Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
G

Grotius (Hugo de Groot, dit)

Diplomate et humaniste hollandais (Delft 1583 – Rostock 1645).

Juriste, il jeta les bases du droit international moderne (De jure praedae, 1604 ; Mare liberum, 1609 ; De jure belli ac pacis, 1625). Historiographe de Hollande (1603), il fut condamné à la prison perpétuelle en 1619 pour ses opinions religieuses (il était arminianiste) et politiques (en tant que partisan d'Oldenbarnevelt). Il s'évada et se réfugia en France, où il fut pensionné par Louis XIII avant de devenir ambassadeur de Suède. Auteur d'une apologie du christianisme destinée aux marins hollandais, d'ouvrages historiques qui célèbrent les qualités des Goths régénérateurs d'un empire romain décrépit, il édita Tacite, traduisit Euripide et donna une théorie de la tragédie qu'il illustra (Adamus exsul, 1601 ; Christus patiens, 1626 ; Sophompaneas, 1632).

Groult (Benoîte et Flora)

Romancières françaises : Benoîte (Paris 1920) et Flora (Paris 1924 – id. 2001).

Journalistes, les deux sœurs signent ensemble le Journal à quatre mains (1962), sur leur jeunesse bourgeoise, puis le Féminin pluriel (1963) et Il était deux fois (1967), qui feront d'elles deux grandes figures du féminisme de l'époque. Benoîte, davantage engagée, publie ensuite Ainsi soit-elle (1975), les Trois Quarts du temps (1983), les Vaisseaux du cœur (1988), et Flora se tourne vers des romans sentimentaux : Maxime ou la Déchirure (1972), Mémoires de moi (1975), le Paysage intérieur (1982), Belle ombre (1989). Un certain conformisme romanesque marque, sous leur plume, les limites des remises en question théoriques.

Groupe 47

Groupe littéraire allemand (1947 - 1967).

Son origine remonte aux premières rencontres, dans les camps de prisonniers de guerre américains, de Hans Werner Richter, Alfred Andersch, Walter Kolbenhoff, Walter Mannzen. Tous ont été antifascistes, mais ont été enrôlés comme soldats dans l'armée allemande et croient à la possibilité d'un renouveau radical de l'Allemagne après 1945. Dès 1946, Andersch et Richter créent la revue Der Ruf, qui sera interdite en avril 1947 par les autorités militaires américaines. En septembre 1947 a lieu la première réunion du Groupe 47. Ses membres partagent une même conception de la littérature : la langue allemande, corrompue par le national-socialisme, doit être dépouillée à l'extrême et les écrivains doivent éviter par-dessus tout le maniérisme, l'utopie et la recherche esthétisante. Les textes sont lus par leurs auteurs devant le groupe tout entier et soumis à une critique collective impitoyable. Durant les vingt années de son existence, le Groupe 47 a exercé une influence considérable sur la littérature contemporaine de la République fédérale d'Allemagne. Presque tous les principaux auteurs des années 1950 et 1960 ont été en liaison avec lui. Animé par Richter, le groupe a compté parmi ses membres réguliers des écrivains aussi connus que H. Böll, G. Eich, W. Jens, S. Lenz, I. Bachmann, A. Andersch, H. M. Enzensberger, G. Grass, W. Höllerer, M. Walser, P. Weiss.

Groupe 61

Groupe littéraire allemand créé en 1961 à Dortmund.

Il fut constitué d'écrivains issus de la classe ouvrière et désireux de donner « aux problèmes du monde du travail industriel contemporain et aux problèmes sociaux qui s'y posent » une plus grande place dans l'art et la littérature. Leurs publications ont su renouer avec la tradition de la littérature ouvrière de l'avant-guerre et ont fait à nouveau de la question sociale un thème littéraire, alors qu'au cours des années 1950 elle avait été négligée. L'auteur le plus important du groupe est Max von der Grün. À la fin des années 1960, l'influence du Groupe 61 déclina. Une partie de ses membres fondèrent en mars 1970 le Werkkreis Literatur der Arbeitswelt, qui se fixait comme objectif d'inciter les travailleurs eux-mêmes à prendre la plume pour apporter leur témoignage.

Groupe 63 (Gruppo 63)

Mouvement littéraire italien, constitué à Palerme en 1963, réunissant les principales tendances de l'avant-garde des années 1960, notamment le groupe des « Novissimi » (E. Sanguineti, A. Giuliani, A. Porta, N. Balestrini, E. Pagliarini), et plusieurs théoriciens ou critiques, dont U. Eco. Les vives divergences de pensée que connut le mouvement furent à l'origine de sa dissolution.

Grove (Frederick Philip)

Écrivain canadien d'expression anglaise (près de Saint-Pétersbourg, Russie, 1871 – Simcoe, Ontario, 1948).

D'origines suédoise et écossaise, il a étudié en Europe. La banqueroute de son père fit de lui un ouvrier agricole (À la recherche de l'Amérique, 1927), puis un instituteur, un fermier enfin. L'expérience de la prairie et de la misère nourrit ses romans (Pionniers des marais, 1925 ; Notre pain quotidien, 1928 ; le Joug de la vie, 1930 ; le Maître de l'usine, 1944), premiers exemples de l'esthétique réaliste au Canada.

Grumberg (Jean-Claude)

Auteur dramatique français (Paris 1939).

Fils d'un tailleur mort en déportation, il devient apprenti tailleur puis vendeur et représentant. Bientôt comédien, il écrit pour la télévision et le théâtre. Avec Demain une fenêtre sur rue (1968), sa première pièce, il s'attaque à un monde tissé de certitudes ; il ne cessera de dénoncer la bêtise des petits-bourgeois, l'agonie d'une société qui ne veut rien savoir du danger qui la menace (Amorphe d'Ottenburg, 1970 ; Dreyfus, 1975 ; En rev'nant d'l'Expo, 1975). À travers des personnages à la fois indifférents et complices, l'auteur interroge la France des années 1970, notamment sur la mémoire de la Seconde Guerre mondiale (l'Atelier, 1979). Sa dramaturgie, qui joue du théâtre dans le théâtre, de la fable allégorique ou de la tension entre l'histoire individuelle et l'histoire collective, suscite une reviviscence du passé et cherche à susciter la compassion, sans toutefois placer le spectateur dans une position de voyeur.

Grünbein (Durs)

Poète allemand (Dresde 1962).

Témoin de la fin de la R.D.A., il fut lauréat du prix Büchner à 33 ans (1995). Sa poésie, du premier recueil d'instantanés publié à l'Ouest en 1988, Zone grise, le matin, à Schädelbasislexikon (1991), « happy nécroloque » de la R.D.A., jusqu'aux cycles « transhistoriques » de Après les satires (1999), adopte un ton docte ou parodie l'idiolecte médiatique. Dans ses essais renonçant à toute construction de sens universaliste (Galilée arpente l'enfer de Dante, 1996), il pose les jalons d'un « neuro-romantisme » redevable du jeune G. Benn et cherche à réconcilier la poésie avec les sciences naturelles.