Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
S

Scutenaire (Louis)

Écrivain belge d'expression française (Ollignies 1905 – Bruxelles 1987).

Membre, dès 1926, du groupe des surréalistes bruxellois, il multiplie son attention poétique au monde sous la forme d'aphorismes, de boutades et de notations en tout genre (Mes inscriptions, 1945, 1964-1973, 1981 ; Textes automatiques, 1977). Les Vacances d'un enfant (1947) décrivent la prise de parti spontanée d'un enfant de bourgeois pour les ouvriers et domestiques et son plaisir à s'initier à leur langage.

Sealsfield (Karl Postl, dit Charles)

Écrivain autrichien naturalisé américain (Poppitz 1793 – Soleure 1864).

Moine défroqué, le « grand inconnu » quitta l'Autriche en 1823 pour l'Amérique du Nord. En 1827, il rédige les États-Unis d'Amérique du Nord, livre suivi par un réquisitoire violent contre son ancienne patrie : Austria as It Is (1828). Du traité politique, il passe au roman inspiré de J. F. Cooper (Tokeah ou la Rose blanche, 1833), et à un art narratif consommé dans les nouvelles du Livre des cabines (1841). À l'Europe, il oppose la vision d'une « démocratie aristocratique ».

Sebald (Winfried Georg)

Écrivain allemand (Wertach 1944 – Norwich 2001).

Il a quitté son pays et la « conspiration du silence » pour l'Angleterre en 1966. Vertiges (1990), enquête philosophique en Italie, est le volet initial d'un triptyque erratique de fictions documentaires. Il est suivi par un requiem mélancolique pour quatre destins d'exilés, les Émigrants (1992), et par les Anneaux de Saturne (1995), visions apocalyptiques sur fond de côtes anglaises. Tous ses romans, comme son chef-d'œuvre Austerlitz (2001), topographie de l'histoire d'une famille juive, s'accompagnent de photographies d'époque suggestives, véritables « mémentos métaphysiques ».

Sebbar (Leïla)

Écrivain française d'origine algérienne (Aflou 1941).

Après des essais remarqués sur le statut de la femme (On tue les petites filles, 1978 ; le Pédophile et la maman, 1980), elle s'est vite imposée comme une indispensable porte-parole des femmes de l'immigration (Fatima ou les Algériennes au square, 1981), puis des jeunes de cette même immigration, dans de nombreux romans (Shérazade : 17 ans, brune, frisée, les yeux verts, 1982 ; le Chinois vert d'Afrique, 1984 ; les Carnets de Shérazade, 1985 ; J.H. cherche âme sœur, 1987 ; le Fou de Shérazade, 1991 ; le Silence des rives, 1993) et nouvelles (la Jeune Fille au balcon, 1996 ; le Baiser, 1997 ; Soldats, 1999). Leïla Sebbar collabore également à France-Culture et à diverses revues littéraires.

Sébillet (Thomas)

Écrivain français (Paris v. 1512 – id. 1589).

Quoique disciple de Marot, il fut l'ami des poètes de la Pléiade, notamment de Du Bellay, qui lui dédia un sonnet des Regrets. Il est surtout connu pour son Art poétique francoys, publié à Lyon en 1548, qui constitue une transition entre les traités de la fin du XVe siècle et les manifestes doctrinaux de la Pléiade. Il ne rompt pas, comme le fera Du Bellay un an plus tard dans la Défense, avec la tradition nationale, notamment avec la tradition marotique qui garde sa faveur ; il retient encore bon nombre de genres médiévaux que répudieront les disciples de Ronsard (le rondeau, la ballade, le chant royal, le lai, le virelai). Mais, sur plusieurs points – la conception de la poésie comme une « divine inspiration », la place attribuée à des formes nouvelles comme le sonnet, l'importance conférée à l'imitation des Anciens, la faveur accordée à l'imitation et à la traduction –, Sébillet annonce la future doctrine de la Pléiade.

Sedaine (Michel Jean)

Auteur dramatique français (Paris 1719 – id. 1797).

Il débuta par des chansons, un vaudeville bouffon, la Tentation de saint Antoine, et une Épître à mon habit (1745). Auteur de Poésies fugitives (1750), d'un poème didactique, le Vaudeville (1756), il vint à l'art dramatique en 1756. Il accumula les succès à l'Opéra-Comique, avec l'aide de Philidor ou de Monsigny : On ne s'avise jamais de tout (1761), le Roi et le Fermier (1762), Rose et Colas (1764), ou, dans un genre plus sombre, le Déserteur (1769). Deux pièces sont restées au répertoire de la Comédie-Française : la Gageure imprévue (1768), badinage à la manière de Marivaux sur les dangers qui guettent un cœur sensible qui s'ennuie, et surtout le Philosophe sans le savoir (1765) la meilleure réussite de la « comédie sérieuse ». Sedaine montre un négociant, M. Vanderk, dans sa vie familiale, à la veille du mariage de sa fille. Mais Vanderk fils doit se battre en duel et toute la famille est bouleversée. Drame bourgeois, l'œuvre de Sedaine l'est d'abord par son contenu idéologique : elle fait un éloge vigoureux du commerce et des commerçants ; elle présente un tableau valorisé de la vie intime et domestique d'un aristocrate converti aux valeurs familiales et au mode de vie bourgeois. À la fin de sa vie, Sedaine se tourna vers l'opéra avec Richard Cœur de Lion (1784, musique de Grétry) et la tragédie (Maillard ou Paris, 1782).

Séféris (Georges)

Poète et diplomate grec (Smyrne 1900 – Athènes 1971).

Après une enfance en Asie Mineure, dont il gardera toujours la nostalgie, il s'installe avec sa famille à Athènes en 1914, fait des études de droit à Paris (1918-1924), et mène une carrière diplomatique qui se termine par un poste d'ambassadeur à Londres (1957-1962). Fortement influencé, à ses débuts, par la poésie symboliste française, il utilise d'abord le vers classique (Strophe, 1931), avant de découvrir la poésie de T. S. Eliot et d'opter pour le vers libre dans Légendaire (1935), où il trouve sa thématique propre, la difficile conciliation du passé glorieux et de la Grèce contemporaine. Son œuvre ultérieure (Cahier d'étude, 1940 ; Journal de bord I, II, III, 1940, 1944, 1955 ; la Grive, 1946 ; Trois Poèmes secrets, 1966), à la fois simple dans son expression et hermétique dans sa signification, développe cette vision d'une Grèce douloureuse. Le prix Nobel couronne son œuvre en 1963, tandis que ses Essais (1971) révèlent un critique hautement inspiré.

Sefrioui (Ahmed)

Écrivain marocain de langue française (Fès 1915 – ? 2004).

Ses contes (le Chapelet d'ambre, 1949) et ses romans (la Boîte à merveilles, 1954 ; la Maison de servitude, 1973) révèlent une volonté d'intériorisation de l'islam et un esprit épris de mystique. La violence formelle et politique des écrivains marocains qui lui ont succédé, comme Driss Chraïbi, Mohammed Khaïr-Eddine ou l'équipe de la revue Souffles, a injustement éclipsé cette écriture très maîtrisée, qu'on redécouvre maintenant.