Vair (Guillaume Du)
Orateur et philosophe français (Paris 1556 – Tonneins 1621).
D'abord maître des requêtes auprès du duc d'Alençon, il obtient, en 1584, la charge de conseiller au parlement. Étroitement impliqué dans la vie politique de l'époque, il s'oppose jusqu'en 1588 aux tentatives d'absolutisme du pouvoir royal. Après l'assassinat d'Henri III en 1589, Du Vair s'oppose aux manœuvres des Ligueurs et œuvre pour l'avènement au trône d'Henri de Navarre. C'est à cette époque qu'il prononce devant le parlement deux discours politiques décisifs, l'Exhortation à la paix adressée à ceux de la Ligue, et la Suasion de l'arrêt pour la manutention de la loi salique (1593). Devenu roi, Henri IV le nomme maître des requêtes, puis premier président du parlement d'Aix. Si l'on distingue deux versants – le premier, oratoire, le second, moral et philosophique – dans l'œuvre de Du Vair, l'un et l'autre sont en fait étroitement liés et sont au cœur de la réflexion que mène le premier XVIIe siècle sur l'éloquence, alors que la paix ramène l'espoir d'une véritable éloquence civile. Son traité De l'éloquence française (1595) défend le sublime et la tension sévère d'une éloquence devant trouver l'accord fondamental entre les passions que l'on veut provoquer et la parole. Son traité stoïcien la Constance fait le lien entre philosophie, passions et pouvoir du verbe. Condamnant l'usage des citations, il s'élève contre le « pédantisme » du discours savant au profit d'une éloquence dont l'honnêteté du XVIIe siècle saura se souvenir. Du Vair refuse enfin le style trop orné ou trop serré et obscur : entre Cicéron et Sénèque, il engage ainsi la prose d'art française sur les voies du « classicisme ».
Vaja-Pchavela (Razika'achvili Luk'a P'avles dze)
Écrivain géorgien (Tchargali, rég. de Ducheti 1861 – Tiflis 1915).
Fils d'un prêtre de village autodidacte, un temps instituteur, il mena une vie simple de paysan, labourant la terre, gardant les troupeaux et chassant dans ses montagnes. Durant les longues nuits du rude hiver pchav, il composait des poèmes et écrivait des nouvelles. Il ne descendait que rarement à cheval à Tiflis déposer chez ses éditeurs les manuscrits qu'il sortait de sa lourde besace. Ethnographe et folkloriste, styliste exceptionnel, c'est avant tout un immense poète qui écrivit aussi bien de courtes poésies (Amirani, 1884 ; l'Aigle, 1887 ; Je suis sur cette rive, toi sur l'autre, 1905) que de longs poèmes (Aluda Ketelauri, 1888 ; Baxt'rioni, 1892 ; l'Hôte, 1893 ; le Prix du sang, 1897 ; le Mangeur de serpents, 1901). Poète philosophe, dans une conception du monde profondément païenne et panthéiste, un peu magique parfois, il ne voit en l'homme qu'une créature parmi les autres qui toutes vivent, parlent, sentent et souffrent, allant jusqu'à regretter de n'être pas lui-même goutte de pluie ou flocon de neige pour abreuver la terre et renaître à l'infini. Il peint les pratiques ancestrales de la montagne géorgienne, hospitalité et vendetta, auxquelles nul ne peut se dérober sous peine de se retrouver à jamais exclu de la communauté.
Vajda (János)
Écrivain hongrois (Pest 1827 – Budapest 1897).
Engagé volontaire pendant la guerre d'indépendance de 1848, il vécut à partir des années 1850 de sa plume, rédigeant des brochures en faveur de la transformation libérale de son pays. Ses recueils de poèmes (Poésies, 1855 ; Petits Poèmes, 1872 ; Nouvelles Poésies, 1876), traditionnels dans leur forme, annoncent déjà le grand tournant de la poésie hongroise qui devait s'accomplir au début du XXe siècle.
Vâkif (Molla Panakh)
ou Molla Panakh Vaguif
Poète azerbaïdjanais (Salakhly, auj. région de Kazakh, v. 1717 – Choucha 1797).
Vizir des khans de Karabakh, il mena une politique active et tenta d'unir contre la Perse les peuples du Caucase. Disciple de Fizouli, il subit aussi l'influence des achougs, à qui il emprunte des formes populaires (gochma) pour célébrer l'amour terrestre (les Grues, la Violette, les Deux Beautés) et méditer sur les thèmes civiques (Je cherchais la vérité, Vois, Vidadi, les cœurs secs !). En 1797, il fut victime du coup d'État de Moukhammedbek Djevanchir. Conservée par la tradition orale, son œuvre fut collectée par Akhoundov et publiée en 1945.
Valach (Yona)
Poétesse israélienne (Israël 1944 – 1985).
Écrits dans un style saccadé et puissant, libéré des contraintes sémantiques et grammaticales et frôlant le parler populaire, ses poèmes dégagent une beauté sauvage. Les personnages qui peuplent ses recueils (par exemple : Paroles, 1967 ; les Deux Jardins, 1969 ; Poésie, 1976 ; Formes, 1985 ; Lumière sauvage, 1983) sont ses propres représentations. À travers eux apparaît toute une gamme de sentiments contradictoires mais inséparables, tels que l'amour et l'anthropophagie, la maternité et la stérilité, le sacré et le diabolique, la beauté et la laideur, le bien et le mal. Son œuvre d'avant-garde influença toute la poésie israélienne.
Valade (Léon)
Poète français (Bordeaux 1841 – Paris 1884).
D'abord secrétaire de V. Cousin, il fait carrière dans l'administration. Il rencontre P. Verlaine et publie quelques poèmes, collabore au Parnasse contemporain et fait paraître en collaboration avec Albert Mérat un recueil de vers : Avril, mai, juin (1863). Valade a laissé plusieurs volumes de vers (À mi-côte, 1873 ; l'Affaire Arlequin, 1882 ; Nocturnes, 1886) ainsi que des comédies en vers (Molière à Auteuil, 1876 ; la Raison du moins fort, 1889).
Valdelomar (Abrahám)
Écrivain péruvien (Ica 1888 – Ayacucho 1919).
Il devint rapidement un maître du conte. La Ville des morts (1911) révèle l'influence de Poe, et la Ville des phtisiques (1911), celle de Wilde. À partir du Cavalier Carmelo (1918), Valdelomar traite de thèmes ruraux, dans des contes costumbristes remarquables, historiques dans la Mariscala ou indigénistes dans les Fils du soleil (1921). Son essai Belmonte le tragique compte parmi les plus importants de son époque.
Valdés (Gabriel de la Concepción)
Poète cubain (La Havane 1809 – Matanzas 1844).
Auteur, sous le pseudonyme de Plácido, de poèmes amoureux (Tristes Mémoires !), de lettrillas pleines de saveurs populaires (la Fleur de café, la Fleur de canne, la Fleur de cire), de poèmes picaresques (Ainsi va le monde), d'épigrammes, de sonnets, de légendes (le Fils de la malédiction, 1843), d'odes patriotiques et de romances (Jicotencal), il écrivit quelques jours avant de mourir deux sonnets et deux odes d'une émouvante inspiration.