Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
L

Loerke (Oskar)

Écrivain allemand (Jungen bei Marienwerder 1884 – Berlin 1941).

Romancier (la Construction de la tour, 1910), essayiste, critique littéraire, éditeur d'anthologies (l'Esprit allemand, 1940) et poète, Loerke a tenu une place importante dans l'histoire du lyrisme en Allemagne. Après des débuts expressionnistes, et tout en gardant de cette époque une vision du monde mythique et apocalyptique, il retrouve un langage dense et musical, et réintroduit la nature dans la poésie. Son œuvre lyrique (Migration, 1911 ; le Souffle de la terre, 1930 ; la Forêt du monde, 1936) a influencé des poètes comme W. Lehmann, E. Langgässer, G. Eich, K. Krolow et P. Huchel.

logogriphe

Énigme en vers, dans laquelle on compose, avec les lettres d'un mot, divers autres mots qu'il faut deviner, aussi bien que le mot principal. Le logogriphe était connu des Grecs et des Romains. Apulée avait écrit un Liber ludicorum et gryphorum, qui est perdu. Le Mercure de France commença à proposer en 1727, à ses lecteurs, des logogriphes qui étaient souvent renfermés en un seul vers : « Je brille avec six pieds, avec cinq je te couvre » – le mot à découvrir est « étoile », qui, par retranchement d'une lettre, devient « toile » –; « par quatre pieds j'entends, et par trois je réponds » – le mot est « ouïe », composé de quatre lettres, et qui, réduit à trois lettres, devient « oui ».

Lohenstein (Daniel Casper)

Écrivain allemand (Nimptsch bei Reichenbach 1635 – Breslau 1683).

Poète (Poèmes tragiques et comiques, 1680) et diplomate au service des Habsbourg, il est, avec Hofmann von Hofmannswaldau, la figure clef de la deuxième école silésienne du baroque allemand, qualifiée aussi de Schwulst (« enflure »). Nourri de la littérature antique, moraliste pessimiste, il met en scène dans ses tragédies « turques » (Ibrahim Bassa, 1653, d'après de Scudéry ; Ibrahim Sultan, 1673), « romaines » (Agrippine, 1665, Epicharis, 1666) et « africaines » (Cléopâtre, 1661 ; Sophonisbe, 1666), des héroïnes habitées par des passions excessives.

Loi (Franco)

Écrivain italien (Gênes 1930).

Sa poésie puise ses ressorts dans la langue parlée, en particulier dans le dialecte milanais, afin de faire resurgir des sentiments que le langage des médias a étouffés (Stròlegh, 1975 ; Teàter, 1978 ; Liber, 1988 ; l'Angel, 1994).

Lomami-Tshibamba (Paul)

Écrivain zaïrois (Brazzaville 1914 – Bruxelles 1985).

Il appartient à cette classe d'« évolués » rassemblés, dès les années 1930, autour de revues comme la Voix du congolais, puis, à partir de 1950, Liaison. Il a publié des nouvelles (Ngando le crocodile, 1943 ; la Récompense de la cruauté, 1972) et des romans (Ah, Mbongo ! Nkunga Maniongo, 1975 ; Ngemena, 1980) dans lesquels il évoque les vicissitudes de la colonisation belge et les incohérences de la décolonisation.

Lomonossov (Mikhail Vassilievitch)

Écrivain et savant russe (Michaninskaïa, gouvern. d'Arkangelsk, 1711 – Denissovkka 1765)

Fils de pêcheur, il s'enfuit de la maison paternelle en 1730, gagna Moscou à pied, se fit admettre à l'Académie slavo-gréco-latine, puis partit étudier en Allemagne, d'où il envoya son Ode sur la prise de Khotin (1739), d'une prosodie déjà classique. Fondateur des sciences russes, il eut aussi une énorme influence sur la formation de la littérature russe moderne : il réforma la poésie, en adoptant le vers syllabique tonique, et la langue (distinction des trois styles, noble, moyen et vulgaire), et en publiant la première Grammaire russe (1755). Il dota la littérature de sa première Rhétorique (1748) et illustra ses théories par des odes sacrées et des panégyriques. Il est également l'auteur de deux tragédies (Tamiré et Sélim, 1750 ; Démophon, 1757). Il fut pour les Russes « la première université » (Pouchkine).

London (John Griffith, dit Jack)

Écrivain américain (San Francisco 1876 – Glen Ellen, Californie, 1916).

Auteur de romans d'aventures et pionnier du socialisme américain, il fut le romancier le plus populaire de son temps et l'un des plus controversés. On a souvent considéré l'auteur de l'Appel de la forêt (1903) et de Croc-Blanc (1905) comme un écrivain pour la jeunesse, dans la lignée de Kipling. C'était oublier que, dans le Talon de fer (1907), London est le prophète d'une révolution anarchiste. Son roman le plus étonnant réside dans sa vie d'aventurier, qu'il raconte dans des œuvres autobiographiques comme Martin Eden (1909) et John Barleycorn (1913) – ses luttes contre le déterminisme des classes, l'alcoolisme et le désespoir.

   Fils naturel d'un astrologue irlandais et d'une spirite yankee, il dut survivre dans le San Francisco de la ruée vers l'or. Vendeur de journaux, ramasseur de quilles dans un bowling, chasseur de chats pour leurs peaux, écumeur des parcs à huîtres, chasseur de phoques au Japon, il rejoignit en 1894 l'armée rebelle des chômeurs de Jacob Sechler Coxey, en marche sur Washington. En 1897, chercheur d'or en Alaska avec une équipe d'illuminés, il passait ses nuits à discuter de Karl Marx et de Nietzsche, de Milton et de Kipling. À vingt-trois ans, il commença une carrière de pigiste à dix dollars les mille mots, exploitant ses souvenirs d'aventurier, dans un style qui renverse les conventions frileuses du roman. En 1898, son premier récit, À l'homme de la piste, est publié dans l'Overland Monthly, suivi de Odyssée du Grand Nord, puis d'un recueil de récits, le Fils du loup (1900), son premier véritable livre. En une dizaine d'années de travail acharné, Jack London se hisse au premier rang des romanciers populaires américains, produisant à un rythme inégalé une série de romans, dont les plus connus sont l'Appel de la forêt (1903), le Loup des mers (1904), la Lutte des classes (1905), Croc-Blanc (1905), le Talon de fer (1907), Smoke Bellew (1911), la Vallée de la lune (1913). En dix ans, il gagne de sa plume un million de dollars-or, sans cesser de dénoncer la société capitaliste et d'exalter les vertus compétitives de la lutte pour la vie dans les forêts nordiques. Il se vante d'être l'écrivain le plus payé au monde, mais signe ses lettres « Vôtre pour la révolution ». Play-boy du socialisme, il enquête sur les taudis de Londres (Peuple de l'abîme, 1903), mais se fait construire le plus beau yacht du monde et la plus belle villa de Californie. Milliardaire et endetté, surmené et alcoolique, il se suicide à quarante ans. C'est moins un idéal collectif qui anime cette vie et cette création prolifique, qu'une volonté de revanche. Dans ces symboliques histoires d'animaux, on devine sous le thème de la meute une fascination pour l'instinct primitif de survie individuelle. Des titres comme la Brute abyssale (1913), la Force aux forts (1913) révèlent cette obsession. Héros d'une époque qui a poussé le culte de l'entreprise jusqu'à la férocité, Jack London dénonce les maux d'un capitalisme anarchique et sauvage, mais cède à la fascination destructrice de cette grandeur colossale.