Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Sachs (Hans)

Écrivain allemand (Nuremberg 1494 – id. 1576).

C'est le plus important des Meistersinger, le plus connu aussi depuis que Richard Wagner a fait de lui le personnage central de ses Maîtres chanteurs de Nuremberg (1868). Cordonnier et poète, avant d'être reçu maître et de pouvoir ouvrir son échoppe, il a fait le traditionnel tour d'Allemagne (1511-1516) en se perfectionnant dans son métier comme dans son art. Partisan de la Réforme, il en défend les idées dans plusieurs dialogues et consacre un long poème à Luther (le Rossignol de Wittenberg, 1523). Il a laissé une œuvre extrêmement abondante, quoique peu originale : plusieurs milliers de poèmes, environ deux cents œuvres dramatiques, ou du moins dialoguées. Les sujets et les personnages sont le plus souvent tirés de ses lectures (la Bible, des traductions d'auteurs grecs, latins, français et italiens, des recueils de fabliaux, les Volksbücher, etc.), mais semblent tous appartenir à l'univers de Sachs, ce monde des petits-bourgeois et artisans dont il prêche avec conviction la morale et le bon sens pratique. Ses farces et jeux de carnaval (Fastnachtsspiel), où il fait rire aux dépens des maris trompés, des curés et des paysans ignares, sont d'amusants tableaux de genre et gardent aujourd'hui encore de la fraîcheur (l'Écolier voyageur au paradis, 1550 ; Saint Pierre et les Lansquenets, 1557 ; le Fer chaud, 1576). Longtemps oublié et méprisé, l'art de Hans Sachs a été redécouvert comme « art populaire » à la fin du XVIIIe siècle, et Goethe a loué notamment son « réalisme didactique ».

Sachs (Leonie Sachs, dite Nelly)

Poétesse allemande (Berlin 1891 – Stockholm 1970).

Juive, elle se réfugia en Suède en 1940. Amie de P. Celan, elle inscrivit la mémoire de la Shoah dans le lyrisme allemand en s'inspirant de sujets bibliques et mystiques. Dans sa poésie, où abstrait et concret s'unissent en images expressives (Présence à la nuit, 1961 ; Brasier d'énigmes, 1964-1967 ; Poèmes tardifs, 1965 ; la Chercheuse, 1966), les persécutions antisémites prendront la dimension d'un drame cosmique, comme dans ses 14 compositions pour la scène (dont Eli, 1951), rassemblées dans Signes dans le sable, qui furent récompensées par le prix Nobel de littérature en 1966.

Sachs (Maurice Ettinghausen, dit)

Écrivain français (Paris 1906 – Hambourg 1945).

Enfant mal aimé, homme à scandales, il écrit des livres qui lui ressemblent. Il est le témoin brillant d'une certaine marginalité de l'entre-deux-guerres, mondaine, sexuelle, littéraire et politique. Secrétaire de Cocteau et de Gide,  converti par Maritain, un temps séminariste, il fut romancier (Alias, 1935), chroniqueur (Au temps du Bœuf-sur-le-Toit, 1936), pour finir après divers déboires, et en dépit de son origine juive, dans la collaboration avec la Gestapo. Les œuvres posthumes (le Sabbat, 1946 ; Chronique joyeuse et scandaleuse, 1948 ; la Chasse à courre, suivie des Lettres de Hambourg, 1949 ; Derrière cinq barreaux, 1952 ; Tableau des mœurs de ce temps, 1954) suscitent autant de discussions que la vie orageuse de leur auteur.

Sachsenspiegel (Der)
(le Miroir des Saxons)

Ce premier recueil de lois et de coutumes en langue allemande (bas allemand) a été rédigé vers 1225 par Eike von Repgow, chevalier de la région de Dessau, également auteur d'une chronique universelle (Chronique universelle saxonne). En décrivant le droit féodal et les coutumes du nord de l'Allemagne, il laisse un témoignage précieux mais aussi une œuvre par laquelle le bas allemand acquiert droit de cité dans la littérature. Il manie d'ailleurs avec le même bonheur le moyen haut allemand, langue de la poésie courtoise. Il aura de nombreux continuateurs et imitateurs (Deutschenspiegel, Schwabenspiegel, XIIIe s.).

Sackville-West (Victoria Mary, dite Vita)

Femme de lettres anglaise (Knole, Kent, 1892 – Sissinghurst, Kent, 1962).

Élevée à Knole, propriété des Sackville depuis le XVIe siècle, elle épouse le diplomate et essayiste Harold Nicolson, qui rendra compte dans Portrait d'un mariage (1973) des tensions causées dans la vie du couple entre 1918 et 1921 par la liaison de « Vita » avec Violet Trefusis. Son principal recueil poétique, la Terre (1926), évoque à la manière des Géorgiques la beauté de la campagne anglaise, mais ce sont ses romans, les Édouardiens (1930), tableau de la jeune génération de l'establishment au début du XXe siècle, et Toute passion abolie (1931), qui lui vaudront un énorme succès littéraire. L'affection que Virginia Woolf a éprouvée pour Vita s'exprime dans le portrait imaginaire qu'elle a donné d'elle dans Orlando.

Sackville (Thomas) , baron de Buckhurst et 1er comte de Dorset

Poète anglais (Buckhurst, Sussex, v. 1530 – Londres 1608).

Juge, lord trésorier, il incarne le conformisme politique et poétique de l'époque (le Miroir des magistrats, 1563). Gorboduc ou Ferrex et Porex (1561-1562), en collaboration avec Norton, est la première tragédie anglaise en vers blancs. Jouée devant Élisabeth Ire en 1561, cette œuvre, politique plus que littéraire, pose le problème de la succession selon un thème qui sera repris dans le Roi Lear de Shakespeare.

sacra rappresentazione

Genre théâtral italien, d'inspiration religieuse, florissant aux XIVe et XVe siècles ; sa vogue s'interrompit vers le milieu du XVIe. Dérivé de la lauda, dont il accomplit l'évolution vers une dramatisation à plusieurs voix, il connut à l'origine un grand succès populaire sous forme de spectacles édifiants, mêlant le profane et le sacré. L'octave épique est la forme favorite des textes représentés. Le genre se développe particulièrement en Toscane, au XVe siècle, grâce à Laurent le Magnifique (Représentation de Saint-Jean et de Paul, 1491) et à Bernardo Pulci (Barlaam et Josaphat), qui aboutit avec l'Orphée (1480) de Politien à la naissance du théâtre courtisan d'argument profane, où la mythologie classique prit le relais du répertoire biblique.

Sacré (James)

Poète français (Cogou, Vendée, 1939).

Une enfance à la campagne, une carrière universitaire aux États-Unis à partir de 1965, des voyages en Europe et au Maroc ont nourri sa pratique poétique. Sa langue cultive savamment la maladresse de l'oralité enfantine, attachée à la crudité du réel et au prosaïsme de la vie, parcourue d'un tremblement d'émotion sensuelle dans un lyrisme retenu. Cela n'exclut pas les doutes sur l'aptitude des mots à retranscrire la vie ordinaire, le cadre rural de l'enfance, l'être aimé. Principaux recueils : Cœur élégie rouge (1972), Figures qui bougent un peu (1978), Écrire pour t'aimer ; à S. B. (1984), Une fin d'après-midi à Marrakech (1988), la Poésie, comment dire ? (1993), La nuit vient dans les yeux (1997), La peinture du poème s'en va (1998), Si peu de terre, tout (2000), Une petite fille silencieuse (2001).