vers 1460-1465, cette farce, qui est l'une des premières manifestations de cette forme théâtrale et qui en est justement considérée comme le chef-d'œuvre, a joui d'emblée d'un succès jamais démenti. Elle fait aussi figure de remarquable exception : elle est trois fois plus longue que les autres farces, l'action en est très complexe ; elle donne une place prépondérante et inhabituelle aux motivations psychologiques des personnages ; elle ne tombe jamais dans la vulgarité tout en jouant d'une déconstruction systématique du langage organisé. Le ressort principal en est le principe, depuis longtemps banalisé par les fabliaux par exemple, du trompeur trompé. Sur trois thèmes de farce mettant en scène des personnages aussi fripons les uns que les autres – le drapier volé, la maladie feinte de Pathelin qui se met à divaguer en toutes sortes de langues, l'habile avocat berné par un berger –, l'auteur, resté inconnu, a construit une solide structure en deux parties : l'avocat Pathelin, activement aidé par sa femme, la très habile Guillemette, mystifie le drapier en emportant son drap, puis en feignant d'être malade quand l'autre vient réclamer son argent, mais l'avocat, prenant la défense d'un berger coupable de fraude au détriment du drapier, est à son tour berné quand son client use du subterfuge qu'il lui a suggéré – répondre « bée » à toutes les questions – pour ne point le payer. La force comique est liée à la toute-puissance de la ruse qui remet en cause la hiérarchie sociale et brouille les repères moraux, qui réduit aussi à néant le prestige du discours, le dernier mot de la pièce étant l'onomatopée : « bée ! »

Patin (Gui)

Écrivain français (Hodenc-en-Bray 1602 – Paris 1672).

Doyen de la faculté de médecine en 1650, Gui Patin fréquente les milieux libertins, dont il partage l'esprit déniaisé et fort. Ses Lettres, publiées en trois recueils (1692, 1695, 1718), forment une précieuse chronique du début du règne de Louis XIV. Il y vitupère le pape, les jésuites, mais aussi les protestants. Il se veut à l'aise dans les petits cénacles (chez Nicolas Bourbon, Hubert de Mortimer, les frères Dupuy) où l'on fustige tous les rigorismes et où l'on s'intéresse à l'épicurisme de Gassendi comme au libertinage de Naudé.

Patmore (Coventry Kersey Dighton)

Poète anglais (Woodford, Essex, 1823 – Lymington, Hampshire, 1896).

Les Fiançailles (1854) et les Épousailles (1856) constituent le début de son œuvre maîtresse, l'Ange du foyer (1858), vaste poème sur l'amour conjugal, complété par Toujours fidèle (1860) et les Victoires de l'amour (1863), tous inspirés par sa femme, morte en 1862. Devenu catholique (1864), il donna avec Éros inconnu (1877) une suite de 42 odes irrégulières, où domine l'inspiration chrétienne, puis une idylle (Amélie, 1878) avant de s'expliquer sur la Religion du poète (1893). Tendresse, piété, sentimentalisme marquent cet effort typiquement victorien pour placer l'amour conjugal, puis divin, au cœur de la vie.

Paton (Alan Stewart)

Écrivain sud-africain d'expression anglaise (Pietermaritzburg, Natal, 1903 – Hillcrest, Natal, 1988).

Célèbre pour un roman pathétique, Pleure, ô pays bien-aimé (1948), il évoque la dure réalité politique et humaine de l'Afrique du Sud dans une série de récits : Quand l'oiseau disparut (1953), le Bal des débutants (1961), Instruments de ta paix (1968). Président du parti libéral (1956-1958 ; 1961-1969), il a également écrit une biographie de l'ancien ministre libéral Hofmeyr et réuni ses essais et articles dans la revue Contact de 1958 à 1966. Après avoir évoqué sa femme disparue en 1967, il revient sur sa propre vie (Vers la montagne, une autobiographie, 1980) et fait un retour au roman avec Ah, mais ta terre est belle (1982).